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Ariel Lamothe (directeur de Stage’In) – «L’événementiel est en mode survie»

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Ariel Lamothe (directeur de Stage’In) - «L’événementiel est  en mode survie» | business-magazine.mu

Votre entreprise, qui est spécialisée dans l’événementiel, s’est récemment illustrée pour avoir illuminé le phare d’Albion. Quel était l’objectif de cette

initiative ? 

Albionnais depuis maintenant dix ans, cela faisait longtemps déjà que je souhaitais mettre en valeur ce phare grâce à un jeu de lumières. Pendant le confinement, alors que notre activité était à l’arrêt, nous nous sommes demandé, avec mon équipe, ce que nous pourrions bien faire pour continuer à faire tourner les équipes et le matériel. C’est à ce moment que nous avons pris connaissance d’une initiative internationale, qui a démarré en Australie et qui consistait à illuminer les bâtiments pour remercier les frontliners. Nous nous sommes dit que cela contribuerait à propager des ondes positives si nous tentions quelque chose de similaire ici.

Nous avons donc entamé des démarches auprès du ministère du Tourisme pendant le confinement. On a monté un dossier et leur avons fait part du projet. Nous voulions, au départ, illuminer un théâtre, un bâtiment du gouvernement, un hôpital et le phare d’Albion. L’idée était de tourner un clip, réalisé en collaboration avec la Mauritius Film Development Corporation, qui serait diffusé à l’ouverture des frontières, initialement prévue pour le 11 septembre, pour promouvoir la destination. Malheureusement, le feu vert est arrivé bien après le déconfinement. C’était donc un peu trop tard pour remercier les frontliners alors qu’il y avait déjà eu plein d’initiatives en ce sens.

Malgré cela, nous avons décidé de foncer tête baissée. Nous avons contacté sept institutions pour avoir toutes les autorisations nécessaires et, au final, nous avons eu le feu vert pour le Plaza et le phare. Comme nous avions déjà illuminé le Plaza par le passé, nous avons décidé de nous tourner vers le phare. Ce projet a réuni une trentaine de volontaires, dont des vidéographes professionnels, des cordistes qui ont monté le matériel en haut du phare et du personnel technique.

L’illumination du phare a attiré de nombreuses personnes et je dois avouer que je n’avais pas du tout anticipé cela. Nous avons eu beaucoup de messages de gratitude. Les retours positifs sur ce projet qui me tenait à cœur ont été tellement positifs que nous aurions très envie de renouveler l’expérience sur un autre bâtiment qui n’a jamais été illuminé.


À l’image des autres acteurs de l’événementiel, vous avez également été durement frappé par la fermeture des frontières. Comment faites-vous pour tenir le coup ?

À Stage’In, par exemple, le dernier événement sur lequel nous avons travaillé date du 26 février. Dès le lendemain, mon téléphone a commencé à sonner et en seulement quatre jours, le calendrier s’est complètement vidé. Il faut savoir que nous réalisons entre 65 % et 70 % de notre chiffre d’affaires sur le tourisme d’affaires et autres «group incentives» qui viennent dans les hôtels. Or, aujourd’hui, ce marché est à l’arrêt. Ensuite, nous réalisons entre 20% et 25 % sur le corporate local, soit des inaugurations, des lancements de véhicules, des Salons de l’auto, et autres événements pour des compagnies d’assurances et des banques. Aujourd’hui, certains de ces clients n’ont plus d’argent à mettre dans des événements. D’autres n’ont plus confiance en l’avenir. Et puis il y a ceux qui ont encore de l’argent mais ne veulent pas le montrer afin de ne pas envoyer un mauvais signal. Notre dernier marché, celui des mariages locaux, a lui aussi pris un coup puisque tous ont choisi, et on le comprend, de reporter leurs mariages d’au moins une année. J’ai même vu des mariages annulés parce que le marié, qui est Mauricien, était bloqué à l’étranger.

Pour nous, comme pour les autres acteurs de l’industrie, les petits événements d’hier sont devenus les grands événements d’aujourd’hui. Du jour au lendemain, nos trois secteurs d’activités ont été réduits à néant. Il ne nous reste actuellement un tout petit peu de corporate local. Face à cette situation, nous avons pris conscience que pour survivre, nous n’avions d’autre choix que de nous faire aider.


Face aux difficultés que rencontre actuellement le secteur de l’événementiel, vous avez créé une association, baptisée l’Union des prestataires professionnels de l’événementiel mauricien (UPPEM). Quel est l’objectif de cette démarche ?

Il y a eu, pendant le confinement, un gros travail de réflexion et des discussions avec différents acteurs de l’industrie de l’événementiel. Nous avons notamment eu la chance d’être intégrés dans une enquête qu’a menée l’Association of Communication Agencies (ACA) il n’y a pas si longtemps. Le souci, c’est que l’ACA n’a pas les mêmes demandes que nous, puisque ses membres opèrent dans la communication, un secteur qui continue malgré tout de fonctionner malgré le contexte économique difficile. Or, ceux engagés dans le secteur de l’événementiel sont complètement à l’arrêt et n’ont plus du tout de rentrée d’argent depuis maintenant plusieurs mois.

Après avoir connu des mois de mars, d’avril et de mai très compliqués, nous nous sommes parlé avec le patron d’Events by Bedouin et on s’est dit qu’il nous fallait réunir les confrères afin de faire entendre notre voix auprès du gouvernement. En cinq jours, nous avons écrit les statuts de l’UPPEM, qui est aujourd’hui une union mais nous avons entamé des démarches pour qu’elle soit enregistrée en tant qu’association parce que cela nous a été demandé par le gouvernement.

À ce jour, l’UPPEM compte 49 membres et représente quelque 1 000 emplois directs et 1 000 emplois indirects. Au total, les entreprises qui font partie de l’UPPEM réalisent chaque année un chiffre d’affaires d’environ Rs 1 milliard, ce qui n’est pas négligeable. Chacun des membres a soumis aux autorités tous les chiffres et leur ont fait comprendre que sans aide, ils ne pourront pas tenir plus de quelques mois.

Nous avons donc sollicité la mise en place de 11 mesures directes et 7 mesures indirectes pour venir en aide et soutenir l’industrie de l’événementiel. Mais pour l’heure, nous n’avons obtenu que le Government Wage Assistance Scheme (GWAS), qui en gros couvre jusqu’à Rs 25 000 le salaire de l’employé touchant entre Rs 25 000 et Rs 49 999, et au-delà de Rs 50 000, ne couvre rien du tout.

Il faut bien comprendre que cette aide, il faudra la rembourser sous forme de corporate tax additionnelle quand nous serons à nouveau bénéficiaires. Pour l’instant, ce n’est pas à l’ordre du jour parce que nous sommes tous déficitaires. On est en train d’épuiser, pour ceux qui en ont encore, nos réserves. Certains voient également dans cette aide une sorte de dette supplémentaire qu’ils sont en train de contracter.

La plupart d’entre nous avons dû reporter le remboursement des emprunts que nous avons contractés mais on doit quand même s’acquitter des intérêts, pareil pour les loyers, que certains propriétaires ont bien voulu repousser. Mais quand cela va reprendre, on va reprendre avec des dettes de fou. Il n’y a pas un débiteur qui règle ses quittances. Il n’y a vraiment plus d’argent qui rentre.

Une bonne partie des membres de l’UPPEM n’ont pas été aidés et parmi ceux qui l’ont été, ils n’ont pas été aidés tout le temps. Ici, à Stage’In, on a été aidé jusqu’en juin, mais depuis juillet, on ne touche plus le GWAS. On continue de se battre, mais ont comprend que les autorités soient débordées. Nous sommes tous pour l’heure dans l’incertitude la plus totale.

Quand pensez-vous que la situation reviendra à la normale ?

Personnellement, je n’envisage pas une petite reprise avant septembre 2021. Et il faudra encore attendre deux ou trois ans avant de retrouver le niveau d’activité pré-Covid-19. Cette année, il n’y aura, du moins pour ce qui concerne l’industrie de l’événementiel, zéro reprise. Tout simplement parce qu’il est très peu probable que les hôtels soient remplis pour la fin de l’année et qu’ils organisent de grandes soirées avec des feux d’artifice le long de la côte. Ce qui est clair, c’est que tout le monde ne pourra pas tenir.



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