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Services de livraison : L’e-commerce remodèle le marché du courrier express

La pandémie a grandement perturbé l’économie. Alors que le pays a connu un gel quasi total de ses activités, le courrier express s’est davantage révélé être un agent économique indispensable. Considéré comme un service essentiel, ce secteur a su s’adapter au ‘new normal’ grâce à la progression exponentielle de l’e-commerce. Et les prestataires sont unanimes : cet apport de la digitalisation contribue à l’ubérisation de leurs activités.

Le courrier express a laissé son empreinte économique. Le marché mondial de la messagerie et de l’acheminement de colis s’est chiffré à 394 milliards de dollars US en 2021. C’est ce qui ressort du rapport de Research and Markets publié par Globe Newswire, le 28 février 2022.

Selon les prévisions de ReportLinker, le 4 août 2022, ce secteur devrait connaître un taux de croissance annuel moyen de 10 % au cours de la période 2022-2027. Cette conjecture positive a été établie car «l’essor du commerce électronique a eu un impact important sur les volumes massifs d’expédition de colis attendus en 2020. Le volume de colis aux États-Unis a augmenté de 37 % en glissement annuel, atteignant 20 milliards de dollars en 2020, contre 15 milliards en 2019».

Les chiffres sont révélateurs. L’e-commerce s’inscrit dans les mœurs mauriciennes suivant l’avènement de la Covid-19. Selon les statistiques de la Banque de Maurice, la valeur des transactions bancaires sur Internet a augmenté de 66 % d’avril 2020 à avril 2021. Le nombre de transactions bancaires mobiles a de même crû de 10 % d’avril 2020 à 2021.

Il convient de noter que la crise, en particulier la contrainte de distanciation physique, a renforcé la nécessité de progresser autant que possible en ce qui concerne les processus numériques. Si la numérisation était un choix avant la pandémie, elle est désormais une nécessité. «Aujourd’hui, pour être plus efficace dans ce que nous faisons et pour nous assurer que le temps d’acheminement soit le plus court possible, les outils que nous avons mis en place pendant la pandémie portent leurs fruits. Nous avons fait en sorte que beaucoup de tâches manuelles soient automatisées. Grâce à ces implémentations, nos collaborateurs sont valorisés et ils arrivent à mieux se concentrer sur les clients et faciliter leurs envois ou livraisons», explique Neerish Chooramun, Corporate Manager – Marketing and Communication du groupe Velogic, représentant de la marque UPS à Maurice.

Ces propos sont rejoints par Patrice Maury, Chief Executive Officer de Celero Group, une franchise d’Aramex International. Il soutient que la digitalisation devient un prérequis dans cette ère post-Covid. «Aramex utilise une technologie de pointe à travers l’‘Internet ofThings’ (IoT) pour l’enregistrement et le suivi de chaque colis dans la chaîne d’approvisionnement. Cela nous permet de fournir un service de qualité afin d’accroître notre empreinte sur le marché. Notre atout, c’est de pouvoir fournir des données très précises qui permettent à nos clients de suivre leur colis en temps réel. Donc, l’information leur est accessible en quelques clics.»

Le groupe Deutsche Post DHL Group (DPDHL), pour sa part, dit être conscient de la portée de la digitalisation dans ce secteur. De ce fait, le groupe investit des milliards dans ses projets de transformation numérique sur la période 2021 – 2025.

«Nous avons introduit des solutions pour affiner nos processus, ou encore pour automatiser les tâches répétitives et fastidieuses, ce qui a permis à nos équipes d’être plus productives. Parmi ces innovations, on retrouve des améliorations dans nos activités, les ‘chatbots’ pour complémenter le service clientèle, ainsi que les applications telles que DHL Express Mobile qui permettent aux clients de l’Afrique subsaharienne de suivre et de coordonner la livraison de leurs produits avec une plus grande facilité», confie Deepak Deepchand, Country Manager de DHL (Mauritius). Devant l’ampleur que prend l’e-commerce, DHL intensifie ses actions auprès des PME. Traitant avec plus de 20 000 PME en Afrique, elle les aide à comprendre la nécessité de proposer des options de livraison flexibles aux acheteurs et les guide à mettre en place leurs sites de commerce.


Reconversion des opérations

Le passage de la Covid-19 a changé la donne. Elle a montré aux divers secteurs d’activités que la réinvention était devenue la norme afin de pouvoir survivre. Le secteur de la messagerie et de l’acheminement de colis n’a pas été épargné et une mutation des opérations était presque inévitable. Selon les prestataires, la collaboration et la fragmentation des services sont vues comme des leviers pour assurer la pérennité des activités. Depuis l’éclatement de la crise sanitaire, le groupe DHL constate que peu de pays ont atteint un taux de vaccination supérieur à 50 % à ce jour. Deepak Deepchand observe que les infrastructures sousdéveloppées des autres territoires ont rendu le déploiement plus difficile. Il met en relief plusieurs propositions pour pallier cela. Il suggère une collaboration entre les différents pays et industries afin d’accorder une attention spéciale au développement de partenariats et d’une base de données solides, d’avoir une gestion proactive de la capacité de transport et des flux de retour durables pour les emballages dans le but de sécuriser les flux d’approvisionnement entrants, de mettre en place des modèles de distribution adaptés aux réalités locales, en mettant l’accent sur l’emplacement stratégique des entrepôts, la synchronisation des flux de vaccins et de produits auxiliaires, ainsi que le nombre et l’emplacement des points de vaccination, entre autres. Il va plus loin, ajoutant qu’«il est essentiel d’identifier et de prévenir les crises sanitaires à un stade précoce. Pour cela, il faut mettre en place des partenariats actifs, des systèmes d’alerte mondiaux étendus, un programme intégré de prévention des épidémies et des investissements ciblés en recherche et développement. Il est également recommandé d’étendre et d’institutionnaliser le confinement des virus et les contre-mesures (par exemple, la recherche numérique des contacts et les stocks nationaux) afin de garantir une préparation stratégique et des temps de réponse plus efficaces. Pour faciliter le déploiement rapide des médicaments (diagnostics, thérapies et vaccins), les autorités compétentes et le secteur privé doivent recourir à une main-d’œuvre efficace, élaborer des plans de recherche, de production et d’approvisionnement, et développer les capacités de déploiement local.


Ininterruption des services sur le marché local

À une période où une cessation des activités de nombreux secteurs était observée pendant le confinement et la fermeture des frontières, les services de livraison des colis express se sont poursuivis sur le marché local. «Le secteur courrier express étant dans la catégorie des services essentiels, nous avons dès les premiers jours du confinement été sollicités pour les services de transport de produits médicaux, tels que les vaccins et autres médicaments essentiels contre la Covid. Il nous fallait nous réadapter aux conditions difficiles, et pour cela nous avions élaboré des plans de travail nous permettant de fonctionner 7 jours sur 7 avec des équipes dédiées», se souvient Patrice Maury.

DHL rappelle avoir continuellement offert le service à ses clients, tout en composant avec les différentes restrictions sanitaires en vigueur sur les différents marchés où elle opère. «Nous avons travaillé en étroite collaboration avec les autorités pour nous assurer que nos services de livraison se fassent avec le minimum de perturbations, tout en privilégiant la santé et la sécurité de nos employés et clients. Nous avons pu le faire en maintenant et en augmentant la productivité à tous les niveaux, et ce, dans tous les bureaux de DHL Express dans le monde.»

UPS était également de la partie. «Grâce à l’agilité de nos équipes, les membres de notre personnel opérant sur le terrain ont pu avoir leur ‘WAP’ pendant le confinement afin de pouvoir débloquer bien des situations ou pour nous associer avec d’autres partenaires pour la livraison des vivres aux personnes âgées qui ne pouvaient se déplacer pendant le premier confinement. Tout cela s’est fait avec la coopération des équipes qui étaient en Work from Home», nous informe Neerish Chooramun.

En outre, Patrice Maury confie que Celero Express a dû déployer plusieurs alternatives afin de procurer les services adéquats durant ces temps difficiles de crise sanitaire. «Au départ, les colis essentiels étaient principalement des produits médicaux et l’alimentaire pendant cette période. Il nous a fallu mettre toute une opération pour maintenir la chaîne du froid.» Il affirme que Celero Express a pu transporter les colis par des vols charters grâce au support du réseau Aramex et la collaboration qu’il a établie avec plusieurs lignes aériennes. Par ailleurs, compte tenu du développement des plateformes en ligne, Aramex avait lancé le Shop and Ship, permettant à tout individu d’utiliser son compte pour des achats en ligne depuis les États-Unis, l’Europe et l’Asie.

Patrice Maury donne déjà le ton quant à la modulation des opérations. «Les plateformes et solutions basées sur l’intelligence artificielle (IA) sont également constamment automatisées pour remplacer les processus logistiques traditionnels manuels. De plus, l’assouplissement des réglementations relatives à l’utilisation des drones à l’avenir devrait augmenter la livraison du dernier kilomètre et les applications robotiques pour l’industrie. La livraison du dernier kilomètre est un objectif spécifique pour les start-up qui cherchent à entrer dans l’espace de l’e-commerce.»

Neerish Chooramun, de son côté, précise qu’UPS alignera ses services en fonction des besoins de ses clients. «Afin d’opérer dans ce nouvel écosystème, il nous faut continuellement être à l’écoute de nos clients afin de leur donner les meilleurs conseils pour l’acheminement de leurs colis dans les meilleurs délais et à un coût raisonnable. Notre équipe commerciale suit d’ailleurs l’évolution du marché de très près afin que nous puissions nous réinventer pour les besoins du client.»


L’Industrie reprend des couleurs

En dépit de la tendance haussière des prix dans la chaîne logistique, que ce soit au niveau du produit, le transport aérien et maritime, l’avenir du marché de la messagerie, de l’express et du colis est vu de manière favorable par les prestataires. «Malgré le contexte économique difficile et les taux d’inflation mondiaux, chez DHL Express Maurice, nous croyons que nous pouvons rester compétitifs, car nos offres opérationnelles et solutions d’e-commerce conserveront leur valeur pour maintenir notre croissance structurelle. Quant à la croissance de notre activité logistique globale, elle se poursuivra à un rythme plus lent», lance Deepak Deepchand. Même son de cloche à Celero Express. Pour Patrice Maury, le secteur affiche bonne mine. Cela est dû au changement de comportement d’achat de la population. «Notre filiale Celero Express, qui est une franchise d’Aramex, a vu une hausse des volumes pour l’année 2021 de 300 % en comparaison de l’année précédente. Cette tendance a aussi été observée dans différents pays et la progression se maintient au vu du changement dans le mode d’achat.» Pour UPS, il y a certes une amélioration dans le flux de transactions. Toutefois, il sera difficile de revenir à une situation pré-Covid. «Avec la réouverture de l’espace aérien, et les vols qui se rétablissent, nous constatons qu’au fur et à mesure, il y a une augmentation de volumes. Mais ce qui est certain, c’est que ce ne sera pas un retour pré-Covid, car pendant les restrictions sanitaires, bon nombre de sociétés se sont tournées vers le numérique à la place de faire acheminer les documents originaux», souligne Neerish Chooramun.


 

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