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Brexit – Développer l’axe commercial Royaume-Uni/ Maurice/Afrique

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Brexit - Développer l’axe commercial Royaume-Uni/ Maurice/Afrique | business-magazine.mu

C’est pratiquement fait : dès le 31 janvier, le RoyaumeUni quittera l’Union européenne. Depuis le référendum du 23 juin 2016, la perspective du Brexit a créé une réelle panique dans la zone Euro. Les marchés s’étaient affolés et la livre sterling avait chuté lourdement d’environ 14 %. La perspective d’un «hard Brexit» voulu par l’administration Johnson a, pendant un temps, laissé entrevoir l’imminence d’une nouvelle crise économique. Mais depuis, le Premier ministre britannique est revenu à de meilleurs sentiments, notamment sur la question de libre circulation des personnes. Ainsi, c’est avec sérénité que le Royaume-Uni aborde cette importante transition. Et pour se donner les meilleures chances de succès dans la nouvelle configuration commerciale qui se dessine, les Britanniques se tournent vers l’Afrique, qui est le prochain moteur de croissance de l’économie mondiale. Ancienne colonie britannique et centre financier régional en devenir, Maurice a tout à gagner en se positionnant comme une plateforme pour structurer les investissements du Royaume-Uni à destination de l’Afrique.

Après les propos durs échangés entre Port-Louis et Londres en raison du différend sur les Chagos – lequel n’est d’ailleurs pas encore résolu –, la rencontre entre le Premier ministre mauricien, Pravind Jugnauth, et son homologue britannique, Boris Johnson, lors du Sommet Royaume-Uni/Afrique a apaisé les tensions. Et les deux pays sont prêts à inaugurer une nouvelle ère de coopération économique et commerciale. Le consultant international Kevin Teeroovengadum préconise la prudence en évoquant le sujet : «Le monde est caractérisé par la géopolitique et les intérêts commerciaux. Et ici, le gouvernement mauricien se doit d’être prudent et ne pas être naïf». Pour lui, il est important que le gouvernement mauricien trouve le bon équilibre avec le gouvernement britannique en ce qui concerne la négociation des îles Chagos car le Royaume-Uni est un pays très puissant. «Et si le RoyaumeUni poussait Maurice sur la liste noire ou grise en ce qui concerne notre juridiction ?», demande le consultant qui voit déjà un scénario catastrophique si les Britanniques font des choix stratégiques contre l’intérêt national de notre pays. Selon Kevin Teeroovengadum, sur les dix dernières années, Maurice a pu se positionner «comme une importante plateforme financière pouvant concurrencer des juridictions internationales, surtout celles qui sont proches du Royaume-Uni, comme Jersey et Guernesey concernant les investissements en Afrique». Avec le Brexit et le fait que le Royaume-Uni se rapproche de l’Afrique, il est essentiel, insiste-t-il, que «Maurice préserve, voire renforce son statut de plateforme financière». Pendant des années, un certain nombre de sociétés d’investissement basées au Royaume-Uni ont utilisé Maurice pour acheminer leurs investissements en Afrique. Parmi, l’on compte DFID, CDC, Actis et Helios. Et Kevin Teeroovengadum de faire ressortir : «Des accords portant sur des investissements d’environ 400 millions de livres sterling ont été signés par le Groupe CDC et soutenus par le gouvernement britannique lors du Sommet Royaume-Uni/ Afrique. Il est temps pour Maurice de s’activer pour s’assurer que non seulement ces investissements transitent par sa juridiction, mais aussi qu’on capte ces flux de capitaux pour avoir une réelle substance». Yash Manick, directeur général de Mauritius Africa Fund, le rejoint sur ce point : «Le secteur bancaire et le global business peuvent être un tremplin vers l’Afrique. La juridiction mauricienne reste la référence et pourra être utilisée pour structurer les investissements vers le continent africain». Il est néanmoins très réaliste sur les défis qui viennent de cette ouverture du RoyaumeUni sur les autres pays africains : pour lui, cela équivaut à plus de compétition. «Il faut faire attention et rester compétitif au niveau des prix, des coûts de production pour ne pas perdre face aux autres pays», insiste Yash Manick. Selon lui, même si Maurice a déjà des acquis commerciaux avec le Royaume-Uni grâce aux accords post-Brexit signés l’année dernière, il ne nous faut pas nous endormir sur nos lauriers.

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La monnaie britannique a subi les effets des incertitudes autour du Brexit depuis son annonce en 2016. En effet, la livre sterling a perdu près de 14 % en trois ans, mais elle devrait se redresser dans les jours à venir, car il n’y a plus d’incertitude autour du Brexit, selon les analystes. La livre sterling a vu sa valeur baisser brutalement suite au vote du Brexit, le 23 juin 2016. Sur le marché mauricien aussi, cette tendance s’est ressentie. Alors que la livre sterling s’échangeait à Rs 55 avant le vote, elle ne valait que Rs 47 juste après. «Un effondrement de près de 15 % est extrêmement rare sur le marché des changes et vient bouleverser les équilibres. Cet effondrement est l’illustration de la pire condition pour les marchés en général : l’incertitude. La livre a continué à baisser lors des mois de tractations qui ont suivi», résume Alexandre Sanchini, CEO de Blue Ship Capital. Aujourd’hui encore, la livre se négocie autour de Rs 48, soit à son niveau d’après le vote. Les conséquences de cette baisse se sont ressenties à plusieurs niveaux. D’abord, les voyages et même les études en Angleterre sont devenus plus accessibles. L’importation de produits du Royaume-Uni revient également à moins cher. Néanmoins, l’effet n’aura pas été que positif. Par exemple, l’exportation de produits vers le Royaume-Uni est devenue plus difficile car la facture augmente. «Le coût d’un séjour dans un hôtel mauricien a, lui aussi, augmenté de 15 % pour un touriste britannique. Les Mauriciens qui détiennent des actifs au Royaume-Uni (l’immobilier, par exemple), ou des livres sterling sur un compte bancaire ont vu la valeur de ces actifs baisser après l’annonce du Brexit», donne en exemple notre interlocuteur. Commentant le fait qu’une livre sterling faible est souvent perçue comme bénéfique pour Maurice, le CEO de Blue Ship Capital fait valoir qu’une forte instabilité du taux de change peut freiner les investissements, reporter des achats ou des voyages. Plus encore, le fait que Maurice importe moins qu’il n’exporte vers le Royaume-Uni ne joue pas vraiment en sa faveur. «11 % des exportations mauriciennes vont au Royaume-Uni, troisième marché d’export. En revanche, seulement 2 % de nos importations en proviennent. Nous ne profitons que très peu de la baisse de la livre ; on peut même dire que c’est globalement pénalisant pour Maurice», analyse Alexandre Sanchini. Le cours de la livre est en train de se redresser à présent qu’un Brexit ordonné a été décidé : même si celui-ci est toujours considéré assez bas, la tendance à la hausse est entamée. La mise en place d’accords commerciaux entre le Royaume-Uni et l’Europe va certainement s’accompagner d’une réévaluation de la livre, les incertitudes qui ont longtemps pesé lourd dans la balance étant peu à peu levées. «Les exportations vers le RoyaumeUni reviendront à moins cher aux acheteurs britanniques, mais les conditions commerciales ou douanières peuvent changer et présenter de nouveaux défis», met néanmoins en garde notre interlocuteur en commentant les opportunités commerciales pour Maurice.

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