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Déconfinons ! Réflexions aigres-douces

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Déconfinons ! Réflexions aigres-douces | business-magazine.mu

Crédit photo : Adeline de Souza

Par Adeline de Souza

 

Nous avons passé les deux derniers mois, confinés, dans l’angoisse grandissante etquotidienne de l’évolution du virus. Nous étions suspendusaux infos, débats, conseils et affirmations, distillés par les médias d’ici et d’ailleurs. Et surtout par les réseaux dits sociaux. Ceux-là même qui régulent depuis longtemps cequi nous tient lieu d’amis, de nourriture mentale, voire même de conscience.

 

Jouer collectif est à l’ordre du jour ! Les chaînes télé n’ont jamais autant bien porté leursnoms, nous enchaînant pour formuler nos croyances jusqu’à en faire des dogmes que nous partageons sans filtre et desquels naissent, toujours en réseau, reportages, palabres et dérapages aussi efficaces à contaminer large qu’un certain virus.

 

Aujourd’hui, notre déconfinement nous abasourdit. Et maintenant que vais-je faire, se dit l’Humanité, nostalgique de l’avant-Covid, époque récente où tout allait si bien ?

 

Ce qui a été souvent qualifié de «catastrophe universelle» est en fait un passage à tabac planétaire. L’Univers dans son ensemble étant bien peu concerné par notre déconfiture. À moins que comme les poissons qui ont toutes les raisons de croire que l’Univers se limite à leur milieu aquatique, nous pensions que notre planète, notre espèce et surtout notre nombril, constituent lecentre de l’Univers. 

 

Universelle aussi, s’autoproclame la fameuse Déclaration des Droits de l’Homme, Cette charte qu’on brandit dès qu’un terrien – pas n’importe lequel en pratique – est en danger d’injustice. Àsavoir que les Terriens, même déclarés égaux, ne sont pas tous justiciables. C’est souvent selon que vous êtes puissant ou misérable / les jugements de cour vous rendront blanc ou noir disait le célèbre fabuliste.Exception faite pour les tribus indigènes et autres groupes d’autochtones (et encore !) queles grands de ce monde ne peuvent plus ignorer complètement au nom du concept, ô combien galvaudé,de la démocratie. Il y a heureusement des gens de bonne foi, qui s’occupent de certains terriens malmenés. Mais ça reste marginal.

 

Le terrien a donc en principe des Droits selon une Charte. Perfectible, certes, dans son application, mais c’est déjà quelque chose d’établi.

 

Et quid des obligations ? Cette célébrissime Charte ne devrait-elle pas avoir pour coéquipière une Déclaration des Devoirs de l’Homme ? Ce qui contribuerait à équilibrer un tant soit peu privilèges et avantages. Les deux évangiles mis ensemble et restructurés – pour ne plus êtrerien qu’une référence brumeuse– pourraient tenir lieu de guide pour terriens en pleine perte de repères. Cassiya l’exprime bien d’ailleurs : «Seki ena buku pa le partaze / Seki pena dimand sarité / Guet sa lot la pe atan lospitalité.» Et si c’était une question de dignité à réinstaurer ?

 

Dans notre déconfinement, nous assistons aussi à la préparation du Budget 20-21. Un exerciceacrobatique pour faire redémarrer l’économie, relayé en long et en large par nos médias, ceux-là mêmes déjà cités… Pour reprendre l’idée des Chartes, la population dans son ensemble aurait le Droit de prétendre à des mesures pour le rétablissement d’une situation décente et le Devoir de se mettre au travail pour les mêmes raisons. Les Dirigeants eux ont le Droit de ne pasétrangler leurs entreprises et le Devoir de trouver des pistes, pas forcément axées sur le surprofit à tout prix, pour sortir l’ensemble du pays du tourbillon. Pas simple, mais faisable en jouant collectif justement !

 

Nous tous avons le devoir de solidarité mais aussi, celui d’éthique. Placer le pays sous perfusion ne veut pas dire uniquement distribuer de l’argent. C’est aussi mettre en place des moyens de subsistance.

 

Pour exemple, évoquons le cœur de la base de la survie. Manger sainement. Le retour à la terre est une priorité absolue. Dans l’exercice pré-budgétaire, les planteurs de légumes sont consultés et expriment leurs besoins et revendications, les autorités ayant affirmé que ce secteur est d’une importance capitale. Et pourtant un élément fondamental n’est jamais évoqué : les conditions de production. 

 

Le contrôle des pesticides etautres méthodes pour booster le système, l’enfler jusqu’à l’explosion environnementaleafin d’arriver à récolter rapidement des choux-fleurs d’une blancheur immaculée et des pâtissons jaune-porcelaine,mais obèses. La monoculture répétée jusqu’à saturation du sol qu’on enrichira artificiellement de cocktails chimiques… encore et encore. Et etc. Le tout vaporisé ou injecté par des travailleurs sans la moindre protection. Quel programme !

 

Pourquoi pas des potagers communautaires où les gens du village viendraient en famille, cultiver des parcelles de jardins, faire du bon terreau où de précieux microorganismesvivants jouant leur rôle avec bonheur travailleraient à la pousse naturelle de légumes en pleine santé. Un exercice social et porteur à la fois. Un endroit convivial où on pourrait s’échanger des légumes sainset en offrir à la vente à ceux qui ont compris qu’entre Bio et Chimio, y’a pas photo !

 

Que ces propriétaires de terrain en sommeil ou ceux que quelques lopins de terre en moins n’appauvriront certainement pas prennentconscience de la contribution énorme qu’ils apporteraient à la communauté. Vœux pieux ? Non ! Ça se fait déjà, et avec succès siouplé !!!

 

Rien ne sera plus comme avant, pontifient certains penseurs d’occasion et de tous bords…Eh bien, tant mieux ! Parce qu’avant, l’Avoir a pris dangereusement le dessus sur l’Être. «J’ai un peu de pognon,mais toujours pas assez. J’auraiplus comme ce boug-là ! Il est mari friqué bonhomme ! T’as vu sa caisse ? Il a TOUT ! Pasmillionnaire, multi-milliardaire ! Chapeau en tout cas ! Je vais avoir moi aussi… Pakoné comment, mais j’admire lestypes comme ça ! Mari traser sa.»

 

À l’inverse, l’Être s’est incliné sous le poids massif de l’Avoir. Dommage parce que l’Êtredemande de se poser les vraies questions sur la vraie condition humaine en quête d’harmonie.«Ni rire, ni pleurer, ni haïr mais COMPRENDRE»,  disait le philosophe Spinoza. Mais là,j’avoue avoir du mal à comprendre certaines postures. 

 


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