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Édito

30 ans au service de l’économie

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Richard Le Bon

17 avril 1992 : Business Magazine signe son entrée sur le marché de la presse écrite. Le premier numéro marque les esprits. Car c’est une édition spéciale consacrée aux 100 premières compagnies, un concept importé notamment de l’Australie et des États-Unis. Le classement est déterminé en fonction du chiffre d’affaires. C’est alors une innovation dans le monde des médias et des affaires. Le premier classement est dominé par Rogers avec un chiffre d’affaires de Rs 3,25 milliards. Dans le cercle fermé des milliardaires, l’on compte alors seulement six entreprises : outre Rogers, l’on retrouve dans l’ordre Air Mauritius, Ireland Blyth Limited, le Groupe Currimjee, Shell (Mauritius) et Consolidated Investment ENT. Ltd (CIEL).
Ce premier numéro de Business Magazine est en tout point symbolique car il marque le début d’une rupture avec une mentalité insulaire ; où l’on fait montre d’une certaine pudeur à parler ouvertement d’argent et de richesse et où certains sujets comme l’ouverture des salles de conseil à la gent féminine étaient rarement abordés, pour ne pas dire relevaient du tabou.
Parler si librement de la vie des entreprises, des nominations, de la performance financière c’était embarrassant pour certains patrons ; cela aurait même pu paraître pour de l’impertinence, mais la révolution était en marche. Dans la petite île Maurice ayant tout juste accédé au statut de République, Business Magazine incarnait le changement, exhortant les dirigeants d’entreprises à sortir de leur cocon, à développer un rapport décomplexé face à l’argent tout en prônant un modèle d’économie libérale. Or, le libéralisme, ce n’est pas seulement une philosophie économique, mais aussi une certaine ouverture d’esprit.
Non, il n’y a aucune honte à réaliser des bénéfices. Qu’on en fasse le compte-rendu dans la presse, c’est la règle du jeu dans une économie libérale. Réussir dans les affaires, c’est par-dessus tout synonyme de succès. Un succès qui mérite d’être célébré. Assez vite, les entrepreneurs, petits et grands, se laissent prendre au jeu reconnaissant la nécessité d’avoir un magazine économique qui leur donne des informations de première main susceptibles de leur permettre de prendre des décisions stratégiques éclairées.
Tout au long de ces 30 ans d’existence, Business Magazine est resté cohérent avec sa philosophie en pratiquant un journalisme sérieux et en abordant les grands enjeux économiques tout en ayant un regard sur le monde ; en gardant un état d’esprit optimiste ; en mettant à l’avant-plan les capitaines d’industrie ; en insufflant la confiance aux entrepreneurs ; en prônant l’ouverture de l’économie ; en militant pour une plus grande représentation de la femme dans les conseils d’administration 

et en vantant les mérites du génie mauricien.
Ces 30 dernières années, Business Magazine a été un témoin privilégié des grandes mutations qui se sont opérées au sein de l’économie mauricienne. D’ailleurs, son démarrage a coïncidé avec la création du secteur offshore dont l’architecte était le ministre des Finances d’alors, Rama Sithanen, un libéral dont la vision cadrait avec celle de Business Magazine. C’est également le début d’une période de transition avec l’amorce de la transformation de notre économie en une économie des services.
Après une période relativement prospère où le libéralisme a joué un rôle clé dans le développement économique et humain à Maurice, depuis la crise économique mondiale de 2008, nous sommes enlisés dans un cycle de croissance molle inférieure à 4 % dont nous parvenons difficilement à nous dépêtrer. Avec l’éclatement de la pandémie en 2020 et l’inclusion du pays sur la liste noire de l’Union européenne pendant 18 mois, toute l’économie mauricienne a été durement ébranlée. 

Fidèle à sa mission, Business Magazine a accompagné le monde des affaires dans ces moments extrêmement pénibles en participant activement à la réflexion sur les challenges que nous impose la nouvelle normalité. Qu’on ne se le cache pas : les vents contraires continuent à souffler fort. La guerre en Ukraine est venue rajouter une couche d’incertitudes en accentuant les perturbations aux chaînes d’approvisionnement et en rendant les marchés internationaux encore plus volatils, incertains et complexes.
Aujourd’hui, la crise nous a clairement poussés dans un nouveau cycle de stagflation et tout le challenge pour le secteur privé comme pour les pouvoirs publics sera de mobiliser les énergies pour qu’on puisse s’extraire de cet engrenage. Il s’agira de calmer la colère légitime de la population face à l’escalade des prix (les débordements de ces derniers jours sont le signe précurseur d’une crise sociale qui couve et qui crée un environnement délétère non propice pour les affaires) et de tout mettre en œuvre pour ramener la confiance, une condition sine qua non pour débloquer l’investissement privé et relancer l’appareil économique.
Dans ces moments difficiles, Business Magazine, soyez-en sûrs, demeurera aux côtés des entrepreneurs en s’engageant dans un débat sans cesse constructif pour permettre au pays de sortir de l’ornière.

 

Richard LE BON

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