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Édito

Vision Maurice

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Avons-nous les moyens de faire face à une crise de longue durée ? La question mérite d’être posée. Car selon certains économistes, à l’instar de Patrick Artus, la crise dans la zone euro, notre principal marché, pourrait durer vingt ans, soit le temps pour les Etats et le secteur privé de se désendetter, le temps de recréer tous les emplois perdus à cause de la désindustrialisation et de l’explosion de la bulle immobilière, et de mettre en place une gouvernance fédérale.

Certes, personne ne souhaite que cette crise dure aussi longtemps, mais il faut reconnaître que les risques sont réels étant donné les difficultés rencontrées par les dirigeants européens à trouver des solutions durables à cette crise, dont on fête cette année le triste cinquième anniversaire.

Comment se préparer face à une telle éventualité ? Le directeur de l’Audit a apporté une partie de la réponse à cette question dans son rapport, l’année dernière, lorsqu’il a émis le souhait de voir un renforcement du processus de planification économique à Maurice.

« Ce n’est que lorsque les travaux sur la planification stratégique vont s’infiltrer dans le développement du ‘Medium Term Expenditure Programme’ et du ‘Programme- Based Budgeting’, qu’il y a aura une amélioration dans le processus. Le cas échéant, l’on se retrouvera avec un simple exercice comptable », at- il observé. Ce commentaire du bureau de l’Audit est toujours aussi valable aujourd’hui qu’il ne l’était il y a une année. Maurice n’a jamais eu autant besoin d’une vision et d’un véritable instrument de planification du développement à long terme pour guider les politiques et autres stratégies en matière de développement, afin de relancer la croissance.

Cela dit, il ne faut surtout pas croire que ce saut qualitatif se fera du jour au lendemain ou en l’espace d’un discours budgétaire. Il s’agit là d’une vision dynamique qui ne peut être réalisée qu’au moyen d’une planification mûrement réfléchie.

Un tel exercice ne se fait pas non plus dans la précipitation, juste pour marquer des points politiques immédiats, mais doit être mené par une équipe dédiée et dont la mission serait de mettre Maurice sur la voie du développement durable dans un délai précis.

Il est vrai que le gouvernement a annoncé, dans son programme, la mise sur pied d’une National Strategic Transformation Commission. La question est de savoir si c’est d’une commission dont nous avons besoin ou d’un ministère du Plan et du Développement, comme cela a été le cas dans le passé, pour proposer une feuille de route.

Quoiqu’il en soit, le temps presse avec de nombreux défis qui se profilent à l’horizon. Le Mauricien veut avoir une boussole économique qui lui montrera la direction que prendra son pays dans les années à venir. Car ce qu’il voit aujourd’hui, ce sont des décisions prises au petit bonheur à différents niveaux et qui contribuent à faire de sa vie un enfer. La congestion routière quasi-permanente sur nos routes et qui, bien souvent, est le résultat d’une mauvaise planification, comme l’installation de nouveaux feux de signalisation, par exemple, traduit une façon de procéder bien de chez nous.

Si nous voulons mettre fin à cette érosion de notre taux de croissance, il est important d’agir maintenant pendant qu’il est encore temps. Et ce n’est certainement pas en nous consacrant à élaborer des mesures avec une portée à court terme uniquement que nous allons y parvenir. Les chamailleries sur les points de croissance n’aideront pas non plus à affronter la crise si elle devait durer 20 ans.

En revanche, une nouvelle vision du développement économique, accompagnée d’une nouvelle vague de réforme touchant les secteurs clefs de l’économie mauricienne et marquant les esprits, apportera l’oxygène nécessaire à une économie qui commence à s’essouffler.

Une réelle transformation du paysage économique et social du pays passe invariablement par un consensus national et une appropriation du projet, voire de la vision, par tous les segments, de la société mauricienne et particulièrement par la classe politique.

La « Vision Maurice », comme nous pouvons l’appeler, sera la référence pour tout développement futur dans l’île. Bien qu’il soit tout à fait permis à chaque Mauricien de rêver d’un avenir meilleur pour la présente et la nouvelle génération, il faut en même temps être réaliste.

Un tel chantier doit impérativement s’appuyer sur un leadership national fort et capable de porter le pays vers les prochaines décennies. Il ne se réalisera pas non plus si le pays ne se donne pas les moyens de ses ambitions en alignant le système éducatif sur les enjeux nationaux.

Préparer l’avenir, c’est aussi préparer les ressources humaines, qui sont d’ailleurs les seules ressources du pays.

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