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Pascal Tsin : «Le consommateur a repris le pouvoir»

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Pascal Tsin : «Le consommateur a repris le pouvoir» | business-magazine.mu

Tout a commencé avec la boutique Raquette en 1935. Comment ce petit commerce familial est-il devenu Super U ?

En 1935, Antoine Tsia Lip Ken, mon grand-père a su, par son dur labeur et ses efforts incessants, économiser sou par sou avant de se mettre à son propre compte. Il ouvre sa première boutique sous l’enseigne Boutique Raquette à Grand-Baie. Quelques années plus tard, il loue un terrain à l’angle routes côtière et de La Salette et construit de ses propres mains son second commerce, Grand Bay Store, qu’il ouvre en 1950. Neuf ans plus tard, il achète le terrain d’en face de la Compagnie sucrière de Saint Antoine pour Rs 20 000 et fait construire l’actuel Grand Bay Store qu’il ouvre en 1960.

Mon père, Laurent Tsin Sa Ah Vi, gère la boutique jusqu’à sa mort soudaine en 1972, alors que mon frère, ma sœur et moi étions en bas âge. Ma mère se retrouve seule à gérer la boutique qui à l’époque était assez fermée aux femmes. Après mes études universitaires d’ingénierie et un bref passage professionnel en Afrique du Sud, je retourne au pays en mars 1985 pour prêter main-forte au commerce familial.

De 1985 à 1995, nous étions en perpétuel agrandissement et construction sans jamais fermer un seul jour la boutique. Nous étions arrivés au point que nous ne pouvions plus nous agrandir car il n’y avait plus de terrain disponible. Toujours dans le souci de servir au mieux la clientèle, nous n’avons pas hésité à acheter en 1996, quand l’occasion s’est présentée, un terrain de trois arpents situé à quelques dizaines de mètres de l’arrière de Grand Bay Store. Comme j’ai voulu faire un commerce d’un type nouveau, je me suis mis à chercher une enseigne française car, à mon humble avis, la grande distribution française, c’est celle qui s’exporte le mieux.

Quand j’ai su que René Diaz, le président de la Centrale Régionale Système U Sud à l’époque, venait à La Réunion, je suis allé à sa rencontre et lui ai présenté mon projet de nouveau supermarché avec sa galerie marchande à l’étage. Il m’a dit qu’il faut que le magasin soit de plain-pied pour être conforme au schéma commercial de Super U. De retour à Maurice, j’ai acheté le restant d’un ensemble de terrains d’environ seize arpents. C’était en 1998. J’ai refait le projet qui est validé par la Centrale Régionale Système U Sud. Nous avons inauguré le premier Super U à Grand-Baie le 29 juin 2000 – suivant un investissement d’environ Rs 100 millions – et c’est à partir de là que commence l’aventure Super U. À partir de là, il y avait tout un savoir-faire qu’il fallait acquérir.

À l’époque, nous avions fait venir un directeur de magasin et des chefs de département. Évidemment, au départ, ce n’était pas facile, car nous sortions d’un cadre familial pour pénétrer un cadre professionnel. Il fallait se mettre en retrait pour laisser travailler les autres. Nous avons également dû adapter le modèle ici car on ne peut venir copiercoller ; cela ne marche pas !

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Actuellement, votre équipe est-elle mauricienne ? Ou avez-vous recours à de la main-d’œuvre étrangère, comme c’est le cas pour beaucoup d’enseignes dans le secteur ? La main-d’œuvre mauricienne boude-t-elle la grande distribution ? Notre équipe est à 100 % mauricienne. Toutefois, je note un problème de génération ; les jeunes aujourd’hui veulent plus de temps libre. Tous les secteurs confondus de l’économie locale sont touchés par le problème de main-d’œuvre. Il ne faut pas se voiler la face : c’est un sérieux problème qui affecte nos différentes opérations au quotidien. Je pense que les pouvoirs publics doivent se pencher dessus car cela va causer un gros problème après au niveau social ainsi qu’au niveau économique. À titre d’exemple, nous faisons face à un gros problème à notre magasin de Grand-Baie. Depuis le début de l’année, nous recrutons difficilement. Cela affecte le passage en caisse et le service en général.

Pour en revenir à la main d’œuvre étrangère, certaines industries, telles que le textile ou encore la construction, n’existeraient pas s’il n’y avait pas de travailleurs étrangers. Ce n’est pas un phénomène unique à Maurice ; le phénomène est mondial. En France, aux États-Unis et même à Singapour, ils font de nouveau appel à des personnes âgées pour travailler, par exemple, dans les chaînes de restauration rapide et souvent même dans les usines.

Grand-Baie, Flacq, Belle-Rose, Tamarin et bientôt Trianon. Quelle est la stratégie derrière cette expansion ?

Le terrain estil fertile pour une plus grande expansion à travers l’île ? Super U a l’ambition de faire les choses autrement et nous allons continuer à tout mettre en œuvre pour être encore plus proches de nos clients-consommateurs. Nous avons foi en notre pays et en sa jeunesse ; et cela nous a toujours permis de considérer la politique dans son sens noble. Nous avons, depuis notre existence, pu évoluer et développer davantage nos affaires grâce à la vision de tout un chacun, sans exception aucune. L’adaptation est dans mon ADN, peu importe les difficultés ; je tiens cela de ma mère – et je profite pour lui rendre hommage – et j’en suis fier.

Si tout se passe bien, nous pensons ouvrir à Tamarin fin 2020. Les travaux ont débuté en juillet dernier. Nous sommes propriétaires du terrain et nous développons le centre commercial. L’investissement est de Rs 1,2 milliard et le magasin fera 4 000 mètres carrés. Le magasin de Grand-Baie fait 7 100 mètres carrés, celui de Flacq 4 000 et celui de Belle-Rose 2 500. Il faut savoir que nous avons séparé la société immobilière de la société qui opère le magasin. Super U est locataire, comme tous les autres locataires, dans nos centres commerciaux. Nous serons aussi à Trianon, dans ➲ le projet Hermès.

En attendant l’ouverture de l’hypermarché à Tamarin, vous avez ouvert un U Express. Estce un modèle qui sera répliqué ailleurs dans l’île ?

Quand Shoprite est parti, le groupe Trimetys nous a demandé d’ouvrir un magasin. Ce n’était pas dans nos plans, mais nous avons collaboré pour ouvrir U Express. Mais ce n’est pas vraiment notre champ d’action car nous préférons nous concentrer sur les grands magasins. Nous avons noté que nous passons autant de temps à gérer un petit magasin qu’un grand magasin. Il y a certes un marché pour les petits magasins, mais nous avons fait le choix d’aller vers les grands.

Super U sera un ‘anchor tenant’ dans le projet Hermès à Trianon. Comptez-vous fermer le magasin de Belle-Rose ?

Pas de tout ! Ce ne sera pas le même type de magasin ; celui de Belle-Rose est un magasin de proximité. Nous avons une population assez importante autour du magasin de Belle-Rose. Tandis qu’à Trianon, ce sera un magasin d’attraction. Le business model y sera un peu différent. Là-bas, nous ne sommes pas le promoteur mais qu’un locataire, et l’investissement va être surtout au niveau des équipements pour le magasin. Celuici tournera entre Rs 400 et Rs 500 millions pour une superficie de 7 000 mètres carrés.

Avec un chiffre d’affaires de Rs 4,9 milliards, votre classement en 27e position dans le Top 100 Companies est resté inchangé. Êtes-vous satisfait de votre performance financière ?

“There is always room for improvement”, comme dit l’Anglais. Comme nous évoluons dans un secteur hautement compétitif, nous ne pouvons dormir sur nos lauriers. Nous devons toujours nous surpasser afin de continuellement répondre aux attentes de notre clientèle. Faire encore mieux est aussi notre devise, malgré les difficultés opérationnelles que nous rencontrons quotidiennement telles que le manque de ponctualité, les absences, le manque de personnel, les problèmes de livraison des fournisseurs, etc. Il y a un manque évident de rigueur et de culte de l’effort à tous les niveaux. J’en profite pour alerter les pouvoirs publics et la société civile de ces problématiques car l’heure est grave et risque d’entraver, à terme, les ambitions qu’ils se sont fixé pour le pays, que ce soit sur le plan économique ou social.

Vous faites référence au paysage hautement concurrentiel de ce secteur. Mais comment se démarquer dans un tel environnement ?

Il y a un ensemble d’éléments qui fait que les clients choisissent Super U pour faire leurs emplettes : le parking, le prix, le service, l’accueil, le choix, le confort d’achat, l’hygiène et la propreté. Tous les jours, nous nous remettons en question et menons une bataille inlassable pour maintenir le niveau et continuer de nous surpasser. Nous avons deux campagnes de promotion par mois, toujours avec des produits basiques. Ce qui fait que le client-consommateur n’a pas à attendre la fin du mois, quand il y a la grosse affluence, pour faire ses emplettes. Nous offrons aussi un produit phare aux clients de temps en temps à partir d’un certain montant d’achats.

Les clients U achètent quoi ? Que viennent-ils chercher chez vous qu’ils ne retrouvent pas ailleurs ?

Il y a un ensemble d’éléments qui fait que quand le client vient chez nous pour la première fois, il a tendance à retourner. Il est important de rappeler que l’enseigne Super U est, à Maurice, géré par les Mauriciens pour les Mauriciens. Il est présent sur le territoire depuis plus de 19 ans et s’est bien intégré à la vie des Mauriciens. Nous touchons donc toutes les couches sociales de la population et l’offre produits de chaque magasin s’adapte à la typologie des clients de chaque localité. Nos magasins sont des lieux de vie et doivent le devenir encore plus. Ils doivent être au cœur de l’écosystème local. Nous sommes toujours partie prenante de la vie locale afin de satisfaire efficacement les attentes de nos clients qui, à leur tour, deviennent attentifs à l’empreinte de l’entreprise dans son environnement au sens large.

Que pouvons-nous attendre de votre partenariat avec Carrefour ? Sera-t-il bénéfique aux Mauriciens ?

En France, on parle beaucoup de pouvoir d’achat. Pour pouvoir mieux négocier auprès des fournisseurs, il faut avoir un certain volume. Notre structure d’achat commune avec Carrefour, la centrale d’achat Envergure, est opérationnelle depuis octobre 2018. Dans un contexte de compétitivité renforcée sur le terrain en France, c’était essentiel de trouver un partenaire solide pour massifier les achats de produits de grandes marques pour rester au cœur du discount. Malheureusement, certaines contraintes légales – applicables à l’île Maurice – ne nous permettent pas d’exploiter pleinement cette opportunité et de faire profiter aux consommateurs mauriciens des prix encore plus bas.

Sommes-nous arrivés à un stade où les enseignes jouent sur le prix au détriment de la qualité ?

Nous pouvons certainement concilier les deux. D’ailleurs, chez nous, on trouvera toujours les bons produits en promotion. Super U est connu pour offrir à ses clients des produits de qualité. Le secteur est hautement compétitif et quand toutes les enseignes sortent leurs brochures, le client a le choix. Nous ne pouvons jouer sur la qualité car, au final, ce sont les mêmes fournisseurs. Toutefois, les promotions diffèrent selon les enseignes.

Que fait Super U pour apporter sa pierre à l’édifice dans la protection de l’environnement ?

La devise Commerçants autrement se vit au quotidien chez nous. En fait, nos valeurs sont celles du commerçant indépendant ajoutées à celles de la coopérative : rester proches de nos clients et du territoire, demeurer le leader en prix sur notre zone, être passionnés par notre métier et fiers de nos produits et services. Nous nous attelons aussi à jouer le rôle de développeur de notre équipe en adoptant une approche solidaire et responsable. Comme entrepreneurs audacieux, nous voulons être performants et optimistes, tout en nous impliquant dans la vie collective.

Comme vous le savez, sans doute, nous sommes très engagés dans le social et dans la protection de l’environnement. À Flacq, avec notre ferme photovoltaïque, nous avons joué un rôle de pionnier dans le domaine des énergies renouvelables. Nous mettons aussi l’accent sur le développement durable du pays en promouvant l’éclairage en LED, le traitement des eaux usées, l’utilisation de sacs en toile qui sont réutilisables pour les rayons fruits et légumes, le tri des déchets, le compactage de cartons. Par ailleurs, nous nous sommes fixé comme mission verte d’optimiser le tri sélectif avec les poubelles adaptées et, de concert avec nos partenaires et nos clients, de collecter les huiles usées qui font un tort immense à notre sol car elles sont, dans la plupart du temps, disposées n’importe comment, n’importe où.

Flacq Cœur de Ville est le projet le plus abouti en termes de développement durable. Dès la conception du projet, j’ai voulu en faire un bâtiment qui consomme le moins d’énergie possible. Par exemple, la toiture est en tôle isolée ; ce sont des panneaux en polyuréthane placés entre deux feuilles de tôle. Quand la température est de 35°C à l’extérieur, l’intérieur affiche 25°C. En conséquence, nous avons besoin de moins d’énergie pour climatiser le magasin.

À Flacq, nous avons une ferme photovoltaïque de 10 000 mètres carrés sur la toiture ; c’est la plus grande ferme photovoltaïque sur toiture. Nous produisons aujourd’hui le tiers de notre consommation totale en énergie. Nous produisons seulement quand il y a le soleil et quand ce n’est pas le cas, nous sommes obligés de basculer sur le réseau. Nous avons également investi dans deux centrales de climatisation : une qui produit et climatise le centre et l’autre qui produit et stocke le froid. Le froid, une fois produit, est emmagasiné dans des bulles et est stocké dans des cuves isothermes. À la tombée de la nuit, quand nous ne produisons plus d’énergie photovoltaïque, tout le froid emmagasiné dans les bulles est relâché dans le système de refroidissement. Notre système de climatisation n’est jamais éteint !

L’eau usée est également recyclée. Au quotidien, nous traitons 50 mètres cubes d’eau. Mensuellement, cela nous fait 1 500 mètres cubes et, annuellement, cela nous fait 18 000 mètres cubes. C’est de l’eau économisée qui n’est pas obtenue de la CWA. Toute la partie verte à Flacq nous a coûté Rs 220 millions supplémentaires.

La bataille écologique a un prix. Au final, ce n’est pas le consommateur qui passe à la caisse ?

Pas du tout ! Impossible ! C’est une volonté de ma part pour aller en ce sens. Car en tant qu’entrepreneur responsable, nous avons un rôle à jouer pour la future génération.

N’est-il pas grand temps pour une meilleure réglementation dans le secteur pour prévenir la trop grande banalisation des centres commerciaux ?

Je penche plutôt pour une autorégulation car vous ne pouvez pas empêcher le développement d’un pays. De toute façon, trouver un bon emplacement pour faire un centre commercial va devenir de plus en plus difficile.

Mais y a-t-il toujours de la place pour d’autres enseignes ?

Toute nouvelle enseigne concurrente incite une remise en question, et c’est tant mieux pour nous. Cependant, cela veut aussi dire qu’on agrandit le réservoir sans, en contrepartie, l’alimenter davantage en eau. Comme le nombre de consommateurs et leur pouvoir d’achat sont des facteurs statiques, les petits poissons risquent de périr au sein du réservoir asséché. Le paradoxe, c’est qu’il faut encourager la concurrence – aussi longtemps qu’elle soit saine – et, en même temps, s’assurer que les petits commerçants y trouvent également leur compte. Ce n’est pas toujours évident de trouver le juste équilibre ; in fine, le dernier mot revient toujours aux consommateurs, qui restent les maîtres du jeu.

On parle de monopole d’une enseigne dans le secteur de la grande distribution à Maurice. Êtes-vous de cet avis ?

Cela fausse le jeu de la concurrence quand/si vous contrôlez l’amont. Vous pouvez faire la pluie et le beau temps au détriment des consommateurs. Ce qui est contraire à notre devise de nous rapprocher de ceux-ci. Vous avez tendance à favoriser votre entreprise.

Selon vos observations, comment a évolué le pouvoir d’achat des Mauriciens et comment a aussi évolué leur comportement en matière de consommation ?

Le niveau de vie des Mauriciens a indéniablement progressé depuis que le pays est indépendant. Aujourd’hui, le revenu par tête d’habitant avoisine les USD 10 000 et le Mauricien peut s’offrir des biens qui étaient considérés auparavant comme étant un luxe. Cependant, il y a une catégorie de clients qui sont toujours très sensibles au prix. D’ailleurs, nous observons qu’ils ne sont plus fidèles à une marque de produit en particulier mais qu’ils achètent toujours la marque qui est en promotion. Ils changent leur comportement d’achat par rapport aux promotions et sont très sensibles au prix.

Notre structure fiscale favorise-t-elle la consommation ?

On peut se vanter que notre système fiscal fait des envieux et la preuve est qu’il attire pas mal d’étrangers vers notre juridiction. Il faut cependant s’assurer que tous les acteurs qui ont la responsabilité de le faire fonctionner arrivent à satisfaire les attentes de tout un chacun. Quant au secteur de la grande distribution, je pense que l’enlèvement de la TVA sur l’ensemble des produits alimentaires devrait encourager les Mauriciens à consommer des produits de qualité à de justes prix. Cela permettrait aussi de promouvoir le manger sain et le manger mieux, et d’avoir une population en bonne santé. Donc, moins de malades dans les hôpitaux et moins de dépenses pour l’État.

Nous parlons beaucoup de produits bio, équitables… Le commerce alimentaire se réinvente-t-il pour répondre aux exigences du consommateur ?

De nos jours, les clients sont plus informés à travers les réseaux sociaux et suivent les dernières tendances. Il y a une prise de conscience de la part des consommateurs, surtout les jeunes par rapport aux produits qu’ils consomment car ils sont plus soucieux de leur santé mais aussi de l’environnement. La terre est à bout de souffle. Nous consommons plus que la terre ne peut en produire. Les jeunes sont sensibles à la cruauté envers les animaux, au commerce équitable, etc. Ils sont prêts à modifier leur style de vie. C’est un marché en progression constante d’autant plus qu’aujourd’hui ce ne sont pas uniquement les gens qui ont les moyens qui achètent ces produits-là.

Chez U, nous avons fait le choix d’un parti pris fort depuis des années qui se révèle payant aujourd’hui : l’essentiel des produits frais U est labellisé Bleu Blanc Cœur. C’est un compromis parfait allant de la terre à l’alimentation, prenant en considération le bien-être animal, la qualité de l’alimentation animale, qui se retraduit dans la santé de ceux qui mangent ces produits. C’est donc un marché qui progresse très bien.

La grande distribution a entamé une période de renaissance, en particulier grâce au digital, en comprenant mieux le client, en particulière la jeune génération. Le modèle traditionnel de l’hypermarché est-il devenu obsolète ?

Ces dernières années, le consommateur a repris le pouvoir. Alors qu’il se satisfaisait d’un seul modèle, il fait désormais le choix de fréquenter d’autres circuits de distribution que la grande surface. Et il aspire à une offre renouvelée, avec le développement des produits frais traditionnels, des produits locaux et en circuits courts ou du bio.

C’est une tendance structurelle et non conjoncturelle qui rend impératif pour nous d’accompagner ce mouvement. De la même façon, je suis persuadé que l’e-commerce ne balaiera pas le supermarché à taille humaine de notre île. Car ces modèles de distribution sont complémentaires. Le numérique permet d’enrichir l’expérience de consommation : gagner du temps, procurer de la facilité, éclairer sur les choix. Mais le rayon physique du supermarché fera toujours la différence avec les algorithmes.

Mais cela implique que la diversité des formats doit faire écho à la diversité des attentes de nos clients. Voilà autant de notions qui nous renvoient à nos magasins. La société a besoin plus que jamais de lieux de vie conviviaux où on a du plaisir à se retrouver, à s’éloigner des écrans pour retrouver un vrai contact, de l’échange, du partage. C’est ce que nos clients font ces jours-ci en fréquentant nos commerces, à la recherche de produits de qualité, de bons conseils, de surprises au détour d’un rayon. Et il n’y a aucune raison que cela change radicalement, même si le magasin doit encore mieux concilier physique et digital.

Nous assistons depuis quelque temps à la mise en activité de plusieurs plateformes de supermarché en ligne au niveau local. À quand l’achat en ligne chez Super U ?

Nous n’allons pas réinventer la roue. Le modèle existe déjà en France. Nous attendons juste le bon moment pour lancer la vente en ligne.

L’Association of Mauritian Manufacturers (AMM) et Made in Moris se battent pour que les produits Made in Moris soient bien placés dans les supermarchés. Comment Super U met-il en avant la production locale ?

Quand vous analysez un Caddie de produits, plus de 75 % sont des produits locaux. Chez Super U, nous avons toujours pratiqué un commerce qui profite à tous. Nous considérons nos fournisseurs comme des partenaires et nous travaillons toujours dans un esprit gagnant-gagnant. D’ailleurs, chaque année, dans le cadre de la fête de l’Indépendance, nous mettons bien en avant les produits Made in Moris, qui sont vendus à des prix promotionnels.

Ce vendredi verra le lancement du livre de ‘Madame Laurent’ qui retrace le remarquable parcours de la matriarche qui a transformé un petit commerce familial en l’un des fleurons de la grande distribution à Maurice. En filigrane, l’ouvrage relate la croissance du groupe familial, dirigé aujourd’hui par Pascal Tsin, CEO.

«’De l’autre côté du comptoir’ se veut le récit biographique de l’itinéraire extraordinaire – à nos yeux partiaux d’enfants – de notre maman, Cécile Tsin Sa Ah Vi, une femme d’exception, d’action et de vision non seulement pour nous et nos familles respectives, mais aussi, avons nous par la suite en grandissant, pour la société dans son ensemble.

«Mais comment rendre hommage à une personne de son vivant, surtout à une personne à qui nous devons la vie, dans un monde où il est bien plus facile de parler de ceux qui nous ont quittés ? Nous avons alors pensé à cet ouvrage-hommage qui, au départ, était destiné aux seuls membres de la famille Tsin Sa Ah Vi par le biais d’une publication (très) restreinte.

«Par la suite, on s’est ravisé, après qu’un ami très cher – qui a suivi notre parcours atypique en tant que famille d’entrepreneurs – a su nous convaincre que le vécu de notre mère méritait d’être partagé au-delà du cercle familial. Sa vie, nous a-t-il persuadés, pouvait, humblement mais sincèrement, être l’une des sources d’inspiration pour les femmes en général, et les veuves en particulier, surtout celles aspirant à sortir des affres de la pauvreté. Afin que les enfants ne manquent de rien», font ressortir Patrick, Pascal et Geneviève, les trois enfants de ‘Madame Laurent’ qui concluent : «La transformation d’un petit business modeste à Grand-Baie en un des fleurons commerciaux implantés dans plusieurs parties du pays n’aurait jamais été possible et réalisable sans Cécile Tsin Sa Ah Vi. Merci ‘Madame Laurent’ ! Nous sommes tous les trois très fiers et privilégiés de pouvoir t’appeler Maman !»

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