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Bijouterie de luxe : L’industrie dans l’attente d’une stratégie nationale

LA FILIÈRE de la bijouterie est sur le point d’émerger comme un générateur de richesse économique pour le secteur manufacturier, fait-on valoir à l’Economic Development Board (EDB). Ce secteur d’activité est pourtant en repli, et la valeur des exportations des produits de bijouterie et d’orfèvrerie est en baisse depuis 2016, selon les derniers chiffres de Statistics Mauritius. L’ouverture de la filière locale à de nouveaux segments, à l’instar de la bijouterie de fantaisie, mais surtout la possibilité pour les artisans d’accéder à une formation continue, à des techniques de production de dernière génération et une productivité accrue permettront au secteur de regagner ses lettres de noblesse.

De Rs 1,2 milliard d’exportations d’articles de bijouterie et d’orfèvrerie en 2016, la valeur des exportations est passée à Rs 598 millions en 2017. De janvier à juin 2018, la valeur est estimée à Rs 300 millions.

Par rapport à 2016, cite à ce propos Vinaye Dauhoo, directeur de la bijouterie Gold Touch, ses ventes ont connu une baisse d’environ 30 %. Il impute celle-ci à la conjoncture économique dans laquelle évolue le secteur de la bijouterie de luxe. Fait que corrobore Ravi Jetshan, directeur créatif de Ravior. Il soutient d’ailleurs que dans le contexte économique actuel, il est «tout à fait normal» que le secteur de la bijouterie de luxe soit passé au cours de 2018 par «un passage difficile. Pour un bilan tangible de la performance de ce secteur d’activité, il faudra compiler le volume et la valeur des activités jusqu’en février 2019 au moins. Comme la période de fin d’année est cruciale en termes de chiffre d’affaires, ce n’est qu’après février que nous aurons une vue globale de la situation pour un exercice de comparaison par rapport aux années précédentes. À notre niveau, on essaie de nous remettre en question le plus souvent possible. Je tiens ici à dire un grand bravo à notre équipe qui a su faire face aux nouveaux défis qui s’annoncent tels que l’e-commerce».

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UNE PÉRIODE PROPICE AUX AFFAIRES 

Pour sa part, Ratish Sooklaul, codirecteur de G. Sooklaul Bijou d’Or, explique que la période de fin d’année est propice aux affaires. «Le marché local de la bijouterie de luxe évolue par rapport aux fêtes et tendances du moment. On ne peut se fier à la vente constante de bijoux de luxe car désormais le grand public fait bien plus attention aux dépenses et privilégie davantage les bijoux moyen de gamme que ceux appartenant à des gammes plus élevées. Toutefois, ceux qui peuvent se le permettre n’hésiteront pas à mettre la main à la poche pour se faire plaisir», note Ratish Sooklaul.

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Conscient de l’état de piétinement dans lequel évolue le secteur de la bijouterie et du besoin de lui donner une nouvelle impulsion, l’EDB a organisé, en septembre dernier, des ateliers d’information et d’échanges de connaissances sur les enjeux et opportunités dans ce domaine, particulièrement pour le marché de l’exportation. Dans cette optique, l’agence a sollicité l’assistance de la consultante française Géraldine Valluet, spécialiste des tendances dans les domaines du luxe et de la bijouterie.

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Lors du Trend Workshop en septembre dernier, destiné aux opérateurs locaux de la bijouterie locale, Géraldine Valluet a fait ressortir que la bijouterie est en train de devenir un des marchés les plus dynamiques au monde. Il est important, a-t-elle souligné, de demeurer au courant des styles et tendances qui changent rapidement au gré de l’évolution constante du secteur. Plusieurs compagnies locales produisent déjà des bijoux de luxe et de haute qualité, souligne Géraldine Valluet. Reconnaissant un savoir-faire mauricien particulier qui combine «intelligemment un mélange de techniques manuelles, traditionnelles et de haute technologie», la consultante française a encouragé les talents de ce secteur d’activité à consolider leurs aptitudes afin de tirer avantage des marchés internationaux. «La plupart des PME engagées dans la bijouterie de fantaisie utilisent la technique de perlage traditionnelle, alors que plusieurs autres méthodes de production sont disponibles pour le développement d’une collection tendance de bijouterie de fantaisie». 

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Quelles sont les chances des opérateurs locaux de se démarquer dans cette voie à l’échelle locale ou internationale ? «La chance s’accroît toujours quand on a davantage de savoir-faire. D’où, en premier lieu, une bonne formation en amont. Mais nous serons peut-être plus visibles aussi en nous démarquant des autres compétiteurs étrangers si nous mettons en avant nos propres marques et modèles», estime Ravi Jetshan.

Il insiste sur le fait que le pays a les compétences nécessaires sur son sol qui pourraient être mises davantage en avant pour valoriser notamment le savoir-faire local à la fois sur les marchés local et international.

Mais pour que le secteur prenne son envol, il faudrait mettre en place une stratégie nationale. De l’avis de Ravi Jetshan la filière de la bijouterie de luxe pourrait émerger «si tous les aspects du métier (formation, compétences, ligne directrice) sont revus même si cela ne sera pas une tâche aisée. Au sein de Ravior, on a toujours eu la volonté d’œuvrer en ce sens».

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