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Filière cannière : un équilibre à préserver

u003cpu003eÀ La Réunion, la filière canne-sucre fait vivre différents acteurs à travers la production du sucre et de ses coproduits. Elle véhicule aussi le savoir-faire réunionnais grâce à lu0026rsquo;exportation du sucre de canne en Europe. Focus sur cette filière pour mieux en comprendre le poids économique et les enjeux qui y sont liés.u003c/pu003eu003cpu003eDans le cadre de ce focus, nous nous sommes rapprochés du Syndicat du sucre de La Réunion qui défend les intérêts des professionnels de la canne à sucre et des industriels du sucre depuis plus du0026rsquo;un siècle (il a été créé en 1908). Il assure la promotion de la filière canne-sucre et négocie les accords avec les producteurs de canne. Nous lui devons un éclairage intéressant, notamment sur les chiffres liés à cette activité.u003c/pu003eu003cpu003eParlons du0026rsquo;abord en termes de superficie : sur 24 500 hectares, représentant 57 % de la surface agricole utile de lu0026rsquo;île, on dénombre 3 300 exploitations cannières produisant environ 1,9 million de tonnes de canne chaque année.u003c/pu003eu003cpu003eDe la canne au sucre, il faut passer par deux sucreries : situées de part et du0026rsquo;autre de lu0026rsquo;île (le Sud-Ouest avec la sucrerie du Gol et le Nord-Est, avec la sucrerie de Bois-Rouge), elles produisent 210 000 tonnes de sucre par an. La Réunion assure 80 % de la production européenne de sucre de canne en volume. La filière canne-sucre occupe même le premier rang des exportations de lu0026rsquo;île. Le sucre représente entre 40 et 50 % des exportations en valeur. Notons aussi que depuis 1960, la productivité a doublé : de 4 à 8 tonnes de sucre à lu0026rsquo;hectare.u003c/pu003eu003cpu003ePour ce qui est de lu0026rsquo;emploi, du0026rsquo;après une étude réalisée début 2014 par le Syndicat du sucre de La Réunion, 18 300 emplois directs, indirects et induits sont générés par la filière canne-sucre à La Réunion. Dans le détail, on recense 11 800 emplois directs (les agriculteurs et les salariés agricoles, les sucreries, la logistique, la recherche et le développement, le transport, les distilleries de rhum et les centrales électriques utilisant la bagasse, ainsi que les organismes interprofessionnels) et 2 000 emplois indirects (les fournisseurs directs et indirects des industries, les fournisseurs directs des exploitations agricoles et administrations et les organismes agricoles).u003c/pu003eu003cpu003eLes 4 500 emplois induits résultent de lu0026rsquo;effet redistributif de la production de canne, de sucre, de rhum et du0026rsquo;énergie sur les secteurs du0026rsquo;activités économiques ; ils sont induits par les revenus des agriculteurs et des salariés agricoles, des salariés des industries (sucre-rhum-énergie), des fournisseurs des industries et des exploitations agricoles, sans oublier des agents des administrations et des organismes agricoles.u003c/pu003eu003cpu003eÀ ces chiffres concernant le seul marché local, on pourrait ajouter celui des 1 000 emplois, qui correspondraient à lu0026rsquo;impact de la filière au niveau national. Il ressort que la filière canne-sucre représente plus de 13,3 % des emplois du secteur privé de La Réunion. Il faut savoir également que la taille moyenne du0026rsquo;une exploitation de canne à sucre est de 7,6 hectares, autrement dit la dimension du0026rsquo;une exploitation familiale. Une dimension structurelle à prendre en considération si lu0026rsquo;on ajoute quu0026rsquo;à elles seules les exploitations cannières regroupent 57 % des emplois de la filière.u003c/pu003eu003cpu003eLe premier marché qui su0026rsquo;ouvre à la filière réunionnaise à lu0026rsquo;exportation concerne une gamme de sucres que seuls les pays canniers peuvent produire: les sucres roux de canne prêts à lu0026rsquo;emploi, directement consommables par le client final, également appelés u0026laquo;sucres spéciauxu0026raquo;. Ils partiront à destination des industries agroalimentaires ou seront distribués sous forme de sucres de bouche sous des marques commerciales.u003c/pu003eu003cpu003eu003cstrongu003eLibéralisation des marchésu003c/strongu003eu003c/pu003eu003cpu003eLe deuxième marché est celui du sucre brut destiné au raffinage. En effet, les consommateurs européens étant pour la plupart amateurs de sucre blanc, une partie du sucre roux réunionnais passe par un processus de raffinage pour devenir du sucre blanc. Même si cette quantité représente une partie importante (plus de 50 %) de la production de lu0026rsquo;île, elle a un concurrent direct : la production européenne de sucre blanc à partir de la betterave, notamment les zones les plus productives (France métropolitaine, Allemagne, Pays-Bas) qui connaissent une croissance de lu0026rsquo;ordre de 10 à 20 %. Cette situation pourrait toutefois ne pas affecter la production de sucre réunionnais destinée au raffinage si elle arrive à se tourner vers les zones déficitaires que sont la Grèce, la Roumanie, lu0026rsquo;Italie ou encore lu0026rsquo;Espagne.u003c/pu003eu003cpu003eRevenons sur le cas des sucres dits u0026laquo;spéciauxu0026raquo; qui sont exportés en Europe. À lu0026rsquo;instar de toutes les filières exportatrices dans les départements du0026rsquo;outre-mer (DOM), des spécificités structurelles sont à prendre en considération. Lu0026rsquo;éloignement de ces régions ultrapériphériques de lu0026rsquo;Union européenne, leur insularité nécessitent des aménagements et des programmes du0026rsquo;appui pour encourager leur production, comme la possibilité du0026rsquo;être présentes sur le marché européen sans barrières tarifaires. Cette exonération des droits de douane est aussi accordée à du0026rsquo;autres producteurs canniers, comme Maurice, Bélize, ou encore le Malawi parce que, comme les DOM, ils sont contraints par des coûts de main-du0026rsquo;œuvre, des coûts sociaux très importants. Les grands producteurs canniers (Brésil, Inde, Thaïlandeu0026hellip;) en revanche sont soumis à des droits de douane, en vertu de la nomenclature douanière en vigueur en Europe, quand ils débarquent sur le marché européen.u003c/pu003eu003cpu003eOr, depuis le début des années 2000, lu0026rsquo;Europe a engagé une politique davantage axée sur la libéralisation des marchés. Dans cette perspective, lu0026rsquo;Europe négocie régulièrement des accords avec les grands exportateurs pour faciliter leur entrée sur le marché européen; des accords qui prévoient certains quotas plus avantageux et tendent à abaisser les barrières douanières. Récemment, un accord sucrier bilatéral conclu avec le Vietnam prévoyait du0026rsquo;accorder à ce dernier un quota de 20 000 tonnes de sucre, sans quu0026rsquo;il soit précisé su0026rsquo;il su0026rsquo;agit de sucre blanc raffiné ou de sucre roux spécial.u003c/pu003eu003cpu003eu003cstrongu003eRester vigilanteu003c/strongu003eu003c/pu003eu003cpu003eGrâce à la mobilisation des acteurs du sucre ultrapériphériques et à lu0026rsquo;intervention du député européen Younouss Omarjee, qui représente la circonscription Outre-Mer au Parlement européen, lu0026rsquo;accord a été revu pour limiter les exportations de sucres spéciaux du Vietnam à 400 tonnes par année, en lieu et place du quota de 20 000 tonnes dans lequel les sucres spéciaux se trouvaient inclus. Au-delà de cette limite, le Vietnam devra su0026rsquo;acquitter du0026rsquo;un droit de douane de 419 euros par tonne.u003c/pu003eu003cpu003eEn dépit de sa position de leader parmi les fournisseurs en sucres de canne spéciaux en Europe, La Réunion a des raisons de su0026rsquo;inquiéter, elle qui doit respecter des normes environnementales et sociales beaucoup plus strictes que celles qui incombent à ses concurrents du Mercosur (Argentine, Brésil, Venezuelau0026hellip;), du Pacte andin (Colombie, Panama, Equateuru0026hellip;) ou du0026rsquo;autres pays comme lu0026rsquo;Australie et les États-Unis. Comme nous le confie Sylvie Le Maire, la déléguée générale du Syndicat du sucre : u0026laquo;u003cemu003eLa Réunion doit rester vigilante pour rappeler à lu0026rsquo;Europe, à chaque négociation, de prendre en compte notre problématique insulaire et lu0026rsquo;inciter à conserver un équilibre qui permette aux sucres spéciaux réunionnais de rester compétitifs sur le marché européen. Cu0026rsquo;est une nécessité vitale devant les volumes que peuvent proposer les grands producteurs et leurs coûts sociaux parfois jusquu0026rsquo;à 20 fois moins élevés que les nôtresu003c/emu003eu0026raquo;.u003c/pu003e

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