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Secteur manufacturier – Le repli protectionniste

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Secteur manufacturier


Le Budget 2017-2018 avait laissé espérer une reprise de l’exportation, notamment avec l’incitation accordée aux exportateurs à travers une taxe sur les profits ramenée à 3 %. Or, les chiffres du premier trimestre 2018 affichent déjà une baisse de 10,8 % par rapport à l’année précédente. Les mesures budgétaires 2018-2019 restent édulcorées, misant sur des facteurs à long terme pour que la barre se redresse.

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«C’est un Budget qui s’inscrit dans la continuité des deux précédents», note Beas Cheekhooree, président de la Mauritius Export Association. Le ton se veut rassurant, mais laisse transparaître l’appréhension d’un secteur en crise à la recherche de mesures pratiques pour ancrer une relance durable. En 2017, le déficit de la balance commerciale représentait 21,6 % du Pib, les importations ayant continué de croître. Les revenus d’exportation ont chuté jusqu’à Rs 17,7 milliards alors qu’ils atteignaient Rs 22,8 milliards en 2015. Or, les mesures budgétaires soutenues et proposées par la MEXA n’ont été que partiellement prises en considération, ce qui ne laisse augurer aucun redressement rapide de la situation.

Même son de cloche de la part de Bruno Dubarry de l’Association of Mauritian Manufacturers. Les propositions budgétaires phares de l’association n’ont pu se frayer un chemin à travers l’avalanche de mesures sociales accordées par le Budget 2018-2019. Or, au premier trimestre, comparé à la même période l’année précédente, l’exportation d’articles manufacturés classés par matière a chuté de 22,5 % et celle d’articles manufacturés divers de 12,5 %. Le textile et les éléments vestimentaires ont accusé une baisse. «Il y a des mesures qui sont encourageantes, mais il reste encore beaucoup de travail à faire pour développer l’exportation. Nous en sommes conscients et nous continuons à œuvrer en ce sens sans relâche», confie Bruno Dubarry. Il reste néanmoins confiant que des mesures encourageantes pour le secteur seront adoptées ultérieurement.

Dans un contexte pourtant marqué par l’excès de liquidité et la hausse de l’inflation, lors de sa dernière réunion, le 30 mai, le Monetary Policy Committee (MPC) de la Banque de Maurice a maintenu le taux directeur à 3,5 %. Sans forcément résoudre les problèmes de fond, la baisse du Repo Rate de 4 % à 3,5 % en septembre 2017 avait laissé les opérateurs du secteur de l’exportation espérer une période de plus importante dévaluation de la monnaie mauricienne afin de rendre l’exportation mauricienne plus attractive. Le MERI (Mauritius Rate Exchange Index) indique plutôt une dépréciation saisonnière de la roupie après la période estivale 2017-2018, mais sans effet notable qui pourrait booster l’exportation. Cela, car le pays reste soumis à une très rude concurrence, notamment de Madagascar, où le coût de la main-d’œuvre est très bas.


Une liste de produits seront interdits à l’importation

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Dans un contexte mondial marqué par la hausse de l’inflation, notamment due aux produits pétroliers, l’application d’une politique monétaire restrictive du MPC paraît fortement prévisible, d’autant plus que la BoM poursuit ses efforts diversifiés pour influer sur l’excès de liquidité. Au 15 juin 2018, les réserves bancaires avoisinaient toujours 14 % en moyenne, alors que le pourcentage imposé par la banque centrale est de £9 %. Cependant, le yield BoM/Government of Mauritius Treasury Bills atteint actuellement 3,63 %. Et la consultation du PLIBOR (PortLouis Interbank Offered Rate) indique que le taux de prêt interbancaire se rapproche désormais du KRR, ce qui n’avait pas été le cas depuis juillet 2016. Ainsi, avec la nécessité de contrôler l’inflation et de neutraliser l’excès de liquidité, la politique monétaire ne paraît qu’avoir un impact moindre sur le secteur de l’exportation pour l’heure. Ce qui ne devrait pas permettre de rééquilibrer le déficit de la balance commerciale du pays. D’autant plus que l’importation devrait continuer à augmenter avec les projets d’infrastructures colossaux comme le Metro Express, Côte d’Or et les Smart cities.


Barrières non tarifaires

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Dans ce contexte extrêmement tendu, les mesures clés annoncées trouvent cependant un écho favorable auprès des opérateurs. En premier lieu, la facilitation de l’embauche de travailleurs étrangers est accueillie comme un levier de développement crucial. En 2017, il y avait quelque 28 400 travailleurs étrangers à Maurice. Ce chiffre est appelé à croître sensiblement. «Auparavant, il y avait un ratio imposé en termes de nombre de travailleurs. Pour un employé étranger embauché, l’entreprise devait recruter un employé mauricien. La nouvelle mesure enlève cette restriction, permettant à certaines industries de mieux se développer», commente Beas Cheekhooree. Par ailleurs, l’Economic Development Board (EDB) va aussi opérer un Foreign Employment Scheme qui permettrait d’attirer des spécialistes et professionnels, ce qui pourrait aller dans le sens de l’innovation et de l’amélioration des processus de travail. Et Bruno Dubarry note que la politique d’aide à la formation ne peut qu’aider les entreprises à améliorer leur efficience et la qualité de leur production.

Par ailleurs, il salue l’instauration de barrières non tarifaires. Le Budget 2018-2019 a notamment mis l’accent sur l’interdiction d’une liste de produits et de l’importation de produits avec une date d’expiration de moins de 50%. Le Mauritius Standards Bureau sera notamment mis à contribution pour établir les standards et participer au contrôle qualité des produits.

«La production locale sera enfin protégée et n’aura pas à faire face à la concurrence des produits importés», soutient-il.

Par contre, il regrette que les industriels mauriciens ayant placé haut la barre et qui consacrent un budget conséquent au respect des normes n’aient pas bénéficié de mesures incitatives. Le poids économique des tests en laboratoire et du respect d’un standard élevé du processus de production est non négligeable. «Certaines de nos entreprises vont au-delà des critères requis par le MSB et sont attachés à fournir un produit de qualité», explique-t-il. Ces dernières mériteraient, selon lui ,de bénéficier de mesures fiscales pour les encourager et les soutenir.

Une vaste campagne de promotion de la production agricole est sous-tendue par l’objectif de production suffisante pour les besoins de la population, la réduction de l’importation à travers des produits de substitution, mais aussi l’exportation du surplus vers des marchés niches. De cette façon, le gouvernement vise l’atteinte d’objectifs de développement durable tout en misant sur l’essor de l’agriculture afin de desservir les pays avoisinants ou produire sur l’échelle mondiale. De même, les espoirs se focalisent sur l’industrie océanique en vue de proposer des produits de la mer exportables.

Le Budget 2018-2019 rappelle aussi la diversification régionale des accords et signatures de traités. La signature des Memoranda of Understanding (MoU) et d’accords tarifaires reste cruciale à l’élaboration d’une architecture tarifaire, réglementaire et législative pour encadrer le commerce. Ainsi, Maurice se protège des effets néfastes du Brexit en ayant négocié le rallongement des accords préférentiels jusqu’en 2020. Pour les autres régions, y compris l’Afrique, l’Arabie saoudite, le Moyen-Orient et l’Asie, les fruits de ce travail d’accords diplomatiques et commerciaux seront visibles sur le moyen - long terme. 

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