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Dr Kaviraj Sharma Sukon (Directeur Général, Open University of Mauritius) : «Les entreprises parapubliques ne doivent pas devenir un département d’un ministère»

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Le ministère doit fixer des objectifs et évaluer les performances, mais il ne doit pas s’immiscer dans la gestion quotidienne de l’organisation parapublique, souligne le Directeur Général de l’Open University of Mauritius.

Des pays comme Singapour se sont grandement appuyés sur les corps parapublics pour bâtir leur prospérité économique. Les entreprises d’État mauriciennes peuvent-elles s’inspirer du modèle singapourien ?

Il est vrai que Singapour a réussi à utiliser les entreprises publiques ou parapubliques comme moteur clé de son développement économique. Cependant, la question de savoir si les entreprises parapubliques mauriciennes ont tout à gagner à s’inspirer du modèle singapourien dépend d’une série de facteurs. L’un d’eux est la spécificité de l’île Maurice et de son économie. S’il existe des similitudes entre Singapour et Maurice en termes de petite taille et d’ouverture au commerce, il peut également y avoir des différences importantes en termes de structure de leurs économies, de types d’industries dominantes et de défis spécifiques auxquels sont confrontées leurs entreprises parapubliques.

Un autre facteur à prendre en compte est le contexte politique et institutionnel de l’île Maurice. Singapour a réussi à mener à bien sa stratégie de développement parapublique grâce à son système politique très centralisé et à l’importance qu’il accorde à l’efficacité et à la performance. La capacité de Maurice à reproduire ce succès dépendra d’une série de facteurs, notamment la capacité du gouvernement et des organismes parapublics à collaborer efficacement, le niveau de volonté politique de mener des réformes et le degré de confiance du public dans les institutions concernées.

Cela dit, il y a certainement des leçons à tirer de l’expérience singapourienne. Par exemple, Singapour a réussi à utiliser les organismes parapublics pour stimuler l’innovation et la compétitivité dans des secteurs clés, et à tirer parti de la numérisation pour améliorer l’efficience et l’efficacité des services publics. Ce sont des domaines dans lesquels les entreprises parapubliques mauriciennes pourraient s’inspirer de Singapour et de ses meilleures pratiques.

En fin de compte, la clé du succès pour les organismes parapublics mauriciens sera de développer une stratégie adaptée aux caractéristiques uniques du pays et de son économie, tout en s’inspirant des leçons et des meilleures pratiques de modèles réussis comme Singapour. En outre, les entreprises parapubliques ne doivent jamais devenir un département d’un ministère. Certes, le ministère doit fixer des objectifs et évaluer les performances, mais il ne doit pas s’immiscer dans la gestion quotidienne de l’organisation parapublique.

Maurice veut s’affirmer comme une économie à revenu élevé. Pour cela, le pays doit pouvoir s’appuyer sur des sociétés parapubliques pouvant offrir un service de qualité en fonction du budget qui leur est alloué…

Dans l’ensemble, la mesure des performances des entreprises parapubliques nécessite une approche équilibrée qui tienne compte de leur mandat de service public, de leur viabilité financière et de leur efficacité. Une combinaison d’indicateurs financiers, opérationnels, de prestation de services, de conformité, de gouvernance et d’impact social peut fournir une évaluation complète de leur performance. À l’Open University of Mauritius, plusieurs mécanismes nous permettent de suivre nos progrès et d’assurer des améliorations continues à tous les niveaux. Par exemple, nous sommes la seule université publique certifiée ISO à Maurice. Nous sommes également régulièrement contrôlés et évalués par des organismes d’assurance qualité locaux et internationaux. En outre, nous disposons d’une unité interne d’assurance de la qualité qui veille à ce que les mesures et les paramètres appropriés soient maintenus tout en gardant un oeil vigilant sur les performances de nos processus. Par ailleurs, les audits réguliers effectués par le gouvernement sur l’utilisation des ressources et sur la gestion financière globale des institutions sont d’autres contrôles qui garantissent l’efficacité et la bonne performance.

L’une des principales critiques qui revient quand on parle des sociétés parapubliques, c’est qu’elles font face à un problème de gouvernance du fait que les Chairperson, qui sont des nominés politiques, interfèrent bien souvent dans les opérations au jour le jour de l’organisation qui tombent sous le ressort du CEO. Votre avis ?

Bien sûr, cela peut arriver si le président n’a pas les qualifications nécessaires et l’expérience suffisante pour l’organisation parapublique. Je pense que le code de gouvernance d’entreprise devrait être strictement respecté. Le président d’une institution devrait être responsable des décisions politiques et ne pas interférer avec le fonctionnement quotidien de l’organisation. À l’Open University, nous fonctionnons avec une séparation claire des pouvoirs et le directeur général et le président ont chacun leur propre mandat et leur propre ligne de conduite.

Pour remédier à l’ingérence politique dans les organismes parapublics, il faut une combinaison de changements structurels et culturels, notamment des lignes de responsabilité claires, une gouvernance d’entreprise solide, l’engagement des parties prenantes et une culture de la performance. En mettant en oeuvre ces solutions, les organismes parapublics mauriciens peuvent devenir plus efficaces, plus performants et plus responsables vis-à-vis de leurs parties prenantes.

Parlons de la technologie. La digitalisation est, on le sait, essentielle, pour améliorer le service dans les sociétés parapubliques. Faut-il accélérer ce processus ?

La numérisation des institutions a beaucoup évolué à Maurice et a atteint un niveau de sophistication très appréciable. À l’Open University of Mauritius, il convient de noter que nous considérons la technologie et notre infrastructure numérique comme l’âme et la force vitale de l’institution. En tant que spécialistes de l’enseignement ouvert et à distance, nous nous appuyons sur notre plateforme d’apprentissage en ligne (nous sommes passés de Moodle à Blackboard) et sur des processus numériques pour la mise en oeuvre des programmes et la communication entre les étudiants, les tuteurs, les responsables de programmes et les administrateurs.

Les derniers rapports du Public Accounts Committee et du National Audit Office font état de gaspillage et de mauvaise gestion des fonds publics. Dans de nombreux cas, les sociétés parapubliques sont en retard dans la soumission de leurs bilans financiers. Vos commentaires ?

L’Open University est toujours prompte à soumettre ses rapports financiers. Nous disposons de notre propre mécanisme interne, qui est solide, qui s’est avéré efficace et qui garantit une bonne gouvernance. Nous sommes régulièrement contrôlés par une équipe d’auditeurs gouvernementaux du NAO et nous n’avons jamais reçu de rapport défavorable. Nous sommes également responsables devant notre organisme de réglementation, la Commission de l’enseignement supérieur, qui veille à ce que chaque sou soit judicieusement dépensé.

Ne pensez-vous pas qu’il faudrait mettre en place des Key Performance Indicators pour mesurer la performance des corps parapublics et voir s’ils font un usage efficace des fonds publics ?

Oui ! Le gouvernement, par l’intermédiaire des ministères, devrait fixer les indicateurs clés de performance en consultation avec l’organisation paraétatique. À l’Open University, nous avons nos Key Performance Indicators (KPI) et, comme nous l’avons déjà mentionné, nous faisons régulièrement l’objet d’audits et nous sommes responsables devant les autorités. Mesurer la performance des organismes parapublics est une étape cruciale pour s’assurer qu’ils sont efficaces et qu’ils utilisent efficacement les fonds publics.

Les KPI sont un outil couramment utilisé pour mesurer la performance des organisations et peuvent être utiles pour évaluer l’efficacité des organismes parapublics. Les KPI peuvent être utilisés pour contrôler et mesurer des aspects spécifiques de la performance des organismes parapublics, tels que la satisfaction des clients, l’efficacité opérationnelle, la performance financière et la productivité des employés. En établissant des KPI, les organismes parapublics peuvent fixer des buts et des objectifs clairs et mesurer les progrès accomplis pour les atteindre. Cela permet d’identifier les points faibles et les possibilités d’amélioration.

Quelles sont les stratégies mises en place en vue d’offrir un service de qualité ?

Nos étudiants sont notre principale partie prenante. Nous travaillons en permanence à l’amélioration des différents services académiques et administratifs que nous leur offrons. Nous avons récemment modernisé notre plateforme d’apprentissage en ligne pour en faire un système moderne de gestion de l’apprentissage reconnu dans le monde entier, notamment en investissant dans Blackboard Ultra, qui offre un large éventail de possibilités pour les interactions entre enseignants, administrateurs et étudiants et pour la mise en oeuvre d’activités en ligne, entre autres. En outre, afin de répondre aux besoins de notre population étudiante croissante et d’améliorer considérablement notre infrastructure, nous allons de l’avant avec la construction d’un campus flambant neuf à Côte d’Or. Nous sommes en train d’acquérir un système de gestion de l’information sur les étudiants.

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