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Madagascar – Arison Jean Noël Andriambolanirina : «La Cour des Comptes devrait être totalement indépendante»

u003cpu003eu003cstrongu003eLa présentation du rapport public 2015 réalisé par la Cour des comptes laisse apparaître des dérives. Le président de lu0026rsquo;instance, Jean Noël Andriambolanirina préconise, dans ce contexte, des recadrages ainsi quu0026rsquo;une sincérité budgétaire lors de lu0026rsquo;établissement des prévisions.u003c/strongu003eu003c/pu003eu003cpu003eu003cstrongu003eu003cspan style=color:#ff0000;\u003eBUSINESSMAG. u003c/spanu003eVous avez récemment conduit la présentation du rapport public 2015 portant en partie sur lu0026rsquo;exécution des lois des Finances en 2009, 2010 et 2011. Or, cet exercice semblait avoir un accent de dénonciationu0026hellip;u003c/strongu003eu003c/pu003eu003cpu003eVous parlez de dénonciation. Il est fort possible que la façon dont nous avons présenté ce rapport public ait revêtu des allures accusatrices. Cependant, il est à rappeler que la Cour des comptes arbore aussi le statut de u0026laquo;haute juridictionu0026raquo;, dont la première mission est de déceler la vérité tout en démontrant une injustice quelconque. Cu0026rsquo;est pour cette raison que dans le rapport, aucun nom en particulier nu0026rsquo;a été pointé du doigt dans la mesure où les remarques sont destinées uniquement aux institutions. De ce fait, cu0026rsquo;est le terme u0026laquo;recadrageu0026raquo; qui se rapprocherait le plus de notre façon de faire.u003c/pu003eu003cpu003eu003cstrongu003eu003cspan style=color:#ff0000;\u003eBUSINESSMAG. u003c/spanu003eDans ce cas, mis à part la présentation elle-même, à quel moment recadrez-vous ?u003c/strongu003eu003c/pu003eu003cpu003ePour dire que la Cour juge les comptes et non les personnes. Nous nous adressons aux institutions concernées où lu0026rsquo;on a décelé des irrégularités. Nous leur suggérons des recommandations afin quu0026rsquo;elles puissent rectifier ces vices lors des prochains exercices comptables.u003c/pu003eu003cpu003eu003cstrongu003eu003cspan style=color:#ff0000;\u003eBUSINESSMAG. u003c/spanu003ePourquoi avoir tant attendu avant de rendre publiques ces informations ?u003c/strongu003eu003c/pu003eu003cpu003eEffectivement, des retards ont été notés dans lu0026rsquo;accomplissement des lois de règlement. Raison pour laquelle nous avons déjà commencé à rattraper ces retards en 2014 et 2015. Du0026rsquo;où lu0026rsquo;établissement des trois lois de règlement (soit 2009, 2010 et 2011). Concernant les raisons de ces retards, on ne va pas se voiler la face: des variables émanent de la Cour des comptes elle-même! Cependant, la Cour ne peut travailler sans matière première et, sur ce point, beaucoup du0026rsquo;institutions (ministères, communes, etc) peinent ou nu0026rsquo;arrivent littéralement pas à fournir leurs comptes de gestion dans les délais. Pourtant, sans ces comptes, nous ne pouvons effectuer nos contrôles.u003c/pu003eu003cpu003eu003cstrongu003eu003cspan style=color:#ff0000;\u003eBUSINESSMAG. u003c/spanu003eÀ propos de ces comptes de gestion, sur 1 549 communes, seules 111 sont tenues de les produire. Quant aux entreprises publiques, elles sont uniquement cinq sur 52 à avoir pu les produire entre 2010 et 2014u0026hellip;u003c/strongu003eu003c/pu003eu003cpu003eCe faible taux de production de comptes de gestion peut aussi être lu0026rsquo;une des causes du retard dans la réalisation du0026rsquo;un rapport du0026rsquo;une année du0026rsquo;exercice. Incontestablement, concernant les communes et établissements publics recensés, le nombre de comptes qui arrivent aux tribunaux pour être audités est plus que faible. Cela su0026rsquo;explique surtout par le fait que les textes de loi exigent que seules les institutions où sont postés les comptables du Trésor produisent ces comptes annuels.u003c/pu003eu003cpu003eu003cstrongu003eu003cspan style=color:#ff0000;\u003eBUSINESSMAG. u003c/spanu003eCes comptables du Trésor public arrivent-ils à assurer pleinement leur mission ?u003c/strongu003eu003c/pu003eu003cpu003eLe nombre de ces agents comptables en exercice est largement dépassé par le nombre du0026rsquo;institutions recensées. Lu0026rsquo;idéal serait donc quu0026rsquo;il y ait un comptable du Trésor dans chaque institution existante. Cependant, les moyens du Trésor ne permettent pas encore cette alternative. Par ailleurs, on peut aussi constater un besoin de formation ou, disons, de mise à jour des connaissances chez certains de ces agents par rapport à lu0026rsquo;établissement de comptes de gestion.u003c/pu003eu003cpu003eu003cstrongu003eu003cspan style=color:#ff0000;\u003eBUSINESSMAG. u003c/spanu003eLes dépassements de crédit enregistrés entre 2009 et 2011, dont fait mention le rapport affichent une augmentation de 198 %. Quelles en sont les principales raisons ?u003c/strongu003eu003c/pu003eu003cpu003eLorsquu0026rsquo;on aborde le sujet des dépassements de crédit, il est important de les classifier en deux parties. Tout du0026rsquo;abord, les crédits limitatifs dont les prévisions sont définies avec précision ne doivent être dépassées sous aucun prétexte. Par contre, les crédits évaluatifs, un peu comme les imprévus, sont difficilement définissables. La plupart du temps, cu0026rsquo;est sur cette deuxième partie que les dépassements de crédit se font le plus ressentir.u003c/pu003eu003cpu003eu003cstrongu003eu003cspan style=color:#ff0000;\u003eBUSINESSMAG. u003c/spanu003ePourtant, ces dépassements persistent et la hausse de certaines dépenses nu0026rsquo;y est pas étrangère : crédits alloués aux fêtes et cérémonies officielles, carburants et autres frais de communicationu0026hellip;u003c/strongu003eu003c/pu003eu003cpu003eCe sont des crédits limitatifs et les prévisions ont été revues à la hausse. Autant que possible, les dépassements doivent être bannis de la politique de gestion dans la mesure où les ordonnateurs et les comptables usent de lu0026rsquo;argent public via une autorisation parlementaire. Cependant, selon la Loi organique sur les lois des Finances (LOLF), des modifications sont permises sous certaines conditions, dont la loi du0026rsquo;asymétrie. En quelque sorte, il est interdit de transférer un crédit destiné à une rubrique de fonctionnement vers du0026rsquo;autres rubriques comme les fêtes ou le carburant. Les crédits limitatifs ne peuvent en aucun cas être dépassés sans revoir les prévisions budgétaires. Se pose alors la question de redevabilité envers le peuple dans la mesure où cu0026rsquo;est son argent qui est manipulé dans ces comptes publics.u003c/pu003eu003cpu003eu003cstrongu003eu003cspan style=color:#ff0000;\u003eBUSINESSMAG. u003c/spanu003eSelon ce même rapport, les taux du0026rsquo;investissement ont régressé de 13 %. Ce recul reflète-t-il la réalité économique du pays ?u003c/strongu003eu003c/pu003eu003cpu003eCu0026rsquo;est à partir de ses capacités du0026rsquo;investissement que lu0026rsquo;on juge de la bonne santé du0026rsquo;une économie. Ce quu0026rsquo;il faut savoir, cu0026rsquo;est que cette régression a été enregistrée alors même que nous étions en période de crise et que les mannes étrangères su0026rsquo;étaient raréfiées. Raison pour laquelle ce chiffre régressif a été constaté entre 2009 et 2011. Ainsi, pas du0026rsquo;investisseur, pas du0026rsquo;investissement.u003c/pu003eu003cpu003eu003cstrongu003eu003cspan style=color:#ff0000;\u003eBUSINESSMAG. u003c/spanu003eAu-delà de recommandations et du0026rsquo;un recadrage, la Cour des comptes est-elle habilitée à prendre des mesures de sanction par rapport aux irrégularités afin de redresser les indicateurs ?u003c/strongu003eu003c/pu003eu003cpu003eIl est important de considérer les contrôles avant les sanctions. Déjà, avec ces contrôles, du0026rsquo;innombrables irrégularités sont encore enregistrées. Dans ces cas-là, la Cour intervient pour recadrer les systèmes de gestion de ces institutions en demandant, justement, u0026laquo;des comptesu0026raquo;. Si, par la suite, les principaux concernés ne sont pas encore en mesure de fournir des pièces ou des explications valides concernant les irrégularités, la Cour sera habilitée à demander un remboursement à lu0026rsquo;agent comptable concerné.u003c/pu003eu003cpu003eSi, au cours de ses contrôles, la Cour découvre des fautes de gestion imputables à un ordonnateur, elle saisit le Conseil de discipline budgétaire et financière. Et si les fautes ont un caractère de crime ou de délit, comme dans les cas de détournement de deniers publics, lu0026rsquo;affaire est alors déférée devant les juges judiciaires.u003c/pu003eu003cpu003eu003cstrongu003eu003cspan style=color:#ff0000;\u003eBUSINESSMAG. u003c/spanu003eEst-il possible, selon vous, du0026rsquo;améliorer le respect des procédures pour les années du0026rsquo;exercices à veniru0026nbsp; et par la même occasion, de réduire les déficits et les dépenses de lu0026rsquo;État ?u003c/strongu003eu003c/pu003eu003cpu003eCu0026rsquo;est tout bonnement notre objectif ultime. Néanmoins, il est important que chacune des institutions applique le concept de u0026laquo;sincérité budgétaireu0026raquo;. En effet, il y a des évaluations prévisionnelles qui ne correspondent aucunement aux exécutions, recettes et dépenses effectuées. Tandis que du0026rsquo;autres se contentent du0026rsquo;établir des évaluations par reconduction tacite du budget précédent. Ce qui fausse inévitablement le budget de certaines rubriques de la loi de Finances.u003c/pu003eu003cpu003eu003cstrongu003eu003cspan style=color:#ff0000;\u003eBUSINESSMAG. u003c/spanu003eLa Cour des comptes se donne-t-elle les moyens du0026rsquo;atteindre cet u0026laquo;objectif ultimeu0026raquo; ?u003c/strongu003eu003c/pu003eu003cpu003ePour ce qui est des moyens, beaucoup du0026rsquo;effort reste à fournir afin que notre institution puisse atteindre sa vitesse de croisière. On pourrait citer ici lu0026rsquo;insuffisance des ressources humaines par rapport au volume de travail. À Madagascar, il y a seulement 48 juges siégeant en cour alors quu0026rsquo;au Maroc, par exemple, le nombre de juges su0026rsquo;élève à plus de 300. Sans mentionner la vétusté de notre matériel et le besoin de renforcer les compétences.u003c/pu003eu003cpu003eEn sus, le rattachement institutionnel inapproprié de la Cour des comptes risque de compromettre notre indépendance. En effet, la Cour des comptes devrait être totalement indépendante du fait de son statut de haute juridiction, sans quoi elle ne pourra librement contrôler les finances publiques.u003c/pu003e

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