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Crise des semi-conducteurs : Vers une nouvelle flambée des prix des produits électroniques

Avec le risque d’un conflit armé entre la Chine et Taïwan, la pression est énorme sur le marché des semi-conducteurs. À Maurice, les prix des appareils électroniques pourraient prendre l’ascenseur.

La menace chinoise sur Taïwan fait trembler le monde. Les économies occidentales craignent qu’une éventuelle guerre, à l’image de ce qui se passe en ce moment en Ukraine, ne mette à genoux leurs outils de production, fortement dépendants en semi-conducteurs. Il faut savoir que Taïwan, par l’intermédiaire de l’entreprise TSMC, est le plus gros producteur de semi-conducteurs au monde. Et pour cause, 24 % des semi-conducteurs utilisés à travers le monde – destinés au secteur informatique, électroménager et automobile – sortent de ses usines. Et ce chiffre grimpe à 92 % dans les secteurs les plus pointus. Parmi les entreprises qui se fournissent dans ce pays, l’on retrouve Intel, Apple, Nvidia ou encore Qualcomm. Pour comprendre le rôle crucial joué par Taïwan sur ce marché ultra stratégique, il est essentiel de jeter un œil aux chiffres. En 1990, les États-Unis représentaient 44 % de la production mondiale et l’Europe 37 %. Ce chiffre est tombé à 12 % et 10 % respectivement aujourd’hui. Cette dépendance de Taïwan pourrait, en cas de conflit, causer de graves pénuries dans tous les secteurs. Avec une incidence sur les prix des produits électroniques et des automobiles qui pourraient flamber.

Pour ne rien arranger, la tension s’est encore accentuée ces derniers jours avec la tenue de manœuvres militaires visant à intimider le régime de Taipei. Elles font suite à la visite de la présidente américaine de la Chambre des représentants, Nancy Pelosi, sur l’île. Pékin y a vu une provocation et une «atteinte à la souveraineté et à la sécurité de la Chine». L’Empire du Milieu a toujours considéré Taïwan comme faisant partie de son territoire.

La mise en garde de TSMC Véritable mastodonte, TSMC est valorisée à 540 milliards de dollars et a généré 50 milliards de dollars en 2021. Une performance qui la place au-dessus du champion chinois Alibaba. Disposant d’infrastructures aux États-Unis, en Chine et à Singapour, l’entreprise conserve toutefois 90 % de sa production à Taïwan. Il n’est donc guère étonnant que l’ogre chinois, qui ne produit qu’un sixième de ses besoins en semi-conducteurs, souhaite mettre la main sur TSMC. Mais Mark Liu, patron du géant TSMC a lors d’une intervention sur la chaîne américaine CNN, mis en garde la Chine : «Personne ne peut contrôler TSMC par la force. En cas d’usage de la force militaire ou d’invasion, les installations de TSMC deviendront inopérantes». En clair, la Chine pourrait bien se tirer une balle dans le pied et se priver de ces semi-conducteurs tant convoités en envahissant l’archipel.

De l’avis de Kevin Canoo, Senior Manager de Linxia, la situation est problématique. La pression va s’accentuer sur les prix des produits technologiques, qui sont déjà soumis aux augmentations du fret et de l’appréciation du dollar américain. «Déjà, depuis la crise de la Covid-19, l’on a assisté à une augmentation de 30 % à 40 % d’appareils électroniques à Maurice. Si la situation ne se décante pas avec le conflit entre la Chine et Taïwan, l’on pourrait voir s’ajouter entre 20 % et 25 % des prix des produits électroniques nécessitant des semi-conducteurs», soutient-il. Et d’ajouter que Maurice est un marché infime en termes de consommation d’appareils électroniques. Ainsi, l’on pourrait possiblement s’attendre à du retard sur l’arrivage des nouveaux produits. «Notre nature de niche fait que bon nombre de multinationales privilégieront des pays plus aisés et donc les ventes peuvent s’écouler rapidement avec la densité de leur population. Toutefois, en tant qu’opérateur, l’on constate également un phénomène de surabondace de l’offre à Maurice. Je m’explique : grosso modo, le changement de comportement soudain des consommateurs après la hausse des produits de première nécessité fait que les Mauriciens sont plus économes. Les opérateurs peuvent faire face à des stocks d’articles qui ne se vendent pas. Au niveau de Linxia, nous avons par chance été à l’affût de l’actualité et avons pu maîtriser le phénomène par le biais de notre stratégie interne résiliente. Pour faire simple, nous avons diversifié notre portefeuille d’articles pour être moins exposés aux événements imprévisibles internationaux», souligne-t-il

Du côté des principaux concessionnaires automobiles, qui ont vu leurs délais de livraison étendus au sortir de la crise sanitaire pour cause de pénurie de semi-conducteurs, pour l’heure, on ne s’inquiète pas outre mesure de la situation. Selon Mrinal Teelock, secrétaire général de la Mauritius Vehicles Dealers Association, les concessionnaires n’ont aucune visibilité sur l’évolution de la situation. Tout dépendra d’où les sous-traitants des constructeurs automobiles achètent leurs semi-conducteurs. Et de rappeler que depuis la crise, de nombreux fabricants ont fait d’énormes stocks.

 

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