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Industrie locale : Faire de la production locale un mouvement national

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Une économie locale plus dynamique a des retombées positives pour booster la création d’emplois, l’innovation, la productivité, la compétitivité et la résilience. Il s’agit là des ingrédients qui favorisent la croissance.

CHAQUE crise est une opportunité. Alors que la pandémie a mis en lumière la vulnérabilité de notre économie insulaire trop dépendante des importations, la demande de certification Made in Moris a augmenté de 50 %. Une prise de conscience s’opère autour de l’effet multiplicateur de l’achat local pour les consommateurs et de l’approvisionnement local pour les entreprises. Toutes les parties prenantes réalisent désormais l’urgence de renforcer notre outil de production local et régional.

À la suite de la pandémie, Maurice a besoin de se repositionner sur des enjeux plus sérieux et plus urgents que jamais : la transition énergétique, l’écologie, le développement durable, le recyclage des déchets, l’économie circulaire, les ressources humaines et la pertinence de notre secteur manufacturier. L’industrie locale reste un des piliers les plus fiables de l’économie mauricienne et le label Made in Moris est un véritable game changer pour notre île qui doit se réinventer. Aujourd’hui, l’univers de la marque Made in Moris s’enrichit de nouveaux mots-clés. Les consommateurs comprennent de mieux en mieux le projet social qu’incarne le label et l’effet multiplicateur de la production locale est également reconnu. L’importance d’acheter local devient de plus en plus évidente pour les consommateurs locaux.

Au total, pour l’année 2022, le Made in Moris a accueilli 22 entreprises qui représentent 52 marques, intégré l’industrie des services et lancé le Made in Moris Pledge pour encourager le sourcing auprès des marques labellisées. Ainsi, Leal Énergies, Netrhino (Leal communications and Informatics), Distillerie de Labourdonnais, Mr Berti, Oceano Pearls, Maurisbay – Kuan Fu Tee, BEM Recycling, Dodo Vanille et de la vanille, Menuiserie de l’océan Indien, Fundkiss, Circus, Eggsmore, Takamaka, Bella Amigo, MP Green Life, Pro Active, MUA, Label 60, GNP WEAR CO LTD, Premix, Juice et Subana font désormais partie de la grande famille de Made in Moris. Le label est de plus en plus populaire ; c’est bon signe. Chaque nouvel adhérent représente une part importante de notre économie. Le label a également franchi deux étapes stratégiques en 2022 : le lancement du Made in Moris Pledge, outil permettant de s’approvisionner auprès des entreprises labellisées, et l’intégration de l’industrie des services.

«Je crois que le Made in Moris est à l’image d’un multipliant : un arbre fort, indestructible et qui ne cesse de grandir. À l’aide des ressources qu’il obtient du soleil mais aussi à travers la terre, il s’étale, s’étend et s’étoffe. Désormais, nous entamerons plusieurs projets et poursuivrons ceux qui sont lancés. Le flagship store Made in Moris à l’aéroport est devenu un must. Ce n’est plus possible qu’après 10 ans et avec toute cette diversité de marques qualitatives que les produits mauriciens ne soient pas vendus à l’aéroport. La demande des touristes est bel et bien là. Tout le monde y gagnerait et en premier, la destination elle-même. Elle a besoin de se redéfinir et dans cette redéfinition, il faut vraiment mettre à l’honneur le savoir-faire mauricien et le caractère unique de nos marques», explique Shirin Gunny, Acting CEO de l’AMM et directrice générale de Made in Moris.

SÉCURITÉ ALIMENTAIRE

La pandémie a remis en lumière l’urgence d’améliorer notre sécurité alimentaire et nutritionnelle. Les producteurs locaux ont été en première ligne pour fournir au pays des produits de première nécessité lors de l’apparition de la pandémie en 2020. Une prise de conscience de l’importance de produire et de consommer localement a également eu lieu.

Le label Made in Moris a certainement contribué à mettre en valeur les produits locaux et il apporte une garantie de qualité et une plus grande visibilité. Par exemple, il était naturel pour la compagnie Inicia, qui a lancé Oeudor, le premier oeuf de marque à Maurice en 1978, de rejoindre une association qui se consacre à la mise en valeur des produits de qualité fabriqués à Maurice. De plus, faire partie de l’association leur permet d’avoir un plus grand impact lors d’éventuelles discussions avec les autorités sur diverses questions qui touchent leur secteur d’activité.

Effectivement, avec la crise sanitaire internationale, nos chaînes d’approvisionnement ont été bouleversées. Il y a donc eu une véritable prise de conscience. Maurice est confronté à un défi majeur : être autosuffisante et produire ses denrées de base pour assurer sa sécurité alimentaire. La raison d’être de Made in Moris est donc plus que jamais d’actualité, puisque l’objectif du label est de réunir sur une même plateforme différents producteurs et fabricants locaux, issus de divers secteurs, afin de coordonner leurs activités et de proposer de nouvelles solutions pour développer la production locale.

La question est de savoir ce qu’il faut faire pour soutenir la production alimentaire locale et construire des systèmes alimentaires locaux résilients. Selon les producteurs locaux, dans de nombreuses catégories, les produits locaux n’ont aujourd’hui rien à envier à ceux qui sont importés. Par ailleurs, la taille de notre marché ne permet pas aux producteurs locaux de bénéficier d’économies d’échelle pour pouvoir proposer des prix compétitifs et ainsi concurrencer les producteurs des grandes nations. Cela dit, il est important d’identifier certaines catégories de produits, notamment les produits de base, qui peuvent être produites à Maurice, comme les fruits et légumes, et les autorités ont donné le ton pour promouvoir ce secteur. Il est également important de soutenir la production locale en amont, à travers l’Association of Mauritian Manufacturers (AMM), en termes de recherche et développement, sans oublier l’expertise importée, puis en aval avec la promotion du label Made in Mauritius, tout en privilégiant des méthodes de production saines et en harmonie avec l’environnement.

De plus, pour encourager les entreprises locales, les observateurs sont d’avis qu’il faudrait réduire les taxes sur les achats de matériaux, tout en éliminant complètement celles sur les produits finis. Il serait également judicieux d’augmenter la taxe sur les produits importés qui sont proches de ou similaires à ceux que nous produisons localement. Une appréciation de la roupie mauricienne par rapport au dollar américain pourrait aussi grandement aider l’industrie, notamment en ce qui concerne l’importation d’équipements et de matières premières. Enfin, l’atteinte d’un certain niveau d’autosuffisance permettrait au pays d’économiser des millions de dollars en devises étrangères.

Nous avons des exemples de secteurs agroalimentaires qui ont fonctionné, comme le secteur de la volaille, du poulet et des oeufs. Aujourd’hui, nous devons trouver les moyens de dupliquer cette réussite dans d’autres secteurs. Il est possible d’obtenir les mêmes résultats dans d’autres secteurs, à condition de mettre en place les mesures d’accompagnement et l’expertise nécessaires pour assurer la qualité ; les Mauriciens recherchent avant tout la qualité.

Toutefois, selon Kevin Teeroovengadum, économiste, la raison pour laquelle nous ne parvenons pas à dupliquer pour d’autres denrées alimentaires est «qu’il y a un manque total de volonté de la part du gouvernement et du secteur privé en général. L’arrivée de la Covid sur nos côtes en 2020 a été une bénédiction déguisée, car elle nous a donné l’occasion de faire pression en faveur d’un programme visant à produire beaucoup plus localement. Mais ensuite, nous voyons le gouvernement accorder des subventions aux importateurs plutôt qu’aux producteurs locaux. Par exemple, le gouvernement pourrait dépenser Rs 5 milliards de la Mauritius Investment Corporation (MIC) pour soutenir les producteurs locaux qui, à leur tour, pourraient moderniser leurs équipements et fabriquer de meilleurs produits locaux. Pour moi, l’obstacle réside dans l’absence totale de volonté politique de faire bouger les choses.»

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