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Édito

Les prémices de la reprise

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Richard Lebon

Malgré les tensions géopolitiques qui agitent la planète, dont la dernière en date est l’affaire de ballons «espions» qui a jeté un froid diplomatique entre Washington et Pékin, et l’intensification de la guerre en Ukraine, ce début d’année est porteur d’espoir sur le plan économique car tout porte à croire que l’on entrevoit les prémices de la reprise. Si dans les pays développés, l’inflation reflue moins vite que prévu en dépit de la politique agressive de resserrement des taux d’intérêt, d’autres indicateurs laissent à penser que l’optimisme est de retour du côté des entreprises.

Sur le front de l’emploi, l’on note une amélioration des perspectives dans la zone Euro même s’il y a des disparités notables entre les pays membres. En France, nonobstant le ralentissement de la croissance, le chômage est tombé à 7,2 % au quatrième trimestre contre 7,5 % douze mois plus tôt. Une performance qui ragaillardit le président français, Emmanuel Macron, qui espère atteindre le plein-emploi d’ici la fin de son second quinquennat en 2027. Il n’a d’ailleurs pas manqué de tweeter que le taux du chômage est à son niveau le plus bas depuis 40 ans. Pourtant ballottée par les vents contraires de la crise énergétique résultant du conflit russo-ukrainien, l’Allemagne réalise aussi une très bonne performance en termes d’employabilité, avec un taux de chômage se stabilisant autour de 5,5 % depuis août 2022. Outre-Rhin également, on caresse la perspective du plein-emploi à terme.

En termes de revenu réel des ménages, les derniers chiffres publiés par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) ce mois-ci montrent que le revenu réel des ménages par habitant a augmenté de 0,2 % au sein de cette zone au troisième trimestre 2022. L’Autriche réalise la meilleure performance avec une progression du revenu réel des ménages par habitant de 10,7 %.

Hormis le Danemark, l’Espagne, la Finlande, le Portugal, la République tchèque et le Royaume-Uni, le revenu réel des ménages par habitant a dépassé les niveaux d’avant la pandémie dans les autres pays de l’OCDE.

À Maurice, quand on repasse en revue les indicateurs constituant les grands équilibres, l’on se retrouve avec une croissance de 7,8 % en 2022, résultant en grande partie du rebond technique découlant de la reprise dans le tourisme ; une inflation désespérément élevée à 11,1 % à fin janvier (il est permis de conjecturer sur quel aurait été le taux d’inflation globale si la Banque centrale n’avait pas relevé son taux directeur de 2,65 % en 12 mois) ; un taux de chômage de 9,1 % en 2021 qui dénote une certaine atonie du marché de l’emploi ; et une balance courante déficitaire de -14,4 % du PIB qui révèle le déséquilibre d’un modèle économique où l’on est trop dépendant des importations en produits alimentaires et en hydrocarbures.

Ces indicateurs macroéconomiques ne renvoient pas une image encourageante de la performance économique. Mais, quand on considère les derniers bilans des entreprises, le constat est beaucoup plus positif.

Prenons le cas d’IBL Group, le plus important conglomérat mauricien. Son chiffre d’affaires pour le premier semestre se terminant le 31 décembre 2022 augmente de 24 % pour atteindre Rs 27,06 milliards contre Rs 21,91 milliards lors de la période correspondante à fin décembre 2021. Une hausse des revenus est enregistrée dans pratiquement tous les segments d’activités : l’agro-industrie et énergie, la construction et l’ingénierie, le commerce et la distribution, les services, l’hospitalité, la santé et les technologies, la logistique, l’immobilier et le Seafood. Quant aux profits d’IBL, ils passent à Rs 1,72 milliard contre Rs 1,56 milliard.

Le cas de CIEL est édifiant : le groupe a posté des profits de Rs 2 milliards au premier semestre de l’exercice financier 2022-2023, alors que son chiffre d’affaires gonfle de 37 %, passant de Rs 13,22 milliards à Rs 18,14 milliards. Là encore, tous les clusters du groupe sont en nette progression, allant du textile, à la finance, à l’immobilier, à la santé, à l’hôtellerie et à l’agro-industrie. Cette excellente performance de CIEL lui permet de distribuer des dividendes d’un montant de Rs 1,2 milliard à ses actionnaires.

Solide performance également d’ENL, le groupe affichant des bénéfices de Rs 947,28 millions au premier semestre de son année financière contre Rs 334,14 millions lors de la période correspondante. S’agissant de son chiffre d’affaires, il passe de Rs 8,50 milliards à Rs 10,34 milliards, soit une hausse d’environ 21 %.

De même, le secteur de la distribution est en pleine forme, comme en témoigne la performance d’Innodis qui, pour les six mois se terminant le 31 décembre 2022, engrange des revenus de Rs 3,17 milliards (+17 %), alors que ses profits grimpent à Rs 95,75 millions (+208 %). Mais la direction du groupe fait ressortir que sa marge bénéficiaire risque d’être mise sous pression au second semestre en raison de la hausse des tarifs d’électricité, de l’inflation salariale, de la pénurie de devises étrangères ou encore de la majoration de ses coûts d’opération.

Dans l’hôtellerie, les opérateurs ont mangé leur pain noir pendant plus de deux ans. Mais les beaux jours sont enfin là. Cela se vérifie dans les chiffres non audités de Sun qui indiquent un chiffre d’affaires de Rs 4,13 milliards pour les six mois se terminant le 31 décembre 2022. Alors que ses profits après impôts totalisent Rs 681,67 millions. Tout en soutenant que les tendances des réservations pour le troisième trimestre sont prometteuses, la direction de Sun exprime des inquiétudes par rapport à l’évolution du taux de change, à la majoration des coûts d’électricité et à l’inflation persistante.

Terminons cette analyse par l’excellente performance du secteur bancaire, avec le Groupe MCB tenant la gageure en postant des profits semestriels de Rs 6,7 milliards. AfrAsia Bank, au sein de laquelle IBL va céder 30,29 % de son actionnariat au groupe ivoirien AFG Holding, réalise, quant à elle, des profits semestriels de Rs 2 milliards. Performance notable également d’ABC Banking Corporation qui enregistre des bénéfices d’exploitation semestriels de Rs 351,6 millions. Son Capital adequacy ratio est calculé à 15,1 % alors que son Liquidity coverage ratio est de 583,5 %, ce qui est au-dessus du seuil préconisé par la Banque de Maurice.

Ayant réussi à maintenir leur stabilité financière tout au long de la crise grâce à l’adoption de mesures macro-prudentielles très strictes, les banques sont aujourd’hui en mesure de débloquer davantage de liquidités pour soutenir l’économie réelle. En ces temps de reprise, les entreprises auront besoin d’être accompagnées financièrement dans leur développement.

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