Business Magazine

Présidentielle française : Comment elle impactera la relation France-Maurice

Fervent défenseur du libéralisme et d’une europe unie, Emmanuel Macron briguera pour un second mandat présidentiel. Le président français a la faveur des sondages et devrait logiquement se faire élire à l’issue du premier tour ce dimanche. Qui sera son adversaire au second tour le 24 avril ? Est-ce que ce sera marine le pen ? Ou encore l’un des trois outsiders : Jean-luc Mélenchon, Eric Zemmour ou Valérie Pécresse ? Étant donné ses relations privilégiées avec la France qui est l’un de ses principaux partenaires commerciaux, Maurice suit de près cette joute électorale. Gros plan sur les retombées politiques, économiques et culturelles pour l’Afrique et Maurice de ce qui pourrait être une nouvelle révolution à la française.

C’est dans un contexte marqué par une montée du nationalisme en Europe que se déroule l’élection présidentielle française. On en a eu la démonstration avec la réélection confortable de Viktor Orban, connu pour ses dérives totalitaires, en tant que Premier ministre de la Hongrie. Qu’en sera-t-il en France ? Qui passera le premier tour ce dimanche et aura la chance d’affronter selon toute vraisemblance Emmanuel Macron au second tour le 24 avril ? Les paris sont ouverts. À Maurice, cette élection présidentielle est suivie de près car la France reste l’un de nos principaux partenaires commerciaux. En 2021, nos exportations vers la France totalisaient Rs 5,9 milliards. Alors que nos importations de la France s’élevaient à Rs 14,2 milliards. L’Hexagone est également notre principal marché touristique, comptant pour près de 20 % des arrivées. Mais, selon les observateurs, le fait que Maurice se soit davantage tourné vers l’Inde et la Chine ces dernières années a quelque peu froissé les Français. À ce propos, le Dr Avinaash Munohur, politologue et Managing Director d’Arthésias Conseil, fait ressortir que «nous pouvons constater que ce froid s’est dissipé petit à petit tout au long du quinquennat d’Emmanuel Macron».

Ainsi, il insiste que la France reste un partenaire hautement stratégique pour l’économie mauricienne dans son ensemble, et pas uniquement pour le secteur touristique en étant notre marché numéro 1 en Europe. Rappelant que la France nous a soutenus de manière diplomatique réelle au niveau de l’Union européenne alors que nous étions sur la liste grise du Groupe d’action financière (GAFI) par le biais de «soutiens financiers au début de la pandémie liée à la Covid-19, ou encore à travers des aides en logistique pendant la marée noire du Wakashio», il constate que les Français ont été à nos côtés lorsque nous avons dû faire face à ces crises. Pour revenir à la joute présidentielle, la montée du nationalisme est devenue une évidence quand on voit que trois des candidats, à savoir Marine Le Pen, Éric Zemmour et Valérie Pécresse, épousent une idéologie de la droite dure, voire de l’extrême droite autant dans une philosophie économique incitant à un repli et à une forme de protectionnisme que par une volonté de durcir la politique migratoire. Il se dégage de plus en plus un courant de pensée selon lequel le nationalisme ouvertement affiché par le polémiste français servirait finalement à… Marine Le Pen. Le dernier sondage Ifop (réalisé dimanche dernier pour le compte du Journal du Dimanche) démontre un écart pour le moins serré entre Emmanuel Macron (27 %) et la présidente du Rassemblement national (22 %). Si Jean-Luc Mélenchon se retrouve pour le moment sur la troisième marche du podium avec 15 % des intentions de vote, Éric Zemmour et Valérie Pécresse se livrent à une bataille pour la quatrième place avec 10,5 % et 9 % respectivement. Si son image de chef de guerre par rapport à l’invasion de l’Ukraine par la Russie lui a donné un coup de boost initial dans les sondages, Emmanuel Macron a depuis connu un coup de mou. Le président vient, en effet, de perdre 2,5 points en l’espace de deux semaines.

Un quinquennat en demi-teinte

Invité à partager son constat sur le quinquennat d’Emmanuel Macron par rapport à sa gestion du pouvoir en France et à l’international, le Dr Avinaash Munohur, indique que cette période a été marquée par des succès aussi bien que des échecs. Au volet des réussites à l’international, le politologue fait mention «des consolidations de la relation France-Allemagne et au niveau de l’Union européenne suite au Brexit», ou encore au fait qu’il a su défendre et promouvoir le Made in France dans certains domaines en négociant de gros contrats avec plusieurs pays.

Il estime qu’en maintenant une ligne claire par rapport à la Russie, Emmanuel Macron «a très bien su gérer la situation de guerre en Ukraine». Ce dernier point n’est pas partagé par l’historien Jocelyn Chan Low. Il fait remarquer que malgré la volonté d’Emmanuel Macron d’entamer le dialogue avec Moscou, la guerre en Ukraine est venue démontrer les limites de sa politique internationale. On a aussi encore à l’esprit l’épisode de l’échec au Mali. Pour l’historien, l’on peut parler d’un bilan en demi-teinte étant donné que «le président Macron avait promis de sortir la France de l’immobilisme des débats et autres confrontations stériles afin de réformer le pays». Si d’un côté ses grandes réformes n’ont pas eu lieu, de l’autre côté, il ne faut pas oublier «la crise des Gilets jaunes ainsi que certains choix lors de la pandémie de Covid-19 et, plus récemment, la crise des sous-marins nucléaires» ; qualifiées en tant qu’échecs également par le Dr Avinaash Munohur, qui estime que cela a ouvert une brèche encore plus profonde dans l’espace politique français. Revenons à la montée en puissance du nationalisme ; c’est un phénomène à ne pas sous-estimer. Il a quand même porté Donald Trump au pouvoir aux ÉtatsUnis.

L’impact sur l’Afrique etMmaurice en cas de nouveau président

Face à l’ascension d’autres grands ensembles économiques dans une période que les historiens appellent la «provincialisation de l’Europe», le Dr Avinaash Munohur indique que la France, ancienne puissance coloniale et dans le Top 10 des pays les plus riches au monde, ne pourra plus agir comme elle le faisait il y a quelques décennies. Avouant qu’il ne croit pas vraiment dans une victoire de l’extrême droite ou du candidat des Insoumis Jean-Luc Mélenchon, il se prête au jeu du scénario lié au changement après avoir rappelé le cas Donald Trump. Ainsi, il estime qu’il n’y aura pas de bouleversements radicaux au niveau des relations entre Maurice et la France, ou entre cette dernière et les pays africains. Même si le potentiel pour ces grands changements reste possible à l’intérieur du territoire français, «le gouvernement français, quel qu’il soit, ne pourra pas radicalement changer la donne au niveau du commerce et des relations internationales». Qui plus est, le nationalisme et le protectionnisme impliquent tous deux la réindustrialisation de la France, à savoir comment trouver des partenaires voulant acheter du Made in France.

Exit mobile version