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ACCA – MIPA : les implications du Budget 2021-2022

Le bureau mauricien de L’Association of Chartered Certified Accountants (ACCA) a organisé, le lundi 14 juin, en collaboration avec le Mauritius Institute of Professional Accountants (MIPA), une conférence en ligne pour ses membres afin d’analyser le Budget 2021-2022. Cette année encore, la traditionnelle conférence de l’ACCA faisant suite à la présentation du Budget a eu lieu en mode virtuel afin de respecter les précautions sanitaires dans le contexte de la présence de la Covid-19 sur le sol mauricien.

Suite aux présentations générales de Madhavi Ramdin-Clark (Head of ACCA Mauritius) et de Vivek Gujadhur (président du MIPA), les interventions des experts économiques et financiers dans divers domaines ont permis aux participants de mieux comprendre certaines implications de ce Budget. Ces experts étaient: l’économiste et consultant Pierre Dinan; Gary Gowrea, spécialiste en fiscalité et fondateur/directeur de LTS Tax Services Ltd; Anthony Leung Shing, ‘Country Senior Partner’ de PwC Mauritius; et Michael Pompeia, ‘Head of Business Support Services’ à SME Mauritius. La session de questions/réponses était dirigée par l’expert-comptable Clensy Appavoo, CEO de HLB Mauritius.

Pierre Dinan

Pierre Dinan a consacré son intervention à l’état des finances publiques. Selon lui, la croissance de 9% du PIB prévue par le ministre des Finances doit être mise en perspective, car nous avons eu pour l’année écoulée une décroissance estimée à 5,4%; ce qui veut dire que le taux positif réel de cette croissance est inférieur à 9%. Ce taux de 9% représenterait un montant énorme de Rs 60 milliards, précise-t-il. Certaines sources de financement attirent particulièrement l’attention, note-t-il. Ainsi le transfert de plus de Rs 11 milliards depuis des organisations publiques vers les caisses du gouvernement pourrait priver ces organisations de fonds nécessaires à leurs investissements en projets et activités de développement. Par ailleurs, dit-il, les revenus attendus de la CSG pour l’année financière 2021-2022, à Rs 7,8 milliards, sont supérieurs à ceux de l’année écoulée par plus de 50%, alors qu’on s’attendrait à une augmentation d’environ 1/3 en tenant compte de la mise en œuvre sur 9 mois au lieu de 12 pour l’année écoulée.

Pierre Dinan note aussi, pour les revenus de l’Etat, le recours aux fonds de la Banque de Maurice et l’utilisation de « special funds » – en regrettant un manque de transparence concernant ces fonds spéciaux. Le niveau des dépenses publiques d’environ Rs 136 milliards pour l’année à venir (très légèrement moins que l’année écoulée), devraient augmenter suite au jugement du Privy Council dans l’affaire Betamax, note l’économiste. «Il est regrettable que rien n’ait été dit sur la balance des paiements, car nous ne vivons pas dans un vase clos», estime par ailleurs l’économiste. D’autant plus, souligne-t-il, que cette balance était négative de Rs 3,45 milliards en juin 2020 et qu’on ne peut s’attendre à une amélioration avec Rs 172 milliards d’importations et seulement Rs 70,7 milliards d’exportations à la fin de la présente année financière.

Gary Gowrea

Gary Gowrea note l’absence de nouvelles taxes ou de changements dans les taux de taxes existantes. «Mais plusieurs mesures touchant à la fiscalité sont annoncées et auront un effet sur les entreprises et les individus», relève-t-il. Il note aussi l’annonce d’une Financial Crime Commission qui suscite une interrogation sur ce que cela implique pour l’ICAC, selon l’expert en fiscalité. L’annonce de cette nouvelle organisation vient s’ajouter au train de mesures prises pour améliorer la situation de Maurice dans les classements du GAFI et de l’UE, avec notamment de nouvelles lois, dit-il. «Nous avons été mis sur la ‘watch list’ du GAFI et nous voyons de leur dernier Progress Report qu’il nous reste seulement un ou deux éléments sur lesquels les rassurer. La prochaine étape est celle d’une évaluation par le GAFI, sur le terrain à Maurice, suivie de leur recommandation», rappelle Gary Gowrea. «Avec l’ouverture prochaine de nos frontières, cela devrait être fait. La prochaine session plénière du GAFI est prévue pour octobre ou novembre. Cette session pourrait prendre une décision sur les recommandations pour Maurice, qui pourraient être positives. La décision de l’UE suivra logiquement celle du GAFI».

Anthony Leung Shing

Anthony Leung Shing s’est concentré sur les mesures touchant aux investissements et au monde des affaires. Pour le Country Senior Partner de PwC Mauritius, il y a dans ce Budget une volonté d’attirer les compétences et les investissements de l’étranger, en souhaitant un effet multiplicateur sur l’économie. Plusieurs incitations sont ainsi proposées pour le développement dans les services financiers, les biotechnologies, l’immobilier, le tourisme et l’«économie verte» notamment. De même, des incitations sont proposées aussi bien aux entreprises, qu’aux individus recherchant un emploi, voulant faire des études ou souhaitant passer leur retraite à Maurice. «Il faut toutefois être prudent. Le Budget précédent annonçait aussi certaines mesures incitatives, qui ont créé de l’intérêt à l’étranger, mais le manque de réalisation a eu un effet assez négatif. Attendons de voir ce qui sera confirmé dans les faits», relève Anthony Leung Shing.

Michael Pompeia

Michael Pompeia s’est particulièrement intéressé à la situation des petites et moyennes entreprises dans le monde des affaires. La trésorerie (cash-flow) et la compétitivité sont les deux principaux problèmes des PME et des micro-entreprises, estime-t-il. Près de 140 000 entreprises sont dans cette catégorie à Maurice, rappelle-t-il. Leur situation, difficile déjà pour certaines, a empiré avec deux confinements en un an, avec une réduction des activités et donc des revenus, à laquelle s’ajoute une augmentation des coûts des intrants locaux et étrangers, et du fret. Les mesures budgétaires peuvent aider, grâce aux prêts à taux très bas ou taux zéro de la DBM, à l’amnistie sur les trade fees et pénalités pour certaines catégories d’entreprises, au Freight Rebate Scheme et aux autres mesures d’accompagnement financier ou fiscal. La création du Modernisation and Transformation Fund de Rs 5 milliards sera un apport certain selon Michael Pompeia, qui soutient que des PME ont clairement besoin de se moderniser afin d’être compétitive. Il salue par ailleurs l’annonce concernant l’acquisition prioritaire auprès des producteurs locaux, qui aidera certainement les PME.

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