Ces mégaprojets qui ne décollent pas

On disait qu’ils allaient changer la face de Maurice, inaugurer une nouvelle ère de prospérité et contribuer à placer le pays sur la carte régionale. Mais ces projets d’envergure n’ont jamais décollé. Diagnostic.

Anne, ma soeur Anne ne vois-tu rien venir ? Je ne vois que le ciel au-dessus de Jin Fei qui poudroie et la plaine de Highlands qui verdoie. À ce jour, quatre mégaprojets annoncés en fanfare ont été mis au frigo. Il s’agit de la Jinfei Economic Trade and Cooperation Zone à Riche-Terre, du Neo Town à Les Salines, de la ville satellite de Highlands et du centre commercial Centre Point à Trianon.

Annoncée en grande pompe par les autorités, la zone économique et commerciale Jin Fei – qui dans un premier temps avait été baptisé Tianli – est un mégaprojet devant être développé sur 500 arpents et générer plus de 34 000 emplois. Son coût : Rs 25 milliards. Le projet porte la griffe d’un consortium composé de trois compagnies chinoises : Tisco, Shanxi Coking Coal Group et Shanxi Tianli Enterprise Group. Les capitaux sont amenés par la China Africa Development Fund. Pour permettre le démarrage des travaux, les planteurs de la région ont été délocalisés moyennant une compensation.

La première phase de Jin Fei a été lancée en septembre 2009. Elle comprend l’aménagement d’infrastructures routières et le raccordement aux réseaux d’électricité, d’eau potable et de téléphonie, notamment. Le conseil de district de Pamplemousses- Rivière-du-Rempart a jusqu’ici émis trois permis pour le développement des infrastructures dans la zone. Le premier permis a été octroyé le 24 octobre 2011 pour la construction d’un entrepôt. Le deuxième permis a été délivré le 16 mai dernier pour la construction d’appartements résidentiels. Et le 6 juillet, un permis a été octroyé à Goldox Construction pour l’aménagement d’un dortoir. Or, à ce jour, seulement le rond-point de Jin Fei est pratiquement complété.

Si jusqu’ici, le projet piétine c’est en raison de la crise économique qui a rendu les promoteurs chinois frileux et attentistes. Au rythme où vont les choses, les chances pour que Jin Fei soit opérationnelle en 2015 sont minces.

Promoteurs frileux

Autre mégaprojet actuellement en sommeil : le NeoTown. Le groupe indien Patel Engineering est l’initiateur de ce projet estimé à Rs 15 milliards qui a été officiellement lancé le 29 mars 2010. Il s’agit d’un projet intégré qui sera développé sur une superficie de 60 arpents. Il comprendra des appartements résidentiels, un hôtel, des jardins maritimes, des condominiums de luxe, un boutique-hôtel ou encore des centres commerciaux. Valeur du jour, le promoteur a fait une demande pour un permis d’Environment Impact Assessment pour construire et opérer une marina pouvant accommoder 42 bateaux. Des voix s’élèvent pour contester le bail accordé à Patel Engineering. Le leader de l’Opposition parlementaire, Paul Bérenger, a ainsi réclamé l’annulation de ce bail jugé trop avantageux. Selon lui, si le montant du loyer avait été calculé selon les dispositions légales, pour les dix premières années, il aurait dû atteindre Rs 1,3 milliard. Or, Patel Engineering n’aura reversé Rs 96,2 millions à l’État à l’expiration du bail.

La création d’une ville satellite à Highlands comme annoncé en 2004 reste également en suspens. On annonce désormais que les terres dédiées à ce projet devraient regrouper les casinos du pays, un parc de loisirs et d’autres projets d’intérêt public, parmi un centre de conduite et de formation.

C’est à la suite d’une étude du Bureau du Premier ministre que ce projet a été mis au frigo. Celle-ci a révélé que le promoteur aurait engrangé des profits de Rs 15,7 milliards, alors que le coût de construction d’espaces et de bureaux pour les départements ministériels sur une superficie de 1,9 million de pieds carrés a été évalué à Rs 3,8 milliards.

S’agissant de Centre Point à l’entrée de Trianon, le projet ne semble tenir qu’à un fil. Depuis plusieurs mois, le chantier est abandonné. Initialement, ce centre commercial devait démarrer ses opérations en 2009. La société promotrice Colliers International d’Afrique du Sud avait attribué le retard « à des imprévus ». Elle avait prévu d’investir Rs 1,2 milliard dans ce Mall « 5 étoiles ».