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Coopération économique: l’Iran veut faire de Maurice une plaque tournante pour ses ambitions africaines

L’Iran entend accroître sa présence en Afrique et voit en Maurice un partenaire pour concrétiser ses ambitions africaines. Les deux pays viennent de conclure un accord de partenariat.

La réaction positive de l’Iran sur la proposition de l’Union européenne visant à relancer l’accord de 2015 sur son programme nucléaire ouvre de nouvelles opportunités d’affaires pour Téhéran qui signifie clairement son intention d’adopter une politique d’ouverture. Des opportunités que Maurice entend bien saisir. Ainsi, l’Economic Development Board (EDB) vient de signer un accord de partenariat avec la Trade Promotion Organization of Iran. Cet accord vise à renforcer les relations économiques et commerciales entre les deux pays. Il facilitera notamment l’implantation d’entreprises iraniennes engagées dans la pharmaceutique et la nanotechnologie sur notre sol.

Dans le même temps, une mission officielle s’est déplacée à Téhéran. Elle comprend notamment le ministre du Commerce, Soodesh Callichurn, et des représentants de l’EDB et la Chambre de Commerce et d’Industrie (CCIM). Ils ont eu des séances de travail avec le ministre des Finances iranien, Ehsan Khandouzi Khandouzi, ainsi qu’avec le Head of Chamber of Commerce, Industries, Mines and Agriculture, Gholam Hossein Shafeie.

Dans une déclaration au Tehran Times suivant la signature d’un protocole d’accord avec la CCIM, Gholam-Hossein Shafeie a évoqué la détermination de l’Iran à étendre ses relations économiques avec les pays africains. Il voit Maurice jouer un rôle central dans le cadre de cette stratégie. «Nous sommes déterminés à ouvrir la voie aux hommes d’affaires de notre pays pour atteindre les marchés africains. Cela peut conduire au développement de la coopération de l’Iran avec Maurice et d’autres pays membres de cette union», a-t-il déclaré.

Commentant les avancées rapides dans les relations économiques et commerciales entre les deux pays, Javed Bolah, consultant en stratégie, branding et communication et directeur du cabinet de conseil Cerebrõ, rappelle d’emblée que les accords commerciaux ont permis à de nombreux pays de développer leur économie d’une manière durable et d’élever le niveau de vie de leurs citoyens. «Ce présent accord, on l’espère, accordera à Maurice une garantie d’accès préférentiel aux produits iraniens ainsi qu’un certain niveau de protection tarifaire inférieure, surtout dans un contexte où les prix des commodités s’envolent. En contrepartie, l’Iran cherche également à y trouver son compte», observe-t-il. Pour lui, Maurice peut clairement jouer un rôle de facilitateur pour l’Iran, notamment dans le cadre de ses relations commerciales avec les membres de l’Indian Ocean Rim. «Hormis les accords commerciaux, Maurice a plus que jamais besoin de se revigorer et de passer à la vitesse supérieure. Les avantages économiques et commerciaux dépassent largement les accords entre deux pays. En raison de son positionnement et un régime fiscal attirant, Maurice peut et doit se positionner promptement comme le ‘broker’ de l’Afrique», insiste Javed Bolah.

Il est rejoint par Shahed Hoolash, Managing Director de Vistra. Rappelant qu’outre le pétrole, l’Iran exporte également des minerais, produits chimiques, ainsi que des fruits et légumes, il dit s’attendre à ce que le commerce entre nos deux pays en sorte rapidement gagnant. «L’accord de coopération économique favorisera des transferts de technologie dans des industries de pointe tout en permettant à Maurice de positionner son secteur des services pour prendre avantage des opportunités qu’offre le marché iranien. Nous pouvons attirer des touristes ainsi que des investisseurs iraniens. Ils pourront prendre avantage de la palette de services financiers que nous offrons», argumente-t-il.

Concernant la volonté de l’Iran d’investir dans l’industrie pharmaceutique et la nanotechnologie, Shahed Hoolash fait remarquer que l’on parle là de deux secteurs stratégiques et à très fort potentiel pour un pays comme Maurice. En cela, l’expertise que l’Iran pourrait apporter, notamment à travers des partenariats ou de transferts de technologie, ouvrira de nouvelles perspectives pour l’économie mauricienne. «Étant des créneaux d’avant-garde, le secteur pharmaceutique et celui de la nanotechnologie permettront également à nos jeunes qui suivent actuellement des études dans ces domaines d’obtenir des débouchés d’emplois qui correspondent à leurs études spécialisées. Les relations Iran-Maurice ont été préservées depuis de nombreuses années et maintenant que la fin des sanctions économiques contre ce pays est évoquée, nous pouvons nous attendre à une montée en puissance de nos relations économiques. Que ce soit dans le commerce ou le tourisme, mais aussi à travers les flux de capitaux entre l’Iran et l’Afrique à travers le centre financier international de Maurice», explique-t-il.

Pour le Managing Director de Vistra, Maurice étant un État insulaire avec une économie certes diversifiée, mais toujours relativement petite, il est logique et souhaitable de maintenir de bonnes relations diplomatiques et économiques avec tous les partenaires existants et potentiels, à l’instar de l’Iran. «Avec la fin souhaitable du régime de sanctions économiques contre l’Iran, le commerce, le flux de touristes ainsi que la coopération économique en général devraient croître entre nos deux pays», anticipe-t-il.

Une opportunité à saisir

Et Javed Bolah de renchérir que Maurice est limité par sa taille et en termes de ressources. Ainsi, il voit dans cette coopération avec l’Iran dans la pharmaceutique et la nanotechnologie une opportunité à saisir. «Maurice a été célébré comme le meilleur élève sur le continent africain. Il doit continuer à démontrer une certaine humilité. L’Iran a une capacité de production pharmaceutique bien développée. Il produit 80 % à 90 % des matières premières nécessaires à l’intérieur du pays, notamment des microplaques et de l’oméprazole souvent utilisé par les Mauriciens pour traiter les brûlures d’estomac», indique-t-il.

Concernant la nanotechnologie, il est bon de savoir que l’Iran est classé à la 12e place au monde dans le domaine de la chimie. Comme le souligne Javed Bolah, des scientifiques iraniens du Centre des sciences et technologies médicales ont réussi à «produire en masse un microscope à balayage avancé, soit le microscope à effet tunnel. De plus, l’Iran est classé 4e au rang des nano-articles et a conçu et produit en masse plus de 35 types de dispositifs nanotechnologiques avancés. Il s’agit notamment d’équipements de laboratoire, de cordes antibactériennes, de filtres de centrales électriques et d’équipements et de matériaux de construction. L’Iran possède également des industries manufacturières de premier plan dans les domaines de la construction automobile, des transports, des matériaux de construction, des appareils électroménagers, des produits alimentaires et agricoles, et des produits pétrochimiques au Moyen-Orient. D’après les données de l’Organisation des nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, l’Iran figure parmi les cinq premiers producteurs mondiaux d’abricots, de cerises, de cerises acides, de concombres et de cornichons, de dattes, d’aubergines, de figues, de pistaches, de coings, de noix et de pastèques».

Pour Javed Bholah, il est clair qu’il y a un réel intérêt de la part de l’Iran de faire des affaires avec Maurice. Pour preuve, les discussions autour des accords commerciaux reçoivent une couverture médiatique beaucoup plus importante en Iran qu’à Maurice.

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