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Analyse : Sortir de l’impasse d’une économie fonctionnelle à 85 %

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Analyse - Richard Le Bon

Depuis le décret du confinement, l’on ressent une nouvelle énergie ; une volonté ferme des pouvoirs publics, du secteur privé et de toute la population de lancer une offensive contre un microorganisme qui a chamboulé nos vies.

Paradoxalement, c’est la résurgence de la Covid-19 qui a provoqué le déclic. En dépit des craintes exprimées par rapport au vaccin d’AstraZeneca et le risque supposé de formation de caillots sanguins – celles-ci ont été réfutées par l’Agence européenne des médicaments –, les Mauriciens, dans un effort de se protéger eux-mêmes et leurs proches, mais surtout dans un bel élan patriotique, se sont fait vacciner en nombre. Jour après jour, le nombre de vaccinés est en nette progression.

Quand, à la veille du redémarrage de la campagne de vaccination, Business Mauritius affichait sa détermination de faire vacciner au quotidien environ 8 000 employés des services essentiels dans un premier temps et d’augmenter ce nombre à 10 000, il est vrai qu’on a accueilli ces estimations avec une pointe de scepticisme. D’autant plus qu’en début d’année, on se laissait griser par une douce léthargie, justifiant notre inaction par le fait que nous étions Covid safe. Pendant ce temps, les Seychelles et les Maldives qui, soit dit en passant, sont des destinations touristiques concurrentes, se démenaient pour vacciner leurs citoyens. Résultat : dans le cas des Seychelles, l’archipel rouvrira ses frontières demain, jeudi 25 mars.

Mais ne nous attardons pas sur les indécisions du passé. Valeur du jour, la campagne de vaccination se fait à un rythme soutenu. Samedi dernier, pas moins de 13 000 personnes se sont fait vacciner. Et là, il est juste de saluer la belle entente entre l’État et le secteur privé ces jours-ci. Si l’on parvient à garder le cap, il sera alors possible de vacciner 60 % de la population d’ici à fin juin. Concrètement, cela signifie qu’on aura atteint l’immunité collective, qu’on sera en mesure de rouvrir nos frontières et qu’on pourra enfin prendre le contrôle de notre destin et travailler pour libérer les forces productrices. Souhaitons au passage que nos politiques donnent l’exemple et qu’avec la reprise des travaux parlementaires, les élus des deux côtés de la Chambre mettent leur rancœur de côté et œuvrent dans l’intérêt supérieur de la nation.

Oui, il est permis d’espérer des jours meilleurs pour notre société et notre économie. Dans son rapport intitulé Impact Assessment – 2nd lockdown publié en début de semaine, AXYS fait ressortir que l’impact du reconfinement est moindre que lors du premier confinement. Selon le cabinet, le manque à gagner pour l’économie mauricienne se situerait autour de Rs 300 millions à Rs 350 millions par jour contre Rs 550 millions à Rs 600 millions l’année dernière. Un ensemble de facteurs font que l’impact sur l’activité économique est mitigé : la vitesse à laquelle les Work Access Permits ont été délivrés ; la fermeture de très courte durée (1 jour) des supermarchés, des banques et de la Bourse de Maurice ; le fait que le secteur manufacturier ne verra pas l’annulation de ses commandes et qu’il n’y a pas eu de perturbations aux chaînes d’approvisionnement car l’activité cargo reste ininterrompue au port et à l’aéroport. En outre, AXYS fait remarquer que le déroulement de la campagne de vaccination demeure un facteur positif pouvant impacter positivement la reprise.

«Ce chiffre de 85 % peut résonner comme étant acceptable, mais en économie, c’est une performance misérable»Richard Le Bon.

En partant du scénario que le confinement s’étalera sur un mois, l’étude estime qu’on perdra 2 points de croissance. Concernant le produit intérieur brut (PIB), il devrait avoisiner Rs 450 milliards cette année en raison des effets pernicieux du reconfinement contre des prévisions initiales de Rs 459 milliards. Il est bon de noter que le PIB était calculé à Rs 498 milliards en 2019 avant de chuter à Rs 428 milliards en 2020.

L’autre enseignement majeur du rapport, c’est que l’économie mauricienne fonctionne à 85 % de sa capacité depuis le premier confinement. Cela en raison du quasi-arrêt dans le secteur touristique qui s’est contracté de 67 % sur les 12 derniers mois. De prime abord, ce chiffre de 85 % peut résonner comme étant acceptable, mais en économie, c’est une performance misérable ! En l’occurrence, dans le cas de Maurice, l’inactivité dans le tourisme se traduit par une pression sur l’emploi et sur notre niveau de devises, ainsi qu’une dégradation de la balance des paiements. D’ailleurs, le solde des transactions courantes (Current account) est lourdement déficitaire de -13 % en 2020 contre -5,4 % en 2019.

Aujourd’hui, la priorité absolue reste la vaccination. Passé cette étape, il faudra se mettre au travail et s’atteler à la reconstruction. Sur le long terme, un déclin relatif de notre tissu économique serait catastrophique. L’on ne pourra se permettre d’avoir une économie fonctionnelle qu’à 85 %.

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