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Confinement en Chine: la congestion du port de Shanghai ralentit les activités dans le textile

Aerial view of Deep water port with cargo ship and container

Les mesures de confinement liées à la Covid-19 à Shanghai touchent à leur fin, mais une congestion dans le port de la mégalopole chinoise pourrait avoir des conséquences sur le secteur du textile mauricien, débouchant ainsi sur des retards dans les commandes.

Depuis la mi-mars, Shanghai, l’une des villes les plus peuplées et le centre commercial le plus important de Chine, fait l’objet d’un confinement strict à la suite d’une augmentation des cas de la Covid-19. Dès lors, les habitants de la mégalopole n’ont été autorisés à quitter leurs domiciles que dans quelques quartiers de la ville, tandis que son port fonctionne à une capacité minimale. De nombreuses exportations se retrouvent donc bloquées à Shanghai, car les travailleurs du port et les chauffeurs de camion qui transportent les marchandises vers et depuis le port sont assignés à domicile.

En avril dernier, environ un tiers des 1 800 porte-conteneurs bloqués dans le monde se trouvaient à Shanghai ou à proximité. Toutefois, la nouvelle est tombée dimanche : les autorités de Shanghai ont annoncé que certaines des mesures de confinement liées à la Covid-19 seront levées à partir de ce mercredi 1er juin. Les operations quotidiennes au port de Shanghai se sont presque entièrement remises des effets du confinement. Cependant, les retards dus aux perturbations du port et des usines voisines continueront probablement de provoquer des congestions pendant une bonne partie de l’année. Le responsable du ministère des Transports, Li Huaqiang, indique que le débit quotidien de conteneurs – une mesure de l’activité de manutention des marchandises – au port de Shanghai a rebondi à 95,3 % du niveau normal. Le débit de fret dans les principaux ports chinois entre les 1er et 24 mai a augmenté de 4,2 % par rapport à la même période en avril, mais a diminué de près de 1 % par rapport à 2021.

«Les prix du fil, du tissu, des matières synthétiques et du carton enregistrent des hausses allant de 8 % à 30 %»

ALEXIS DELAMAIRE

DIRECTEUR GÉNÉRAL DE CREDIT GUARANTEE INSURANCE

Ce hard lockdown dans la ville de Shanghai a eu un gros impact sur l’ensemble des chaînes d’approvisionnement mondiales. Maurice n’a pas, non plus, été épargné ; avec le secteur du textile affichant des retards dans la production. Le directeur general de Credit Guarantee Insurance Co. (CGI), Alexis Delamaire, dit craindre de gros ajournements dans les commandes dans les jours à venir, mais aussi, une nouvelle vague d’indisponibilité des conteneurs qui pourrait, selon lui, entraîner une nouvelle hausse des coûts de fret.

«Les prix ont flambé ces derniers mois. Les prix du fil, du tissu, des matières synthétiques et du carton enregistrent des hausses allant de 8 % à 30 %. Le prix du fret s’est envolé, passant de 1 800 dollars à 9000 dollars pour un conteneur. Les armateurs, eux, privilégient les lignes occidentales Amériques et l’Europe avec des chargements plus importants. De manière générale, tous secteurs confondus, l’on a enregistré une hausse de coût des matières premières ou import entre 20 % et 35 %. La dépréciation de la devise et la hausse du coût de production des matières premières, associés à la hausse du fret maritime pénalisent la productivité du secteur textile notamment», explique Alexis Delamaire.

Les effets délétères du confinement en Chine viennent se greffer aux conséquences de la guerre en Ukraine. La consequence en est une inflation des prix des matières premières. Ce qui amène Alexis Delamaire à dire qu’il faut anticiper un impact sur la trésorerie des entreprises mauriciennes, et plus généralement sur les perspectives de croissance attendues pour l’année fiscale en cours. Selon ses calculs, la fermeture du port de Shanghai pourrait avoir un impact à la baisse sur le produit intérieur brut du secteur du textile allant jusqu’à 3 %.

RETARD DANS LES COMMANDES

De son côté, Shane Ramburn, le président de CILT Mauritius Next Gen, fait remarquer que l’industrie du textile reste fortement dépendante de la Chine. Ainsi, le port de Shanghai étant considéré comme le port le plus actif au monde en termes de tonnage de marchandises, tout retard d’expédition lié au confinement aura un impact négatif sur l’ensemble du secteur. Il argue que la politique chinoise visant à atteindre l’objectif de Zéro Covid, qui est également à la base de son strict confinement, est largement dépassée. Et que cette politique doit absolument être réévaluée afin de maintenir les chaînes d’approvisionnement en mouvement et afin de garder la reprise économique mondiale sur les rails.

«Les fermetures de Shanghai font partie d’une perturbation généralisée de la chaîne d’approvisionnement qui continue d’entraver la reprise économique. Il est grand temps de revoir ces politiques dépassées et de les remplacer par des leçons actuelles. Cela afin de preserver à la fois les vies et les moyens de subsistance», fait ressortir Shane Ramburn.

L’industrie du textile, enchaîne- t-il, a déjà été affectée par les perturbations causes par le Brexit, suivi de la Covid-19. Désormais, elle est confrontée aux difficultés causées par la guerre en Ukraine et la fermeture d’un certain nombre de points de vente en Russie, ainsi que par la hausse de l’inflation. Avec ce ralentissement au niveau de Shanghai, les problèmes persistent, sans pour autant qu’on ait des solutions apparentes.

Selon un autre acteur du secteur, jusqu’ici son bateau a pris deux mois de retard. Initialement, il aurait dû recevoir ses marchandises le 28 avril, mais il ne les recevra que le 10 juin. Malgré ce retard, il est difficile pour lui de se tourner vers d’autres marchés ou d’autres fournisseurs étrangers. «J’achète du tissu en Chine pour 4 dollars. Je ne vais pas acheter le même tissu en Italie, par exemple, ou en Europe, en Inde, parce que j’ai déjà un fournisseur avec lequel je travaille depuis des années. Le temps pour moi de réagir, de trouver un autre fournisseur, de trouver le même tissue pour la même qualité que j’ai l’habitude de vendre à mes clients depuis des années, est très compliqué. Je n’ai d’autre choix que de me débrouiller avec les moyens du bord en attendant que mon bateau n’arrive», souligne-t-il.

Cependant, il ne cache pas ses préoccupations. Il craint qu’à cause du retard, son client refuse de prendre ses commandes. Si son bateau arrive le 15 juin, par exemple, il lui sera très difficile d’exécuter les commandes en quelques jours. Non seulement cela prend du temps, mais il a ausi d’autres clients qui attendent. «Pour un ‘petit’ commerçant comme moi, c’est un gros problème qui met toute mon organisation sens dessus dessous», se désole-t-il.

«Les fermetures de shanghai font partie d’une perturbation généralisée de la chaîne d’approvisionnement qui continue d’entraver la reprise économique»

SHANE RAMBURN

PRÉSIDENT DE CILT MAURITIUS NEXT GEN

 

Une couverture pour sécuriser les transactions logistiques

Chaque entreprise se doit d’investir dans des systèmes et solutions qui s’intègrent avec l’écosystème plus vaste, car l’isolement n’est plus une option viable sur le long terme, estime Alexis Delamaire. Il est d’avis qu’il faut developer un réseau connecté tripartite entre le fournisseur, l’industriel textile et le client final. « Outre le secteur de la logistique, le coût du pétrole élevé met sous pression la production de fibres synthétiques, qui représentaient en 2020 quelque 60 % des fibres produites dans le monde. De manière indirecte, cela va impacter notre industrie du textile. Afin de sécuriser les transactions logistiques et le financement de la ‘Supply chain’, CGI a mis en place une couverture crédit permettant de garantir les acomptes fournisseurs et plus largement le financement de la ‘Supply chain’ via le support des banques», fait-il ressortir.

 

REVOIR LES CONNEXIONS MARITIMES

Malgré tout, estime Alexis Delamaire, le secteur du textile bénéficie, auprès des donneurs d’ordre d’une bonne cote et les opérateurs ont enregistré une forte hausse de leur carnet de commandes sur la période 2022-2023. Il précise que les déboires asiatiques permettent aux acteurs mauriciens très réactifs de tirer leur épingle du jeu. Il rappelle qu’en 2021, la Mauritius Export Association (MEXA) avait formulé cinq propositions pour améliorer les problématiques relatives au fret, don’t l’affrètement d’un navire régional d’approvisionnement. Au-delà d’une solution régionale, il faudrait, selon lui, accentuer les efforts sur les technologies numériques qui sont l’un des principaux facteurs de resilience de la chaîne d’approvisionnement. «Si celles-ci sont indispensables à la mise en place d’une ‘Supply chain’ robuste, à même de resister aux perturbations, encore faut-il miser sur les bonnes technologies», fait ressortir Alexis Delamaire.

Par ailleurs, Shane Ramburn fait ressortir que les délais d’acheminement des marchandises vont continuer à s’étendre, entraînant des retards dans la chaîne d’approvisionnement, déjà perturbée. Selon ses observations, il ne serait pas surprenant que les transporteurs mettent en place des traverses à blanc supplémentaires pour réduire la capacité et maintenir une forte demande, justifiant ainsi leurs niveaux de tarifs ou augmentant leurs tarifs. De plus, il pense que l’impact le plus important sur l’augmentation des délais se situe au niveau du trajet entre la collecte de la cargaison et le départ, en raison de facteurs tels que les annulations de navires, les pénuries de camionneurs et les implications des confinements et des restrictions liés à Covid-19. Il est donc nécessaire de multiplier les connexions en termes de fret maritime et aérien pour réduire les délais.

Recul des IDE étrangers sauf dans le secteur financier et les assurances

Le montant des investissements directs étrangers (IDE ) atterrissant à Maurice s’élevait à Rs 15,42 milliards en 2021 contre Rs 16,9 4 milliards en 2020, soit une baisse de 9,85 %. Ce sont là les derniè res estimations de la Banque de Maurice.

L’immobilier et le foncier continuent de monopoliser le plus gros flux d’IDE. Ainsi, l’année derniè re, ces activités ont permis de canaliser des capitaux étrangers de Rs 8,37 milliards contre Rs 9 ,21 milliards l’année précédente. L’immobilier du luxe demeure le secteur qui attire le plus d’IDE . Au total, Rs 5,9 2 milliards ont été injectées dans des projets sous différents régimes (Integrated Resort Scheme, Real Estate Scheme, Invest H otel Scheme, Property Development Scheme et Smart City Scheme 1) contre Rs 6,31 milliards en 2020.

Bonne performance également du secteur financier et des assurances avec des IDE de l’ordre de Rs 1,82 milliard en 2021 comparativement à Rs 1,72 milliard l’année précédente. Concernant le secteur de l’hospitalité (hébergement et restauration, il a canalisé des capitaux étrangers pour un montant de Rs 958 millions en 2021 contre Rs 1,02 milliard en 2020.

Il est à noter que l’E urope demeure le plus gros pourvoyeur d’IDE avec un montant de Rs 5,94 milliards en 2021 contre Rs 10,39 milliards, soit une lourde baisse de 75 %. Dans le top 3 des pays pourvoyeurs d’IDE , l’on retrouve la France (3,3 milliards), l’Afrique du Sud (Rs 2,24 milliards) et les Émirats arabes unis (Rs 2 milliards).

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