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Le secteur des TICS peine à recruter

Après une année 2020 marquée par une crise sanitaire inédite, les recrutements sont repartis à la hausse. Les entreprises recrutent davantage et les perspectives d’embauche sont définitivement reparties à la hausse cette année, principalement dans les secteurs des Tic, de la construction ou encore de la finance.

Melissa Prosper-Nourdine,
directrice de Motravay

Marine Biarnes, General
Manager de MeetYourJob
& CareerHub.mu

Melissa Prosper-Nourdine, directrice de Motravay, souligne que les entreprises ont repris leurs activités, les offres d’emplois se multiplient chaque jour, même si les recruteurs restent prudents au regard de la présente conjoncture. «Le gouvernement a rassuré les employeurs qu’il n’y aura pas de confinement et met en place des solutions pour permettre aux entreprises de fonctionner. Le télétravail est devenu monnaie courante et nous constatons qu’un état d’esprit de “vivre avec” s’est installé petit à petit. Les postulants sont nombreux chaque jour à se reconnecter au marché du travail.»

De son côté, Marine Biarnes, General Manager de MeetYourJob & CareerHub.mu, ajoute qu’en tant qu’agence de recrutement, leur état de santé est très représentatif de l’état du marché de l’emploi et de la propension des entreprises à recruter. «Notre croissance projetée sur l’année est quasiment de 100 % par rapport à l’année précédente. Les deux périodes de confinement 2020 et 2021 sont assez significatives. À l’analyse de nos indicateurs clés et si on compare la période du 20 mars au 30 avril 2021 par rapport à la même période en 2020, les conséquences du confinement ont été moindres cette année. Le nombre de ‘job postings’ sur nos plateformes www.careerhub.mu et www. meetyourjob.com a augmenté de +62 % sur les deux périodes.»

Marine Biarnes ajoute que les entreprises qui font appel à ses services le font lorsqu’elles ont des difficultés à recruter ; elles sont dans les secteurs qui embauchent le plus difficilement, c’est-à-dire là où les compétences se font rares et là où la formation doit être investie. Par exemple, les sociétés du secteur des Tic représentent plus de 25 % du chiffre d’affaires de MeetYourJob & CareerHub.mu. Ce n’est peut-être pas le secteur qui recrute le plus à Maurice, mais cela signifie tout de même que les métiers liés à l’informatique et au data représentent un vivier d’embauche indéniable. Il en va de même pour les autres grands pôles faisant appel à CareerHub et MeetYourJob : la Construction/Immobilier, les BPO, la Finance, la distribution/import/export, la santé et les métiers du digital et de la communication. Selon Marine Biarnes, ce sont ces secteurs vers lesquels les jeunes doivent orienter leurs choix de carrière.

«Si nous balayons les secteurs qui publient fréquemment leurs annonces via notre plateforme, nous retrouverons des perspectives dans les Tic, les assurances, le marketing et la vente, la formation, le fastmoving consumer goods (FMCG). On note également une récente reprise du secteur hôtelier ainsi que de la construction», fait ressortir Melissa Prosper-Nourdine. Elle constate aussi qu’avec la crise économique mondiale, la tendance que des personnes sont de plus en plus sollicitées par des firmes étrangères sur des missions courtes ou de plus longues durées, mais à distance. Des firmes liées au digital qui externalisent leurs activités afin de profiter de la maind’œuvre moins chère, du décalage horaire et du bilinguisme des Mauriciens. Une stratégie prudente de considérer Maurice parmi les options d’implémentation internationale. La Gig Economy a ainsi pris de l’ampleur car télétravailler permet aux salariés de compenser leurs réductions salariales par des missions assignées via des sites tels que Upwork ou encore Fiverr.

Émergence de centres de formation intra-entreprise dans les TIC

Par ailleurs, on retrouve également sur les sites de recherche d’emploi beaucoup de postes à pourvoir dans les secteurs des Tic et d’ingénierie. Melissa Prosper-Nourdine confirme que les entreprises IT peinent à recruter et ont pour la plupart mis en place leur propre centre de formation malgré les diplômes existants. Effectivement, l’émergence de centres de formation intra-entreprise, pratique pilote, est aujourd’hui devenue un projet courant au sein de la plupart des entreprises ayant un métier lié au digital. «À côté des subventions et des programmes pour accompagner et solutionner le manque de formations spécifiques, il sera de plus en plus impératif de cibler les besoins des entreprises afin de mieux les allier aux filières de formation au sein des universités, d’encourager la formation en alternance, les interventions d’experts, les stages en entreprise et l’orientation des carrières à l’issue des études secondaires», souligne-t-elle.

Marine Biarnes abonde dans le même sens. Elle soutient que ce sont des profils qui ne connaîtront pas le chômage. «Les entreprises du secteur des Tic s’arrachent les profils spécialisés dans leur domaine et nous observons une réelle pénurie de compétences à Maurice dans ce secteur. C’est une problématique qui peut grandement freiner la croissance des entreprises du secteur des Tic à Maurice, mais plus largement la compétitivité de Maurice sur le plan international.» La réalité est que les établissements d’enseignement supérieur à Maurice ne produisent aujourd’hui à la fois pas suffisamment de diplômés de haut niveau nécessaires pour propulser son développement technologique, mais également pas la bonne combinaison de compétences pour permettre à Maurice de devenir une économie à revenu élevé, axée sur la technologie et l’innovation.

D’un autre côté, on entend de plus en plus parler non pas de candidat ou d’employé, mais surtout de talent. Comme le fait ressortir Marine Biarnes, aujourd’hui ce n’est plus seulement un bagage technique qui va intéresser une entreprise. «On dit souvent chez MeetYourJob qu’on ne fait pas matcher un CV avec une fiche de poste, mais un humain avec un humain. Un talent, c’est une combinaison d’expertise technique et de qualités comportementales.» Sauf qu’en sortant des études, surtout si le cursus choisi ne permet pas l’apprentissage en entreprise (via le stage ou l’alternance), les compétences techniques sont encore très théoriques. Ce sont les qualités interpersonnelles qui vont donc primer : la communication, le team spirit, la curiosité d’esprit, la volonté, la conscience professionnelle, qui sont autant de qualités que les recruteurs confient avoir des difficultés à trouver. C’est pour cette raison qu’on parle de talents, car la capacité de se démarquer en entreprise est bien loin de se limiter aux diplômes accumulés.

«Avoir fait des études signifie une certaine capacité d’apprendre mais plus loin, des valeurs et qualités définissent le savoir-être des personnes. On définit la compétence déjà comme une combinaison des savoirs, du savoir-faire et du savoir-être. Ce qui compte et rend intéressants les profils, c’est leur curiosité et leur persévérance, leur degré d’autonomie, leur communication, leur capacité à travailler en équipe. Le talent est donc évalué en fonction de toutes ces compétences réunies. La plupart du temps, les entreprises se basent sur le savoir-être comme base pour construire le plan de carrière des profils choisis ou recrutés. Et cela prend certainement le dessus sur les diplômes dans la plupart des cas», ajoute Melissa Prosper-Nourdine.

 

“Les métiers liés à l’informatique et au data représentent un vivier d’embauche indéniable”

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