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Secteur bancaire : L’épargne devient plus attrayante, mais l’inflation impacte la capacité d’économiser

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Les taux à l’épargne sont plus attrayants depuis le relèvement du taux directeur. De plus, avec l’introduction du nouveau cadre de politique monétaire, les banques devraient être en mesure de pratiquer une meilleure rémunération sur l’épargne. Mais, fortement touchés par l’inflation, les mauriciens auront moins d’argent à épargner.

AYANT la ferme volonté de casser l’inflation, les banques centrales, à commencer par la Réserve fédérale, ont rehaussé significativement leurs taux d’intérêt depuis l’année dernière. Face à une inflation à deux chiffres qui provoque l’appauvrissement de la population, la Banque de Maurice n’a eu d’autre choix que de suivre la tendance des autres banques centrales en accélérant le processus de resserrement monétaire. Ainsi, en l’espace de 12 mois, la Banque de Maurice a revu le taux repo de 1,85 % à 4,50 %.

La hausse du taux de refinancement implique une meilleure rémunération sur l’épargne bancaire. Autour de 0,25 %, celle-ci est actuellement autour de 2,75 %. Ce qui devrait inciter les gens à épargner davantage. Avec moins d’argent en circulation, l’inflation devrait techniquement baisser. Comme l’explique l’économiste et conseillère en investissements Manisha Dookhony, «un taux d’intérêt élevé rend l’épargne plus attractive et réduit ainsi la circulation monétaire. Quand les taux d’épargne augmentent, c’est en théorie une bonne chose pour ceux qui mettent de l’argent de côté. Leur épargne rapportera plus d’intérêts chaque année».

Elle est rejointe par le Dr Takesh Luckho, économiste. Mais, il insiste que la réalité est tout autre. «Compte tenu des difficultés auxquelles font face les ménages qui se trouvent au bas de l’échelle sociale et aussi de la classe moyenne à joindre les deux bouts avec l’érosion de son pouvoir d’achat, cela devient de plus en plus difficile pour les Mauriciens de trouver un surplus d’argent dans leur budget mensuel pour l’épargner. En d’autres mots, même si le taux d’épargne est de[1]venu plus attrayant, tant que le Mauricien lambda ne retrouve pas un pouvoir d’achat décent, il ne va pas épargner plus», fait ressortir le Dr Takesh Luckho.

Si le taux d’épargne grimpe, en revanche, l’augmentation du taux d’emprunt entrave davantage la capacité à pouvoir économiser. Car les coûts de remboursement sont également en hausse. «L’autre élément est que les épargnants peuvent perdre de la valeur en termes réels sur les liquidités qu’ils ont en banque en raison de l’écart entre les taux d’intérêt et l’inflation», précise-t-elle.

NOUVEAU CADRE DE POLITIQUE MONÉTAIRE

Avec le nouveau cadre de politique et la meilleure rémunération des banques sur les 7-Day Bank of Mauritius Bills, la Banque de Maurice s’attend à ce que les banques soient en mesure de rehausser leurs taux d’épargne. En faisant une analyse rétrospective de l’année 2022, il est clair que la politique monétaire de la Banque de Maurice a eu comme thème majeur la gestion de l’inflation dans les court et moyen termes ainsi que la recherche d’un équilibre dans la valorisation de la roupie mauricienne sur le marché des changes.

De l’avis de Pritee Ombika-Aukhojee, le nouveau cadre de politique monétaire a définitivement un réel impact sur le taux d’épargne pratiqué par les banques commerciales, avec comme point de départ une moyenne de 0,30 % au début de l’année dernière pour finir l’année aux alentours de 2,8 %. «Il est certain que les banques suivront de près la politique monétaire de la Banque de Maurice et ajusteront leur taux d’épargne en conséquence, mais également ceux relatifs aux prêts. Un nouveau cadre de politique monétaire et une meilleure rémunération des banques à travers les 7-Day Bank of Mauritius Bills sera certainement bénéfique aux parties prenantes», soutient-elle.

Sur la question du nouveau cadre de politique monétaire, Manisha Dookhony fait ressortir que les banques ont désormais plus de flexibilité. Mais, il est nécessaire que les banques jouent le jeu car, précise-t-elle, «les banques traînent généralement un peu les pieds, car l’augmentation du taux d’épargne diminue le bénéfice».

Pour le Dr Takesh Luckhoo, même si l’utilisation des bons du Trésor n’est pas un mécanisme nouveau qu’utilisent les banques centrales dans leur combat contre l’inflation, il explique que l’idée est d’émettre des bons à court terme pour éponger l’excédent de liquidité dans le pays en encourageant les banques commerciales à acheter ces bons au lieu de créer du crédit sur le marché spécialement en cette période d’après-fêtes où la masse monétaire a connu une augmentation en raison du paiement des salaires, des bonus et des primes de performance.

«Avec l’ancien cadre, les taux d’épargne étaient seulement affectés par les changements du taux directeur après la réunion du Monetary Policy Committee. Mais, avec ce nouveau cadre politique où les banques commerciales bénéficient de plus de rémunérations avec les 7-Day Bank of Mauritius Bills, la Banque de Maurice espère ainsi un effet en cascade sur les clients avec des taux d’épargne plus attrayants», fait ressortir le Dr Takesh Luckhoo.

L’objectif de ce nouveau cadre de politique monétaire est donc de ramener l’inflation entre 2 % et 5 % à moyen terme. La Banque de Maurice prévoit que l’inflation se situera entre 5 % et 6 % cette année. La question est de savoir, dans quelle mesure Maurice pourra s’attendre à un repli de l’inflation ? Manisha Dookhony n’est pas très optimiste sur la question estimant qu’à Maurice «l’inflation est causée principalement par l’augmentation des coûts des produits à l’importation. Et le taux d’intérêt affecte beaucoup plus le local. Ainsi, il est plus probable qu’une diminution du prix de l’essence aura un effet plus probable sur un repli de l’inflation», dit-elle.

Le Dr Takesh Luckho abonde dans le même sens. Il affirme que la cause de l’inflation à Maurice n’est pas que le fruit d’un excédent de la masse monétaire et qu’il y a d’autres facteurs macroéconomiques tels que la dépréciation de la roupie. Il est d’avis que l’augmentation du taux directeur aidera certes à stabiliser la valeur de la roupie vis-à-vis du dollar et du même coup cela aidera à gommer l’excédent dans la masse monétaire du pays tout en réduisant la pression de l’inflation sur l’économie mauricienne. Mais, si on ne fait rien pour améliorer la situation des autres variables macroéconomiques, il pense que la population ne verra pas une amélioration de son pouvoir d’achat.

Si les taux d’épargne sont en hausse, en revanche, l’érosion du pouvoir d’achat est une problématique majeure. Donc, une meilleure rémunération sur l’épargne ne sera pas forcément synonyme d’une progression du taux d’épargne nationale brute.

LA DÉGRINGOLADE DE L’ÉPARGNE NATIONALE DEPUIS 2008

Dans le sillage de la crise économique de 2008, le taux d’épargne des ménages américains avait atteint un niveau historiquement bas, les ménages épargnant à peine 1 % à 2 % de leur revenu disponible. Au fur et à mesure de la crise, les ménages ont réduit leurs dépenses et le taux d’épargne est remonté à près de 6 % en l’espace d’un an, ce qui a propulsé l’économie américaine.

À Maurice, l’on a assisté au même scénario. Avec l’abaissement du taux repo qui, à un moment, se situait autour de 9,25 %, le taux d’épargne nationale, qui oscillait autour de 20 % avant la crise de 2008, devait lourdement jusqu’à 10,5 % en 2021 avant de grimper à 14,3 % en 2022.

L’IMPACT DE LA PANDÉMIE SUR LE POUVOIR D’ACHAT

Le niveau de l’épargne nationale est directement lié à la moyenne des salariés payés à Maurice durant l’année écoulée ainsi que la propension à consommer. Avec la pandémie de Covid-19 en 2020 et les deux confinements qui ont suivi, le pays a vu une baisse dans la moyenne des salariés durant l’année 2020-2021, précise le Dr Takesh Luckho.

«L’incertitude économique et sociale durant cette période ainsi que des pénuries sur les marchés ont fait que les consommateurs ont préféré réduire le pourcentage de leurs salariés dédiés à l’épargne pour acheter des produits en réserve. Pareillement, ils ont préféré accumuler des liquidités à des fins de précaution pour parer aux éventualités médicales causées par la pandémie. Avec l’ouverture des frontières fin 2021 et l’optimisme d’une reprise économique en 2022, le comportement des consommateurs a repris ses préférences habituelles ; une partie de l’argent qui été réservée à des fins de précaution a été redirigée sur l’épargne», observe le Dr Takesh Luckhoo.

UNE COURBE DESCENDANTE DE L’INFLATION, MAIS…

Le mécanisme de calcul de l’inflation à Maurice fait qu’on va avoir une courbe descendante de l’inflation après le premier trimestre de 2023. Mais, cela ne signifie pas que les prix dans le pays ont baissé et que les consommateurs auront plus de pouvoir d’achat. La courbe descendante sera plutôt du fait que les points de base de 2022 pour le calcul de l’inflation sont déjà élevés et que l’écart des prix de 2023 ne sera pas aussi conséquent que l’année dernière, explique le Dr Takesh Luckhoo.

BANK ONE : DES TAUX D’ÉPARGNE DE 2,75 % À 2,8 %

CHEZ Bank One, les taux d’épargne se situent autour de 2,75 % à 2,80 % par an avec les intérêts payables trimestriellement. Avec la hausse du taux directeur de 1,85 % à 4,5 %, Bank One a revu son taux d’épargne. «Dans le but de proposer une option épargne encore plus attrayante à nos clients, la banque a également lancé une offre exceptionnelle sur les dépôts fixes, plus précisément, à 4 % sur un an ou 4,5 % sur deux ans, avec les intérêts payables men[1]suellement», précise Pritee Ombika-Aukhojee, la Head of Digital & Products de Bank One. Et de faire ressortir qu’il y a une réelle demande pour ce type de produits

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