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2022- 2023 Actualités Budget

Contrer les effets délétères de l’inflation

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pouvoir d'achat

Améliorer le niveau de vie des mauriciens à revenus faible et moyen. C’est la promesse faite par le gouvernement lors de l’exercice budgétaire 2022-2023. Plusieurs mesures ont ainsi été mises en place dans le but d’alléger la pression sur le pouvoir d’achat.

Une partie importante du Budget 2022-2023 est consacrée au renforcement du pouvoir d’achat du Mauricien. Celui-ci s’est considérablement effrité, notamment dans le sillage de la guerre en Ukraine avec un taux d’inflation calculé à 8,6 % en 2022, selon la Banque de Maurice. Cela, après que le ministre des Finances avait annoncé, lors de la présentation du Budget 2021-2022 que la priorité du gouvernement était de protéger les vies et les moyens de subsistance, de maintenir la capacité de production et de préserver la stabilité de notre économie. Or, la question du pouvoir d’achat des ménages et de la consommation reste au cœur des préoccupations est plus que jamais d’actualité. Du reste, les associations des consommateurs n’en finissent pas de dénoncer la cherté de la vie. Une situation exacerbée par les pertes d’emploi, des revenus en moins, l’augmentation du prix du gaz (Rs 240), de l’essence (Rs 74,10 contre Rs 67,40), du diesel (Rs 54,55 contre Rs 49,60), des denrées alimentaires et de la dépréciation passée de la roupie. Résultat : la classe moyenne s’appauvrit et ceux au bas de l’échelle deviennent, eux, plus pauvres.

Mosadeq Sahedin, président de la Consumer Advocacy Platform (CAP), estime que les mesures budgétaires annoncées contribueront à améliorer le pouvoir d’achat des consommateurs. «Nous accueillons favorablement le maintien du prix du pain maison ainsi que du gaz ménager. Mais la mesure qui soulagera grandement les Mauriciens est définitivement l’adoption du regressive mark-up sur les médicaments.» Il fait ressortir que la CAP a d’ailleurs milité en faveur du regressive mark-up. Par contre, Mosadeq Sahedin déplore «le maintien des diverses charges et autres taxes, qui contribuent à gonfler artificiellement le prix de l’essence et du diesel». Car précise-t-il, «le prix fort des carburants a un impact direct sur le prix de nombreux produits de base.»

 

 

AVINAASH MUNOHUR (POLITOLOGUE)

AVINAASH MUNOHUR (POLITOLOGUE)

ALEXANDRE LARIDON (OBSERVATEUR POLITIQUE)

ALEXANDRE LARIDON (OBSERVATEUR POLITIQUE)

Mosadeq Sahebdin (Politologue)

Mosadeq Sahebdin (Politologue)

«Nous assistons à la mort des politiques promues par Rama Sithanen et le basculement dans un autre modèle de développement. Nous sommes clairement en face d’une ambition renouvelée pour notre économie et notre pays»

AUGMENTATION RAPIDE

Pour le politologue Avinaash Munohur, la population s’attendait à des mesures qui lui permettraient de souffler un peu. «Nous avons connu ces derniers mois une augmentation rapide des prix, qui a produit une érosion brutale du pouvoir d’achat. Nous pouvions nous attendre à une augmentation des subsides sur les produits de base comme la farine et les énergies comme le gaz, mais le maintien des prix constitue une mesure positive si l’on considère la conjoncture globale. Cela dit, le maintien des prix ne garantit en rien le maintien du pouvoir d’achat.» Il explique que le problème est dans la stabilisation de la roupie et du stock des réserves en Forex permettant à la Banque centrale d’effectuer des opérations comme elle a pu le faire il y a quelques semaines pour faire remonter la roupie.

Pour Alexandre Laridon, juriste et observateur politique, l’annonce d’une hausse de la pension était prévisible. De même, le maintien du prix du pain maison et du gaz en bouteille n’est pas surprenant, surtout après la colère exprimée dans les rues par une population qui n’en peut plus avec la cherté de la vie. «Le ministre des Finances aurait faire preuve d’une incroyable myopie s’il avait refusé de considérer cette réalité sociale et économique des ménages vivant dans la précarité. Mais ce n’est pas suffisant !» Parmi les autres mesures phares de ce présent budget, l’on retient l’abaissement de l’impôt sur le revenu, qui passe de 15 % à 12,5 % pour les salariés touchant entre Rs 53 000 et Rs 75 000, mesure qui touche principalement la classe moyenne. Il faut également compter avec les 18 000 ménages qui bénéficieront d’un soutien accru dans le cadre des aides sociales et les personnes âgées qui toucheront Rs 1 000 de plus.

Mosadeq Sahedin souligne que la révision des barèmes de taxation faisait partie des demandes de la CAP lors des consultations pré-budgetaires. «Elle contribuera certainement à soulager le fardeau de la classe moyenne… Toutefois, bien qu’elle n’ait pas été mentionnée spécifiquement, l’allocation de Rs 1 000 est une façon d’augmenter le salaire minimum sans qu’il ne soit un fardeau pour les employeurs.»

NUMÉRO DE FUNAMBULE

Pour Avinaash Munohur, le ministre des Finances s’est livré à un véritable numéro de funambule en jonglant entre les impératifs sociaux et la conjoncture économique actuelle. «Il est clair que ces mesures trouveront l’approbation des ménages de la classe moyenne et des pensionnaires, qui sont les premières victimes de l’inflation et de la crise économique. C’est un très bon coup politique, mais la question du financement de ces mesures reste posée.»

Quid des décisions prises pour le bien commun dans cet exercice budgétaire ? Le président de la CAP est d’avis que les mesures prises sont audacieuses dans une période de crise économique faite pour durer. Selon lui, «celles-ci pourront ralentir l’appauvrissement de la population.» A contrario, Alexandre Laridon estime que ce budget n’apporte rien de nouveau. «Favoriser la production locale et réduire notre dépendance à l’importation des produits de base et alimentaires n’a rien d’audacieux», dit-il. Avant d’ajouter qu’un budget est loin d’être un simple exercice comptable. «Son objectif ultime est de définir une vision à long terme, une ambition pour le pays en dépit des incertitudes économiques et des risques géopolitiques dont nous pouvons témoigner aujourd’hui à l’échelle planétaire.»

Pour sa part, Avinaash Munohur constate un shift intéressant, qui est la volonté du gouvernement d’étendre la stratégie économique nationale d’un modèle purement consumériste vers un modèle qui alliera le consumérisme à la production locale. «Nous assistons à la mort des politiques promues par Rama Sithanen et le basculement dans un autre modèle de développement. Nous sommes clairement en face d’une ambition renouvelée pour notre économie et notre pays.»

Le politologue admet que par-delà les ambitions posées par ce budget, il y a tout un ensemble de problèmes liés à la relance de la production et de la productivité à Maurice. Il cite notamment le vieillissement de la population, les problèmes de main-d’œuvre, de formation, de mismatch entre les demandes du marché de l’emploi et les formations offertes à Maurice, mais aussi d’accumulation technologiques et techniques, entre autres.

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