Business Magazine

Avinash Goburdhun: «Nous habillons José Mourinho»

u003cpu003eu003cstrongu003eOpérant dans le segment du luxe, Wensum, anciennement Corona Clothing, est reconnue pour son savoir-faire en Europe et en Asie. Lu0026rsquo;entreprise habille du0026rsquo;ailleurs des personnalités. Toutefois, son Executive Director déplore que certaines contraintes concernant le recrutement de la main-du0026rsquo;œuvre étrangère pourraient contribuer à rendre le textile mauricien moins compétitif.u003c/strongu003eu003c/pu003eu003cp style=margin-left:14.0pt;\u003eu003cstrongu003eu003cspan style=color:#b22222;\u003eBUSINESSMAG.u003c/spanu003e Wensum est lu0026rsquo;un des rares opérateurs du textile à Maurice à évoluer dans le créneau du luxe. Comment se portent vos activités ?u003c/strongu003eu003c/pu003eu003cpu003eÀ lu0026rsquo;époque, Corona Clothing se spécialisait dans la confection de costumes de luxe. Aujourdu0026rsquo;hui encore, sous Wensum, nous nous spécialisons dans cette gamme. À ce jour, nous comptons un effectif de 500 employés, dont 340 Mauriciens. Nous sommes lu0026rsquo;une des rares usines de textile à Maurice à employer majoritairement des Mauriciens, dont la plupart sont des femmes. Nous comptons une cinquantaine du0026rsquo;expatriés, provenant principalement de Madagascar, de lu0026rsquo;Inde et de la Chine. Notre bureau de vente et du0026rsquo;emmagasinage est basé en Angleterre et emploie une quarantaine de personnes.u003c/pu003eu003cpu003eWensum brasse aujourdu0026rsquo;hui un chiffre du0026rsquo;affaires de Rs 1 milliard. Nous exportons sur lu0026rsquo;Angleterre, à destination du0026rsquo;une clientèle haut de gamme, soit pour de prestigieuses marques vestimentaires. En France, nos produits sont disponibles à Saint Villeron. Nous touchons également la Hollande, le Japon et lu0026rsquo;Australie. Depuis lu0026rsquo;année dernière, nous exportons sur lu0026rsquo;Asie, soit en Chine, à Hong Kong, Singapour et Taïwan. Il faut dire que la demande pour les produits haut de gamme sur le marché asiatique ne cesse du0026rsquo;augmenter. Notre objectif est du0026rsquo;exporter pour une valeur de USD 6 millions.u003c/pu003eu003cpu003eJe dois préciser que 30 % de notre production est dans du sur-mesure. Cu0026rsquo;est un segment en pleine croissance dans le monde. Ainsi, sur les 65 000 costumes que nous exportons sur lu0026rsquo;année, 80 % sont de petites commandes de 10-20 pièces ou de 50-100 pièces. Nous confectionnons également des costumes pour deux équipes anglaises de football : Chelsea et Manchester City. Ainsi que pour lu0026rsquo;équipe anglaise de rugby (The UK Rugby team). Nous habillons des personnalités à lu0026rsquo;instar de José Mourinho. Nous avons récemment confectionné des costumes pour lu0026rsquo;acteur Robert Downey Jr. Plus encore, nos vestes sont vendues chez les tailleurs les plus chics du monde pour 1 000 à 2 000 livres sterling. Nous sommes dans le très haut de gamme. Nos produits sont minutieusement travaillés à la main. Notre force réside dans notre main-du0026rsquo;œuvre composée pour la plupart de tailleurs aguerris.u003c/pu003eu003cpu003ePour cette année, notre carnet de commandes est rempli sur les marchés anglais, français et asiatique.u003c/pu003eu003cp style=margin-left:14.0pt;\u003eu003cstrongu003eu003cspan style=color:#b22222;\u003eBUSINESSMAG. u003c/spanu003eLe textile mauricien fait face à des contraintes multiples qui minent sa compétitivité. Certains avancent que le modèle sur lequel il opère est désuet. Votre avis ? u003c/strongu003eu003c/pu003eu003cpu003eIl est vrai que le secteur fait face à de nombreuses contraintes. Du0026rsquo;abord, nous sommes obligés de respecter les réglementations du ministère du Travail. Par exemple, une réglementation adoptée récemment stipule que les employés étrangers qui comptent huit ans de service à Maurice doivent partir. À Wensum, nous avons 22 travailleurs étrangers ayant plus de huit ans de service. Ce sont principalement des Malgaches. Il faut savoir que le textile est un métier qui su0026rsquo;apprend petit à petit, au fil des années. Ainsi remplacer un travailleur étranger déjà formé peut su0026rsquo;avérer ardu. Cu0026rsquo;est tout recommencer à zéro. Il faut initier lu0026rsquo;employé aux différentes techniques de couture, au maniement des machines, entre autres.u003c/pu003eu003cpu003eNous avons des machines très sophistiquées importées du0026rsquo;Allemagne dans lesquelles nous investissons énormément. De plus, nous manipulons les étoffes les plus raffinées, mais aussi les plus coûteuses dont la soie, la viscose, le lin et la laine. Il faut posséder une bonne technique pour pouvoir travailler ces matières.u003c/pu003eu003cpu003eSi Wensum doit se défaire de ses travailleurs étrangers, elle risque de su0026rsquo;effondrer. Les emplois de ces 80 % de Mauriciens que nous employons sont tributaires de ces travailleurs étrangers. Nous avons envoyé une lettre au ministère du Travail pour demander une dérogation sur ces huit ans et quu0026rsquo;on nous accorde une extension de trois ans.u003c/pu003eu003cpu003eAinsi, si le gouvernement veut conserver un espace manufacturier, il est impératif que les usines de textile mauriciennes disposent et puissent engager de la main-du0026rsquo;œuvre étrangère. Toute la stratégie de développement et du0026rsquo;expansion dans ce secteur est tributaire de cette main-du0026rsquo;œuvre étrangère.u003c/pu003eu003cpu003ePourquoi ? Pour la simple et bonne raison que les Mauriciens ne sont plus intéressés à travailler dans le textile. Chez Wensum, nous avons à plusieurs reprises lancé des offres du0026rsquo;emplois dans les médias. Mais ce métier nu0026rsquo;attire plus les Mauriciens. Lu0026rsquo;État veut quu0026rsquo;on engage plus de Mauriciens. Nous nu0026rsquo;y sommes pas contre, mais ils ne sont pas intéressés. On pourrait recruter des Mauriciens pour faire du merchandising et du contrôle de qualité. Pour lu0026rsquo;instant, nous avons une personne qui travaille simultanément sur trois machines et cela impacte directement sur la production.u003c/pu003eu003cpu003eConcernant les gros opérateurs, à lu0026rsquo;instar de CIEL, Compagnie Mauricienne de Textile (CMT) et Tang Knitwear, ils réalisent une très bonne performance. Néanmoins, il est du devoir des décideurs de créer des conditions souples et flexibles pour que cette industrie progresse davantage. Nous ne pouvons plus continuer à attendre trois mois pour obtenir un permis de travail. Bien souvent, au moment où ce permis est délivré, le travailleur étranger a déjà pris un autre emploi. On doit alors tout recommencer et renégocier pour faire venir un autre travailleur.u003c/pu003eu003cpu003eCu0026rsquo;est bien de faire de beaux discours politiques ! Mais ju0026rsquo;aurais aimé que le gouvernement soit plus réaliste.u003c/pu003eu003cp style=margin-left:14.0pt;\u003eu003cstrongu003eu003cspan style=color:#b22222;\u003eBUSINESSMAG.u003c/spanu003e En raison de la problématique autour de la main-du0026rsquo;œuvre étrangère, la CMT avait menacé de délocaliser ses usines sur la Grande île, mais elle su0026rsquo;est rétractée suite à un arrangement avec le ministère du Travail. Si la situation persiste, Wensum pourrait-elle envisager la délocalisation?u003c/strongu003eu003c/pu003eu003cpu003eBien sûr que nous pourrions envisager la délocalisation. Nous avons besoin de survivre, de respecter nos commandes, de satisfaire nos clients. Mais nous opérons dans le segment du luxe et, malgré le large bassin de main-du0026rsquo;œuvre à Madagascar, nous ne pouvons pas délocaliser nos activités là-bas. Car nous ne pouvons pas vendre un produit de luxe u0026lsquo;Made in Madagascaru0026rsquo; ; nous ne trouverons pas du0026rsquo;acheteurs. Madagascar ne su0026rsquo;est pas encore bâti une réputation dans ce segment sur lu0026rsquo;échiquier mondial. Si nous devons délocaliser nos activités, ce sera en Europe de lu0026rsquo;Est.u003c/pu003eu003cp style=margin-left:14.0pt;\u003eu003cstrongu003eu003cspan style=color:#b22222;\u003eBUSINESSMAG.u003c/spanu003e Ashit Gungah, le ministre de lu0026rsquo;Industrie et du commerce, a laissé entendre que le secteur du textile et de lu0026rsquo;habillement bénéficiera du0026rsquo;une attention particulière des autoritésu0026hellip;u003c/strongu003eu003c/pu003eu003cpu003eComment ? En développant des structures industrielles ? Lu0026rsquo;infrastructure industrielle est déjà présente à Maurice par le biais de tous ces bâtiments que la MEDIA (Mauritius Export Development and Investment Authority) u0026ndash; aujourdu0026rsquo;hui remplacée par le Board of Investment u0026ndash; avait mis en place dans les années 80-90. Nous disposions déjà de ces structures qui auraient pu être utilisées par les grandes et petites usines de textile. Je cite lu0026rsquo;exemple des bâtiments industriels à Coromandel qui, à la base, ont été conçus pour le textile. Ils ont été reconvertis en stores et en dortoirs. Et cela dans les quatre coins de lu0026rsquo;île. Encore une fois, il faudrait que le gouvernement soit plus réaliste et plus à lu0026rsquo;écoute des besoins des opérateurs de ce secteur.u003c/pu003eu003cpu003eJu0026rsquo;en profite pour attirer lu0026rsquo;attention sur le fait que les produits de Wensum sont frappés par 45 % de droits de douane en Afrique du Sud parce que nos tissus ne proviennent pas de la SADC. Or, il nu0026rsquo;y a pas du0026rsquo;usine de tissage de tissu de costume dans cette zone. Quel paradoxe ! Mais nous exportons toujours. Nous avons des clients en Afrique du Sud qui payent le droit de douane de 45 %.u003c/pu003eu003cp style=margin-left:14.0pt;\u003eu003cstrongu003eu003cspan style=color:#b22222;\u003eBUSINESSMAG.u003c/spanu003e Vous conviendrez que le couloir aérien Changi-Plaisance devrait être bénéfique au secteur de lu0026rsquo;exportationu0026hellip;u003c/strongu003eu003c/pu003eu003cpu003eAu niveau du fret, 95 % de nos exportations se font par voie aérienne par le biais du0026rsquo;Air Mauritius. Il est vrai que le couloir Changi-Plaisance nous est bénéfique, surtout pour nos exportations en Chine. Nous en tirons déjà avantage. Il faut savoir quu0026rsquo;auparavant, nous exportions en Chine via Turkish Airlines sur la ligne Istanbul-Changi à cause du prix. Mais, aujourdu0026rsquo;hui, nous avons proposé à nos clients cette formule et exportons directement via ce couloir, que ce soit à Hong Kong, Singapour ou Taïwan.u003c/pu003eu003cp style=margin-left:14.0pt;\u003eu003cstrongu003eu003cspan style=color:#b22222;\u003eBUSINESSMAG.u003c/spanu003e Selon le président de la MEXA, Yogesh Singh, le textile su0026rsquo;affaiblit. Pour rendre ce secteur plus compétitif à lu0026rsquo;international, lu0026rsquo;une des solutions serait quu0026rsquo;il utilise le label u0026lsquo;Made in Morisu0026rsquo;. Vos commentaires ?u003c/strongu003eu003c/pu003eu003cpu003eLe secteur du textile et de lu0026rsquo;habillement est en retard dans ce que nous appelons le u0026laquo;design and stylingu0026raquo;. Je vais être franc : le Fashion and Design Institute est un véritable désastre. Lu0026rsquo;intention était bonne, mais lu0026rsquo;objectif final, qui est de créer un bassin de créateurs mauriciens pour le textile mauricien, nu0026rsquo;a jamais été atteint. Il nu0026rsquo;existe pas de créativité mauricienne. Nous copions et reproduisons ce que nos clients-acheteurs nous demandent de faire. Mais, bien sûr, il nous faut aussi une capacité de product development. Autrement dit, nous devons proposer à nos clients des produits originaux avec des coupes et des designs originaux. Cela dans le but de nous démarquer de nos compétiteurs. Certaines entreprises le font. Je pense à Floréal Knitwear et CIEL car elles sont très exposées à lu0026rsquo;international.u003c/pu003eu003cpu003eLe label de u0026lsquo;Made in Morisu0026rsquo; est synonyme du0026rsquo;un produit fait localement et de qualité. Comment porter ce label quand nous copions et reproduisons les coupes et les styles de ce qui est fait à lu0026rsquo;étranger ? Le textile mauricien manque cruellement de créativité.u003c/pu003eu003cp style=margin-left:14.0pt;\u003eu003cstrongu003eu003cspan style=color:#b22222;\u003eBUSINESSMAG.u003c/spanu003e Dans quelle mesure le Vietnam constitue-t-il une menace pour le textile mauricien ?u003c/strongu003eu003c/pu003eu003cpu003eLe Vietnam est notre compétiteur sur le marché américain du0026rsquo;autant plus que Barack Obama semble être en faveur du Trans-Pacific Partnership. Mais dans le segment du textile de luxe, nos concurrents demeurent principalement le Portugal et lu0026rsquo;Italie, où la demande pour le sur-mesure augmente. Cu0026rsquo;est pour cela que nous investissons massivement dans nos machines et offrons de la formation à nos employés pour quu0026rsquo;ils puissent les manier. Je dois saluer le gouvernement, notamment, qui rembourse les entreprises offrant de la formation à travers le Human Resources Development Council.u003c/pu003eu003cpu003eAu niveau de Wensum, nous ne sommes pas dans une logique de production de masse. Sinon, à cause du Vietnam, nous aurions déjà mis la clef sous la porte.u003c/pu003eu003cp style=margin-left:14.0pt;\u003eu003cstrongu003eu003cspan style=color:#b22222;\u003eBUSINESSMAG. u003c/spanu003eVous disiez plus tôt que Wensum demeure ouverte aux opportunités qui se présentent dans le créneau du luxe. Lu0026rsquo;Afrique est-elle dans votre viseur ?u003c/strongu003eu003c/pu003eu003cpu003eNous sommes déjà présents sur le continent africain. Notre marché prioritaire en Afrique est lu0026rsquo;Afrique du Sud. Car les Africains voyagent beaucoup en Afrique du Sud pour faire du shopping. Cependant, pour les PME évoluant dans le textile, lu0026rsquo;Afrique représente un gros marché. Les PME doivent prospecter des pays à fort potentiel comme le Kenya, lu0026rsquo;Ouganda, la Tanzanie, lu0026rsquo;Éthiopie et le Botswana. Mais aussi le Swaziland qui est connu pour sa production de tee-shirts, de chemises et de jeans. Et maintenant, grâce au couloir Changi-Plaisance, il y a des vols directs.u003c/pu003eu003cpu003eMais, après lu0026rsquo;Asie, nous comptons cibler le marché américain pour le sur-mesure. À ce jour, les États-Unis demeurent le plus gros marché à toucher. On nu0026rsquo;a pas encore exporté sur ce marché car nous nu0026rsquo;étions pas prêts en termes de capacité. Notre projet du0026rsquo;expansion consiste à augmenter la capacité de lu0026rsquo;usine à 7 000 pièces additionnelles, lesquelles sont destinées au marché américain. Lu0026rsquo;on a noté un intérêt pour les marques vestimentaires américaines comme Brooks Brothers et Neiman Marcus pour le sur-mesure. Nous envisageons de démarrer lu0026rsquo;exportation sur le marché américain au dernier trimestre de 2016.u003c/pu003eu003cp style=margin-left:14.0pt;\u003eu003cstrongu003eu003cspan style=color:#b22222;\u003eBUSINESSMAG. u003c/spanu003eMaurice devra inévitablement su0026rsquo;appuyer sur une base industrielle forte pour passer à un nouveau stade de son développement. Cela dit, le textile a-t-il les moyens de demeurer un pilier de lu0026rsquo;économie mauricienne ?u003c/strongu003eu003c/pu003eu003cpu003eJe pense que oui. Mais il nous faut le support des décideurs politiques. Je reviens sur la problématique de main-du0026rsquo;œuvre qualifiée. La force de ce secteur demeure le savoir-faire des gens. Cu0026rsquo;est ce qui nous permettra du0026rsquo;être compétitifs face aux autres pays. Mais sa survie dépend de sa capacité à monter en gamme. Dans le segment des produits basiques, nous ne sommes plus compétitifs.u003c/pu003eu003cpu003eMême su0026rsquo;ils sont exportés en hors taxes, les produits de textile mauriciens sont plus chers que ceux de lu0026rsquo;Inde. Ce nu0026rsquo;est plus un segment où le textile mauricien peut se démarquer et être compétitif. Nous avons trop de concurrents dans cette gamme. Et si le TPP est approuvé, nous ne serons pas de taille face au Vietnam. Il est impératif de monter en gamme avec des produits high-end, de nouvelles technologies et des personnes plus compétentes.u003c/pu003eu003cp style=margin-left:14.0pt;\u003eu003cstrongu003eu003cspan style=color:#b22222;\u003eBUSINESSMAG.u003c/spanu003e Quid du marché local ?u003c/strongu003eu003c/pu003eu003cpu003eOn aurait aimé offrir nos produits de luxe aux entreprises mauriciennes. Mais il nu0026rsquo;y a pas de demande en ce sens.u003c/pu003eu003cp style=margin-left:14.0pt;\u003eu003cstrongu003eu003cspan style=color:#b22222;\u003eBUSINESSMAG. u003c/spanu003ePourquoi ?u003c/strongu003eu003c/pu003eu003cpu003eCu0026rsquo;est de lu0026rsquo;ignorance ! Je vous donne un exemple. Nous confectionnons des uniformes pour Air Seychelles. Qatar Airways nous a aussi approchés, mais pas Air Mauritius. Nous avons personnellement approché la compagnie aérienne nationale, mais notre offre a été déclinée. Au bout du compte, nous ne sommes pas les perdants.u003c/pu003e

Exit mobile version