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Édito

Tensions

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Soufflant le chaud et le froid avec son projet de réforme électorale, Navin Ramgoolam a pu, non seulement, semer la zizanie au sein de l’Opposition, mais il a également réussi à la démobiliser pendant des mois au point d’offrir à son gouvernement un hiver politique plus ou moins doux.

La démarche de Ramgoolam était tellement subtile que même les protagonistes du Remake 2000 ont opté à un certain moment pour une Cooling off period.

Mais l’arrivée de l’été s’annonce très chaude pour le Premier ministre qui est rentré au pays, le week-end dernier, après sa participation au Sommet de la francophonie et un détour par Londres.

En sus de la reprise des travaux parlementaires et des préparatifs en vue des prochaines élections municipales, le chef du gouvernement se retrouve avec deux épineux dossiers sur les bras. L’un concerne la levée de boucliers dans le sillage de la publication du rapport du Pay Research Bureau (PRB) et l’autre porte sur la guerre ouverte entre le ministre des Finances, Xavier Duval, et le Gouverneur de la Banque de Maurice, Rundheersing Bheenick.

Si le premier foyer de tension risque d’enrayer la machinerie gouvernementale en route vers les municipales, en revanche, le bras de fer entre le Trésor et la Banque centrale ne manquera pas d’envoyer des signaux brouillés au marché à quelques jours de la présentation du Budget. Alors que dans la conjoncture, les opérateurs économiques s’attendent à plus de visibilité.

Les ministres des Finances se succèdent à l’Hôtel du Gouvernement, mais les relations demeurent tendues avec la Banque de Maurice. L’arrivée de Xavier Duval au ministère des Finances dans le sillage de la démission de Pravind Jugnauth n’a rien changé en cela.

Bien que la période suivant sa nomination aux Finances ait été plus ou moins calme avec Xavier Duval se consacrant à son premier discours budgétaire, ce n’était que partie remise. Les premières fissures ont apparu avec le renouvellement des membres siégeant sur le très sensible comité de politique monétaire. D’ailleurs, à l’époque, certaines nominations avaient soulevé pas mal d’interrogations dans la presse. Dès lors, l’on sentait que l’eau était déjà dans le gaz même si à la BoM Tower, on s’est gardé de commenter les choix du ministre.

La suite nous la connaissons. La première rencontre du comité de politique monétaire new-look en mars dernier s’était soldée par une baisse de 50 points de base du taux directeur qui était ramené à 4,90 %. Si le marché avait déjà anticipé une détente monétaire, par contre, l’ampleur de cette baisse avait pris tout le monde de court.

D’autant plus qu’après avoir réduit le Repo Rate de 10 points de base lors de la réunion du MPC en décembre 2011, le Gouverneur de la Banque centrale avait annoncé que désormais le comité procéderait par des petites touches. Toutefois, il avait omis d’inclure dans son équation l’arrivée de nouveaux membres, dont quelques colombes sur le comité de politique monétaire.

Cela dit, après le coup de semonce en mars, la réunion du MPC de juin a été plutôt calme avec les membres optant pour statu quo. N’empêche, il faut reconnaître que pour éviter toute surprise, Rundheersing Bheenick avait déjà pris les devants quelques jours avant la rencontre pour annoncer la reconstruction des réserves du pays pour arriver à une couverture de six mois d’importation. Une initiative qui vise par la même occasion à corriger le « slight misalignment » de la roupie.

Or, il s’avère selon les propos du ministre des Finances, la semaine dernière, que cette correction n’est pas vraiment intervenue. Qui plus est, il n’a pas manqué de s’en plaindre en affirmant que la surévaluation de la roupie a coûté un point de croissance à l’économie mauricienne.

Cependant, il ressort des articles de presse en date de vendredi dernier que Xavier Duval ne s’est pas uniquement contenté d’accuser la politique monétaire, mais son ministère par l’entremise de l’Accountant General a écrit aux banques commerciales pour leur faire part de la décision du Trésor d’acheter des devises à hauteur de $ 100 millions.

Une démarche qui est perçue comme une déclaration de guerre par bon nombre d’analystes même si Rundheersing Bheenick a, en réponse, aux questions de Business Magazine, vendredi soir, estimé qu’il est tout à fait normal d’avoir des différences d’opinion et que les tensions existent ailleurs également entre les ministères des Finances et les Banques centrales « dont l’Indépendance est garantie par la loi ».

Ceux qui ont suivi le bras de fer Sithanen / Bheenick en 2009 se demandent si Navin Ramgoolam prendra le risque d’arbitrer le match Duval-Bheenick en 2012. Tout porte à croire que ce ne sera pas le cas surtout que Duval pèse plus lourd politiquement pour Navin Ramgoolam à l’Assemblée nationale, contrairement à Rama Sithanen à l’époque.

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