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Sécurité alimentaire: former une nouvelle génération d’agriculteurs

La Chambre d’Agriculture s’est associée au Human Resource Development Council en vue d’offrir une formation poussée à ceux qui veulent se lancer dans l’agriculture.

Avec la pandémie qui a démontré l’importance de l’autosuffisance alimentaire, il devient nécessaire d’acquérir les compétences et les connaissances nécessaires pour envisager de se lancer en tant qu’entrepreneur agricole. C’est ce que propose la formation Starting your journey in Agriculture. La prochaine session devrait débuter ce mois-ci.

Offerte par le Regional Training Centre (RTC), cette formation est le fruit d’une collaboration entre le Human Resource Development Council (HRDC) et la Chambre d’Agriculture sous le programme de financement, National Training and Reskilling Scheme (NTRS). Le NTRS vise à former des personnes qui ont perdu leur emploi à cause de la Covid-19 et à les réorienter vers de nouveaux métiers. Cette formation a débuté avec un premier groupe de 40 personnes (de 18 à 60 ans). Ce programme de 260 heures combine des formations théoriques en salle, des intervenants de filières agricoles, techniques et financières, mais aussi des visites de terrain chez des professionnels de l’agriculture vivrière ou animale

Faire pousser des aliments est devenu plus qu’essentiel. Selon Jacqueline Sauzier, secrétaire générale de la Chambre d’Agriculture, se nourrir est vital, produire localement est une force, la relève est une nécessité. «Notre objectif final est que les élèves qui sortent de notre école acquièrent suffisamment de connaissances pour être les acteurs de leur propre avenir. Concernant les débouchés, nos discussions sont autour du Brevet Professionnel Responsable d’Exploitation Agricole (BPREA) de deux ans. Nous espérons ainsi que cette nouvelle génération d’agriculteurs va aider au changement des pratiques agricoles locales, bouger vers une agriculture responsable mais surtout, que la relève soit disponible pour les terres agricoles actuellement en exploitation», soutient-elle. Outre la formation, le but de ce programme est d’inciter à l’émergence de nouveaux agriculteurs dans le pays.

Ainsi, après que le sommet du G7 a tiré la sonnette d’alarme sur une crise alimentaire sans précédent, Jacqueline Sauzier précise qu’il est nécessaire de garder les terres agricoles productives à Maurice. Elle indique que depuis l’Indépendance, le nombre de personnes impliquées dans le secteur agricole n’a cessé de diminuer. Ce qui fait que certains planteurs se plaignent de l’absence de relève. «Pour ajouter à cela, nous avons subi la crise économique de 2008, les fluctuations des devises, la pandémie depuis 2019. Mais avec cette guerre et ses conséquences sur l’approvisionnement en produits agroalimentaires, le besoin d’un retour à la terre se fait de plus en plus ressentir. On pourrait presque parler d’urgence», prévient-elle.

Le retour à la terre est utile car cela permettra d’augmenter notre production locale et de réduire notre dépendance face aux importations, dans un premier temps. Dans un deuxième temps, ce serait un pas vers la souveraineté alimentaire. Cependant, pour certaines filières, la dépendance des importations sera difficile à éliminer car ces filières requièrent des produits tels que le blé, le maïs ou le soja qui ne pourront pas produire les volumes nécessaires pour ces filières.

Une nouvelle école d’agriculture

Cette formation est d’autant plus importante que les récents événements ont démontré notre faiblesse et notre dépendance face aux importations. À l’avenir, il faudra des gens pour produire de la nourriture destinée au pays. Il faut aussi savoir que la dépendance sur l’importation est en partie due au manque d’intérêt pour l’agriculture par les jeunes. Selon Jacqueline Sauzier, il est important d’inciter la jeune génération à considérer l’agriculture comme choix de carrière tout en y apportant de l’innovation couplée à la technologie. C’est un secteur où il y a de la place à prendre. Et puis, cela aidera à régler le problème du chômage et lancera une nouvelle génération d’entrepreneurs.

«Il est évident que nous ne pourrons pas être une réponse immédiate pour tous. L’école d’agriculture est en cours de création. C’est un projet d’envergure nationale qui a demandé une réflexion approfondie. Nous sommes maintenant convaincus de sa nécessité et les discussions de collaboration au niveau régional ont bien avancé. Nous voulons faire les choses bien et ne pas agir dans la précipitation», ajoute Jacqueline Sauzier

Le souhait de la Chambre d’Agriculture, c’est que la formation théorique et pratique qui y sera dispensée donnera le goût aux jeunes d’aujourd’hui de devenir les planteurs et éleveurs de demain. De ce fait, elle remettra le métier d’agriculteur au centre d’un pilier économique essentiel pour le pays.

Par ailleurs, la coopération entre La Réunion et Maurice sur les sujets agricoles s’est intensifiée ces dernières années, notamment pour ce qui est de la recherche et de la formation. L’école FORMA’TERRA s’est imposée comme une référence dans l’océan Indien, disposant de compétences, de savoir-faire en agroécologie et surtout d’une vision pour la coopération régionale. L’établissement envoie régulièrement des délégations dans les îles voisines dans le cadre du Réseau des Établissements Agricoles Professionnels d’Afrique Australe et de l’océan Indien (REAP AAOI). Mais ses liens avec Maurice en particulier se sont renforcés ces derniers mois, avec une ambition commune d’enrichir l’offre de formation professionnelle dans le domaine de l’agriculture durable à Maurice.

Depuis novembre 2021, trois missions de FORMA’TERRA à Maurice ont été programmées. L’objectif est d’accompagner Maurice dans la création de formations agricoles à plusieurs niveaux (professionnel, apprentis, jeunes, etc.) Si cette coopération est aussi fructueuse, c’est parce que FORMA’TERRA peut s’appuyer sur un solide réseau de partenaires volontaires et sur l’appui de l’Ambassade de France et de l’Union européenne qui soutiennent cette coopération.

Les attentes pour le Budget 2022-2023

«Pour le moment, notre première préoccupation concernant le Budget 2022-2023 sur le volet de la production vivrière est un besoin de structuration des filières», souligne Jacqueline Sauzier. Car même avec toutes les formations du monde pour les jeunes, s’il n’y a pas un élément de confiance en l’avenir dans ce secteur, ceux-ci ne seront pas enclins à revenir à la terre. Les enjeux sont importants et selon Jacqueline Sauzier, c’est le moment d’entreprendre les réformes nécessaires qui instaureront un climat de confiance pour la survie des producteurs locaux.

Programmes de formation dans la région

Le Réseau des Établissements Agricoles Professionnels d’Afrique Australe et de l’océan Indien (REAP AAOI) rassemble plusieurs établissements de la région océan Indien pour mettre en place des programmes de formation de techniciens agricoles avec le soutien des structures locales. Il permet notamment des mobilités étudiantes et de professeurs. Le REAP est cofinancé par l’Union européenne à travers le programme INTERREG et par la Région Réunion, les partenaires locaux sont l’Université de Maurice, la Chambre d’Agriculture et le FAREI.

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