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Guillaume Branlat (Président de l’aéroport Roland Garros) Les travaux vont changer l’aérogare en profondeur

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Guillaume Branlat (Président de l’aéroport Roland Garros) Les travaux vont changer l’aérogare en profondeur | business-magazine.mu

Pouvez-vous nous présenter votre parcours avant la direction de l’aéroport ?

L’aviation est pour moi une continuité naturelle. Je suis fils d’aviateur et le petit-fils d’un des premiers aviateurs réunionnais. Pour l’anecdote, c’est mon grand-père qui a appris à piloter à Gérard Ethève, l’ancien dirigeant d’Air Austral. Je n’ai pas pu devenir pilote, même si j’ai tenté ma chance. Je me suis alors dirigé vers les bâtiments et travaux publics, en décrochant un diplôme d’ingénieur, spécialité génie civil maritime. À mon retour à La Réunion pour mon service national, j’ai trouvé de l’emploi dans un bureau d’études préalables dans le BTP (rénovations, réhabilitation) avant d’être maître d’œuvre technique.

Mais l’aérien a fini par me rattraper. En 2006, j’ai répondu à un appel à candidatures lancé par le Port et la Chambre de Commerce et d’Industrie qui cherchaient un chargé d’études et travaux. Reçu par le président de la CCIR de l’époque, Éric Magamootoo, qui ne m’embauche pas pour ce poste mais me propose une opportunité : devenir responsable travaux neufs pour l’aéroport Roland Garros.

J’ai pris le poste de directeur technique en 2011, celui de directeur des opérations en 2015 et celui de président en 2017. J’ai repris entre-temps les études pour acquérir des compétences en gestion d’entreprise, en passant un Executive Master à l’École Supérieure de Commerce de Paris, diplômé en 2016. Ce projet de nouvelle aérogare, j’y travaille depuis dix ans.

Quels sont les enjeux et la teneur du plan stratégique 2017- 2022 de l’aéroport ?

On pourrait le résumer en trois verbes : grandir, innover, émouvoir. Le trafic étant en croissance, l’aéroport doit s’agrandir pour permettre aussi à l’île de grandir et de se développer. Innover, puisque nous sommes une île qui est ambitieuse et nous pousse à être à la hauteur de son ambition. Le nouveau bâtiment fonctionnera avec les atouts de son climat et de façon respectueuse par rapport à l’environnement qui l’entoure. Émouvoir : ce que nous souhaitons, c’est que cet aéroport soit le préféré des Réunionnais. Les passagers qui empruntent l’aéroport doivent se sentir bien, et se sentir bien à La Réunion.

Quels sont les travaux qui seront entrepris ?

Ces travaux vont changer en profondeur l’aérogare. La transformation qui va s’opérer permettra dès 2020 d’optimiser la gestion des flux, d’améliorer le confort des passagers et d’accroître de façon substantielle les zones dédiées aux activités commerciales. Les travaux concernent une nouvelle aérogare située côté ouest de l’aérogare actuelle et destinée à traiter les arrivées, pour une capacité de cinq millions de passagers. À titre de comparaison, aujourd’hui, nous avons un trafic de 2,5 millions de passagers. Ce saut capacitaire nous permettra d’aborder les dix années à venir de manière sereine et avec une expérience passager satisfaisante.

Les travaux s’étaleront en deux tranches. Les travaux de la première tranche ont déjà démarré : l’emplacement de l’ancien fret ; en 2020, vers mai ou avril, on construira une nouvelle jetée à l’est de l’aérogare actuelle, qui va desservir deux postes d’avions avec des passerelles.

La deuxième tranche de travaux commencera à partir de 2022. Une fois que l’on aura livré la nouvelle aérogare ouest dédiée aux arrivées, on pourra travailler dans l’ancienne aérogare pour la fonction départ : extension du hall public et de la salle d’embarquement et création de deux nouveaux postes d’avions à l’ouest complétées par des jetées menant à ces postes.

Les travaux sur l’aéroport, c’est aussi la réorganisation des accès routiers et l’extension des parkings. Un nouvel ensemble immobilier va voir le jour à l’entrée de l’aéroport, comprenant un hôtel et des services. Nous menons également un projet de pôle aéronautique pour créer une filière d’excellence dans l’île.

Quel sera le coût de la nouvelle aérogare ?

L’investissement total est de 80 millions d’euros. Dans le détail, on recense 60 millions pour la construction et 20 millions pour les équipements, un marché de travaux important. Un appel d’offres lancé en octobre 2019. 1 500 à 2 000 emplois directs et indirects seront créés pendant la durée des travaux.

Quel est l’impact économique de l’aéroport actuellement ?

L’aéroport est un outil au service du territoire et au service de son développement. On a mesuré l’impact économique territoriale grâce à la méthode Local Footprint développée par l’agence locale Utopies : on remarque que l’aéroport totalise 3 181 emplois directs (pas seulement la société aéroportuaire mais tous les acteurs de l’aéroport) dans 107 établissements qui y travaillent.

L’aéroport, c’est une infrastructure et un pôle économique, autrement dit, 15 382 emplois indirects et induits. Au total, ce sont 18 563 emplois (6 % des emplois à La Réunion). La richesse générée par l’activité aéroportuaire représente 4 % du Pib (816 millions d’euros).

Si l’on décompose, la société aéroportuaire produit 48 millions d’euros du Pib, tandis que les acteurs aéroportuaires : les compagnies aériennes, les sociétés d’assistance, les restaurants, les commerces engrangent 170 millions d’euros. Si l’on ajoute les deux valeurs, on est à 220 millions d’euros produits sur la zone aéroportuaire.

L’activité aéroportuaire soutient les autres activités liées à l’aérien : le tourisme, l’exportation de fruits et légumes (et inversement) : 408 millions d’euros de richesse produite sur le territoire. On a mesuré l’effet de la croissance de l’aérien. On a constaté entre 2017 et 2018 une augmentation de 200 000 passagers, générant 217 emplois directs et 400 emplois indirects.

Quelle est votre ambition en termes de nombre de passagers ?

On projette à l’horizon 2030 d’accueillir 3,5 millions de passagers (soit 1 million de plus qu’aujourd’hui) et l’on devrait compter 3 185 emplois directs et indirects.

L’activité aéroportuaire soutient l’emploi par les chantiers mais également par son activité. Quelle sera la part des entreprises locales dans ces travaux ?

Notre engagement pour le territoire ne pouvait mieux se manifester que par un engagement envers les entreprises qui composent le territoire. Nous avons pris la présidence de l’association Stratégie du Bon Achat. Nous avons travaillé pour favoriser, stimuler l’accès pour les entreprises réunionnaises au marché public. Le début des travaux est prévu pour avril ou mai 2020. La mise en service interviendra avant le 31 juillet 2022.

Nous sommes autour de 16 et 20 lots, avec un allotissement conçu en collaboration avec l’Association pour le Développement des Industries de La Réunion, la Confédération des Petites et Moyennes Entreprises, le Mouvement des Entreprises de France, avec la Chambre de Commerce, la Chambre de Métiers et de l’Artisanat… Tous les acteurs économiques ont été associés à cet allotissement. Nous avons pu choisir des lots en fonction de ce qui était adapté au marché local ; on aura, par exemple, un lot pour le gros œuvre et un lot pour la charpente.

Les taxes d’aéroport augmenteront-elles pour compenser les travaux ?

Nous avons réussi l’équilibre parfait ; elles ne vont pas augmenter. Notre politique est de générer des revenus extra-aéronautiques pour être compétitifs sur les tarifs aéronautiques.

La nouvelle aérogare pourra accueillir quels types de porteurs ?

Nous pourrons accueillir tous les types d’avion qui volent aujourd’hui.