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Édito

Dialogue de sourds

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Dialogue de sourds | business-magazine.mu

La croissance d’abord, a affirmé le ministre des Finances lors d’une conférence de presse en fin de semaine dernière. Cette position de Xavier Duval, nous la connaissions déjà, mais le fait qu’il vienne la réitérer à quelques semaines de la prochaine réunion du comité de politique monétaire témoigne de l’état d’esprit du Grand argentier.

D’ailleurs, après avoir annoncé une croissance de 4 % pour 2013 dans son discours du Budget, le ministre des Finances se montre désormais plus réaliste. Face aux dernières estimations du Fonds monétaire international sur l’économie mondiale, il ne pouvait en être autrement.

Xavier Duval l’a compris, et il choisit non seulement la voie de la prudence en s’alignant sur les prévisions de Statistics Mauritius pour cette année, mais il fait mieux en admettant la justesse des recommandations de MCB Focus. Alors qu’il avait fait montre d’un certain agacement, en janvier dernier, lorsque les analystes de cette banque avaient prédit que la croissance serait de l’ordre de 3,5 % cette année.

Ce changement d’attitude traduit-il une certaine appréhension face au manque de visibilité qui caractérise toujours l’environnement global ? Difficile à dire à ce stade. Cela dit, une chose est sûre : les signes de cette reprise tant attendue tardent à se manifester. Xavier Duval s’en est également aperçu lors de sa participation aux réunions annuelles des institutions de Bretton Woods. Et il ne veut pas prendre de risque avec la politique monétaire.

Sa déclaration à l’effet que la priorité macroéconomique du moment demeure la croissance et non l’inflation en dit long sur ce qu’il attend de la prochaine rencontre du comité de politique monétaire, en juin prochain. Selon Xavier Duval, les risques penchent plus du côté de la croissance que de l’inflation. La preuve : l’inflation n’a été que de 3,6 % en mars tandis que les prévisions de croissance continuent de s’effriter.

Il n’empêche que le Gouverneur de la Banque de Maurice, Rundheersing Bheenick, est tout sauf de son avis. Il a clairement fait comprendre, en mars dernier, qu’il ne faudrait pas s’attendre à une baisse des taux dans les mois à venir. La raison évoquée par le principal concerné : le risque d’une nouvelle poussée inflationniste est bien réel.

Il brandit, à cet égard, les estimations des analystes de la Banque centrale qui voient l’inflation osciller dans la fourchette de 4,7 % à 4,9 % d’ici à la fin de l’année. Une prévision qui est loin de faire l’unanimité car le Trésor public préfère tabler sur 4,5 %.

Mais pour la BoM, il n’y a pas que l’inflation qui soit un souci. Le taux d’épargne, qui a atteint des niveaux historiquement bas, constitue également un problème. Du côté du ministère des Finances, l’on s’attarde plutôt sur la menace que fait peser une baisse de la croissance sur l’emploi.

Si certains voient là l’occasion d’un véritable débat sur les enjeux nationaux impliquant le Trésor public, la Banque de Maurice et un public plus large, d’autres, en revanche, considèrent que nous nous dirigeons vers un dialogue de sourds étant donné la posture peu flexible adoptée par les   deux camps.

Pourtant, les deux parties disposent chacune des moyens nécessaires pour relancer la croissance, qui est certainement la priorité des priorités. Cette relance, si elle a lieu dans la conjoncture actuelle, dépendra en grande partie de l’investissement. Or, après avoir atteint un sommet de 24 % du produit intérieur brut, il y a quatre ans de cela, l’investissement privé est descendu à son niveau actuel de 17 %. L’investissement public devrait, quant à lui, tourner autour de 5,1% du PIB alors qu’en 2009, il se situait à 6,6 % du PIB.

La responsabilité de booster les dépenses d’investissements revient au Trésor Ce ne sont pas les moyens qui manquent, d’autant plus que le déficit budgétaire est attendu à moins de 2,5 % cette année. Par contre, la situation se complique lorsqu’il s’agit de la capacité de mise en œuvre nationale. Il ressort, selon les statistiques, qu’à fin février, soit quatre mois après la présentation du Budget, seul 8 % du Capital Expenditure a été dépensé.

Les autorités monétaires peuvent également apporter leur pierre à l’édifice en regardant au-delà de l’inflation quand la situation l’exige. Ce qui ne veut nullement dire qu’il faut impérativement baisser le taux directeur, mais au moins maintenir le cap de la stabilité pendant un certain temps.

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