Forum-débat : Préparer la sortie de crise en utilisant le levier du Budget

Placé sous le signe de la relance, le budget 2021-2022 fera office de plan d’action pour accélérer la reprise. Le Ministre des Finances n’aura pas le droit à l’erreur ; il devra présenter une stratégie claire pour une sortie de crise. Un point sur lequel s’accordent Rama Sithanen, Jean-Michel Pitot et Afsar Ebrahim, qui participaient à un séminaire pré-budgétaire organisé par Andersen Mauritius.

Après une contraction de 14,9 % en 2020, l’économie mauricienne devrait connaître un léger rebond cette année avec une croissance de 4,8 % attendue cette année, selon les dernières estimations de MCB Focus. C’est dans ce contexte marqué par l’incertitude que le Budget 2021-2022 sera présenté le 11 juin prochain. Comment remettre l’économie sur les rails ? La question passionne les observateurs économiques. Le cabinet Andersen Mauritius a ainsi animé un webinaire mercredi dernier. Y ont participé Rama Sithanen, ancien ministre des Finances, Afsar Ebrahim, fondateur de Kick Advisory Services, et Jean-Michel Pitot, CEO d’Attitude Hospitality Management.

Selon Fazeel Soyfoo, associé d’Andersen Mauritius, qui a agi comme modérateur lors de ce séminaire pré-budgétaire, il est clair que c’est un exercice très difficile qui attend le ministre des Finances, Renganaden Padayachy.

«Le public, le monde des affaires et toutes les parties prenantes s’intéressent de très près à ce que le gouvernement va nous présenter cette année. Le défi est d’ailleurs encore plus grand que celui de l’année dernière, surtout après que nous avons connu une année de stagnation», soutient-il.

Étant donné la profondeur de cette crise sans précédent, il est essentiel de mettre en place un plan de relance et une stratégie de sortie. Pour Rama Sithanen, une telle stratégie dépendra du contexte et des circonstances. Il avance que l’agenda même de la réouverture des frontières a changé, car avec la résurgence des variants, beaucoup anticipent un nouveau confinement. Clairement, la reprise de l’économie reposera sur la réouverture des frontières. Mais il ne faut pas qu’on se dise que la vaccination est la solution qui permettra de tout résoudre, prévient Rama Sithanen. Il n’empêche qu’il faudra poursuivre la campagne de vaccination avec encore plus d’agressivité, tout comme il est primordial que tout un chacun respecte les gestes barrières. À son avis, ce sont les données qui doivent être le moteur de la stratégie de sortie plutôt qu’une date sur la réouverture des frontières.

Rama Sithanen suggère deux stratégies de sortie : un exit économique et un exit sanitaire. «Il faut d’abord décider comment on va déverrouiller le pays, puis voir comment rouvrir les frontières pour permettre aux touristes et aux hommes d’affaires d’entrer, et sous quelles conditions. La troisième décision est de permettre aux Mauriciens de voyager, car ils ont, eux aussi, besoin de faire des affaires», recommande-t-il, avant de poursuivre qu’hormis une sortie sanitaire, le pays aura besoin d’une sortie économique. Il incombera au gouvernement de réfléchir sur les aspects suivants : combien de temps est-ce qu’il pourra maintenir le Financial support scheme, le Stimulus package et jusqu’à quand il pourra entretenir un déficit élevé.

SOUTIEN FINANCIER CONTINU

Pour sa part, Jean-Michel Pitot estime qu’il faudra élaborer un partenariat entre le gouvernement et les hôteliers. C’est là un point déterminant. Un soutien financier continu même après la réouverture aidera les hôteliers à garder la tête hors de l’eau. Dans le même temps, il s’agira pour le secteur touristique de se réinventer, tout en adoptant une stratégie plus agressive, en termes de marketing.

Abondant dans le même sens, Afsar Ebrahim précise que «tant que nous n’allons pas investir dans notre image et que nous n’aurons pas une stratégie claire et cohérente, ou que nous n’aurons pas un message clair tout simplement, nous n’allons pas attirer les affaires». Selon lui, il faudra qu’on se focalise sur le secteur d’exportation, la facilité de faire des affaires et le secteur touristique. Pour chacun de ces secteurs, il faudra définir clairement une stratégie s’inscrivant dans la durée.

Et Rama Sithanen de renchérir qu’il est primordial que le gouvernement soit clair dans son approche. Il est tout aussi important qu’on détermine à qui l’on accordera son soutien. Car on ne pourra pas sauver tout le monde. Là, il s’agira de faire attention à ne pas porter secours aux entreprises zombies.