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Tourisme : Les opérateurs confiants en l’avenir malgré le contexte sanitaire

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Si le secteur du tourisme s’attendait à bondir après sa léthargie, la réalité a rapidement pris le contre-pied de ce qui aurait pu être une renaissance économique du secteur. Mais c’est loin de décourager les opérateurs pour qui l’innovation reste au cœur des activités. D’abord pour s’adapter à la nouvelle normalité, puis aux besoins des prestataires et des voyageurs.

«OMICRON est certes venu bouleverser nos prévisions, mais il faut d’abord reconnaître la réussite qu’a été la réouverture de nos frontières», lâche d’emblée Désiré Elliah, le nouveau président de l’Association des hôteliers et restaurateurs de l’île Maurice (AHRIM). En deux mois, octobre et novembre, la destination Maurice a réussi une très belle performance en cette année 2021. Au niveau des hôtels, le taux d’occupation moyen a été très encourageant, affichant 43 % en octobre (contre 75 % en 2019) et 66 % en novembre (contre 84 % en 2019). «Nous retenons deux éléments forts de ce redémarrage : d’une part, la forte capacité de mobilisation de tous les acteurs du tourisme, public et privé, qui ont travaillé de concert pour mettre en œuvre cette relance et, d’autre part, la popularité de notre destination, très forte malgré les restrictions de voyage», ajoute-t-il.

Le président de l’AHRIM note que le touriste veut revenir. De plus, il désire aujourd’hui dépenser plus, constatant que le revenu par voyageur a augmenté de 23 % par rapport à ce qu’il était il y a deux ans, «ce qui nous inspire une grande confiance en l’avenir». À juste titre, poursuit-il, au début de décembre, nous espérions pouvoir comptabiliser en moyenne un taux d’occupation de 65 %, mais ce ne sera définitivement pas le cas, surtout avec les récents développements sur le plan sanitaire.

Si certains hôteliers ayant vu leurs réservations chuter de 50 % nous ont confirmé cette crainte, Désiré Elliah, quant à lui, indique que «l’Europe, notre marché source, parle de sixième vague ; les marchés de La Réunion et de l’Afrique du Sud, qui sont des segments dominants de décembre, restent fermés ; et les comptes rendus sur la situation sanitaire et la capacité hospitalière locales ne sont pas interprétés de la même manière partout. Il est donc peu probable que nous dépassions la barre des 200 000 touristes pour l’année 2021, comme nous le prévoyions il y a encore quelques semaines».

PRÉVISIONS ET STRATÉGIES

Sen Ramsamy, le Managing Director de Tourism Business Intelligence, soutient, pour sa part, que dans les conditions actuelles, il est très difficile d’anticiper l’avenir du tourisme et le comportement des voyageurs, surtout avec les différents variants qui circulent, et la situation en Europe qui préoccupe davantage les experts de la santé. Cependant, dit-il, le gouvernement mauricien s’est fixé un objectif de 600 000 visiteurs au 30 juin 2022, un objectif tout à fait réalisable et qui pourra même être dépassé si nous déployons les bonnes stratégies de marketing, et si notre offre touristique devient plus attrayante. «Si mes prévisions se concrétisent, nous pourrons récolter entre Rs 12 milliards et Rs 15 milliards en devises étrangères en 2021 du secteur du tourisme, même si c’est très loin des Rs 64 milliards de 2019. Et avec un objectif de 600 000 visiteurs à fin juin 2022, il serait également possible de terminer l’année financière avec au moins Rs 30 milliards en recettes touristiques à condition que la situation ne se dégrade pas en 2022 et que les conditions sanitaires locales s’améliorent sensiblement. Si la population locale est en bonne santé, les touristes viendront»

De son côté, Kevin Teeroovengadum, consultant financier en Afrique et économiste, recense que si l’on prend les années 2018 et 2019, Maurice a reçu environ 650 000 touristes pour les mois de janvier à juin. Pour lui, si Maurice accueille 500 000 touristes, ce serait déjà un exploit pour le premier semestre de 2022. «Si je prends les Maldives, qui sont ouvertes depuis juillet 2020, on peut voir qu’en 2021, elles finiront à 1,3 million contre 1,7 million en 2019, ce qui signifie environ 75 % de 2019. Si nous pouvons atteindre entre 75 % et 80 % de 2019, ce sera un bon redémarrage du secteur du tourisme. Mais je préférerais de loin que nous ayons des touristes qui peuvent dépenser plus qu’en 2019 et aussi qui prolongent leur séjour au-delà des 9 – 10 jours que nous avions enregistré par le passé. Nos touristes dépensent en moyenne environ 1 100 euros par séjour. Nous devons concentrer nos efforts pour attirer des touristes qui peuvent dépenser entre 1 500 et 2 000 euros par séjour. Pour l’instant, je ne vois aucune stratégie à cet égard pour attirer des touristes plus dépensiers. Nos amis seychellois sont en train de focaliser leurs stratégies sur les ‘high spending tourists’, en d’autres mots se focaliser sur la qualité plutôt que la quantité

La popularité de notre destination est très forte malgré les restrictions de voyage

Sen Ramsamy enchaîne que la situation sanitaire a déjà de très lourdes conséquences sur notre économie. Il serait alors primordial que les opérateurs touristiques et le gouvernement revoient leurs offres par rapport aux nouvelles tendances dans le secteur et redéfinissent leur plan marketing et branding pour la destination. «Il y a urgence. La concurrence a pris plusieurs longueurs d’avance sur Maurice et la réussite ne serait possible que s’il y a de l’imagination et de l’innovation au niveau de la politique de développement, et des stratégies marketing et opérationnelles. Si nous continuons à faire du pareil au même, comme les indications le montrent, le tourisme mauricien prendra encore plus de temps à se relever. Le tourisme mauricien a besoin d’un sursaut pour se défaire des pratiques archaïques et révolues. En ces temps difficiles, le tourisme mauricien a besoin d’un leadership fort et visionnaire», insiste-t-il.

Abondant dans le même sens, Kevin Teeroovengadum étaye que si nous pensons que 2022 pourrait être la fin de la pandémie qui peut conduire à une situation endémique, nous devons en tirer les leçons de ce qui s’est passé ces deux dernières années. «Nous savons que nous pourrions avoir à faire face à d’autres pandémies à l’avenir. C’est pourquoi nous devons aujourd’hui avoir un plan de préparation bien structuré pour pouvoir garder nos frontières ouvertes pendant les pandémies. Les Maldives et Dubaï ont réussi à s’ouvrir depuis juillet 2020 malgré les différentes vagues de Covid dans de nombreux pays. Nous devons investir dans notre système de santé et notre population doit être éduquée pour vivre avec la Covid mais aussi avec d’autres pandémies à l’avenir. De la même manière, nous avons appris à vivre avec les cyclones. Mais pour vivre avec, il faut qu’on change nos habitudes d’hier et se préparer pour le futur».

DESIRE ELLIAH
(PRÉSIDENT DE L’AHRIM)

SEN RAMSAMY
(MANAGING DIRECTOR
DE TOURISM BUSINESS
INTELLIGENCE)

KEVIN TEEROOVENGADUM
(ÉCONOMISTE)

VIVRE AVEC LE VIRUS

Pour Désiré Elliah, le seul challenge est actuellement de trouver comment vivre avec le virus en donnant priorité à la santé publique tout en maintenant l’élan de la reprise. Le plan d’action qui répondra à cet enjeu, préconise-t-il, doit être commun et continu, discuté et mis en place avec les décideurs. Et d’ajouter que l’une des réponses serait la diversification dynamique de nos marchés, que nous devons impérativement accélérer avec le climat d’incertitude dans nos marchés sources. «Partout, l’engouement pour le voyage est fort ; il nous faut rechercher les opportunités nouvelles et créer les conditions, notamment sur le plan de l’aérien, pour être à même de les saisir. Le ‘rebranding’ de la destination, une promesse forte, sera fondamental pour être visible dans ce contexte où toutes les destinations concurrentes vont se battre pour attirer le voyageur. Nous allons également travailler à renforcer notre offre, en soignant notamment la qualité du service par la formation et en poursuivant la bataille pour un environnement plus sain et un tourisme plus durable et inclusif». Avec le contexte d’incertitude permanente que crée la pandémie, il concède qu’il est extrêmement difficile d’établir des prévisions pour 2022. «La haute saison n’est pas finie. Nous gardons espoir que la situation évoluera en janvier. Atteindre 650 000 touristes au 30 juin 2022 reste notre objectif national et il n’est pas remis en question pour l’instant».

 

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