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Les limites de l’approche keynésienne

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Le ministre des Finances semble privilégier une approche keynésienne qui veut que la demande crée l’offre. Mais, dans ce contexte de crise, cette approche keynésienne est-elle pertinente ?

Il faut savoir que la pensée économique a considérablement évolué au cours des quatre dernières décennies. La dualité des polarités keynésiennes, généralement de gauche, et monétaristes de Chicago, généralement de droite, est dépassée. L’Economist vient de publier un article intéressant sur la nécessité de passer des théories sur les modèles d’équilibre d’après-guerre à l’approche évolutionniste de la dynamique économique. Une théorie fondée sur des hypothèses irréalistes s’avère généralement moins éclairante que ne l’espèrent les économistes. Essayer d’appréhender les économies telles qu’elles sont permet certainement de mieux comprendre et de fournir un meilleur cadre analytique pour l’élaboration des politiques économiques. Plus important encore, le changement de paradigme provoqué par la pandémie, avec un accent nouveau sur une croissance inclusive, durable et résiliente, exige certes une nouvelle réflexion.

«L’approche keynésienne a ses limites, surtout dans le cas des petites économies ouvertes. Dans le cas des économies fortement dépendantes sur les importations, les bénéfices potentiels attendus sont encore moins réalisables. De telles politiques conduisent généralement à un déséquilibre plus important de la balance commerciale, comme en témoignent de nombreuses études et conclusions empiriques du FMI. Compte tenu de l’état actuel du secteur touristique à Maurice, cela conduira inévitablement à un déficit accru du compte courant. Cela implique soit une pression accrue sur le niveau des réserves de change, soit une augmentation de l’endettement», explique Jaya Patten.

Il ajoute que finalement, on risque une nouvelle dégradation de la note de crédit du pays, ce qui entraînerait d’autres problèmes sur le compte de capital. «Je pense qu’étant donné la situation précaire de la balance des paiements et la perspective d’une dégradation de la notation, une telle approche est risquée. Elle pousse l’économie davantage dans le bourbier des déficits chroniques insoutenables. C’est une piste malheureusement souvent fréquentée par les marchés émergents, en particulier d’Amérique latine ; mais certainement pas un exemple à suivre», précise Jaya Patten.

Le message keynésien est clair : si on veut enclencher la pédale économique à fond, il faut sortir et consommer. Cependant, il faut être prudent avec l’effet keynésien lorsque la politique de promiscuité des banques centrales provoque une expansion excessive du crédit. Cela ne peut que créer un sentiment artificiel et temporaire de prospérité accrue qui finit par prendre fin soit par une vague d’inflation, soit par une expansion excessive qui conduit à un effondrement de la rentabilité.

Une croissance inflationniste en perspective

Il se dégage le sentiment que le gouvernement base ses projections fiscales sur l’hypothèse que l’inflation va grimper et que les prix des produits de consommation courante vont augmenter, ce qui aura un effet indirect sur la taxe à la valeur ajoutée (TVA). Le taux d’inflation prévu est de 3,2 % en 2021 contre 0,5 % en 2019 tandis qu’une augmentation de 40 % de la TVA est attendue à Rs 39,5 milliards. Cela donne déjà l’indication d’une forte hausse des prix expliquant l’augmentation de la TVA. Nous voyons déjà une augmentation générale du coût de la vie avec l’augmentation du coût des importations ainsi que l’inflation importée. Le Dr Bhavish Jugurnath pense que cela augmentera encore jusqu’à ce que l’effet de la pandémie sur l’économie mondiale se stabilise.

L’inflation est définitivement en hausse dans le monde à la suite de la pandémie. Une combinaison de contraintes liées aux chaînes d’approvisionnement, à la hausse des prix des matières premières et aux politiques monétaires extrêmement accommodantes attisent la flambée des prix à la consommation. Dans le cas de Maurice, la dépréciation de la monnaie aggrave cet effet. Des témoignages de consommateurs locaux suggèrent une augmentation du prix de leur panier de consommation comprise entre 20 et 30 %. Aujourd’hui, le prix d’un paquet de biscuits coûte près de cinq fois plus cher que le prix de détail au Royaume-Uni.

«L’impact sur les recettes publiques de la fiscalité indirecte dépendra de l’élasticité de la demande. L’impact positif de l’effet prix sur les recettes fiscales sera partiellement compensé par l’impact négatif de l’effet volume. Des augmentations de prix de cette ampleur éroderont certainement le pouvoir d’achat des consommateurs au bas de l’échelle des revenus. La demande sera étouffée. Les prévisions de recettes publiques provenant de la fiscalité indirecte, augmentant en ligne avec l’inflation, sont à mon avis déraisonnablement optimistes. C’est un artifice d’habillage de bilan courant pour aider à équilibrer les budgets, surtout lorsque la situation financière est tendue. Cependant, les marchés financiers peuvent voir à travers ces jeux de miroirs ; ils ne sont pas dupes et ajustent leurs anticipations en conséquence», fait remarquer Jaya Patten.

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