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Interview Rencontre

«Les investisseurs sont de plus en plus demandeurs d’opportunités d’investissement responsables»

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Mark Van Beuningen (Group CEO et Executive Director, CIM Finance)

Mark Van Beuningen (Group CEO et Executive Director, CIM Finance)Faciliter le financement de projets qui contribuent à une économie neutre en carbone. Telle est l’ambition de Cim Financial Services, qui lance les premières obligations vertes de Maurice. Mark van Beuningen, le Group CEO et Executive Director de cette institution financière non bancaire, nous en parle.

Cim Finance s’ouvre au marché des obligations vertes. Comment expliquer l’engouement pour ce type de financement ?

C’est un fait : pour réussir la transition énergétique, qui est notre responsabilité commune, les seuls fonds publics ne suffiront pas. Il est essentiel d’exploiter le plus grand marché de financement de tous, celui des obligations. Les obligations vertes sont adaptées au financement de projets de durabilité à grande échelle tels que le développement éolien et solaire, qui nécessitent souvent d’importants capitaux avant de générer des revenus. Les institutions financières comme la nôtre ont un rôle capital à jouer pour mettre à la disposition des investisseurs ces nouveaux produits.

Vous avez raison de parler d’engouement. Partout dans le monde, les Green Bonds connaissent un succès impressionnant. En Europe, ce marché a atteint les 800 milliards d’euros en 2021, six fois plus qu’il y a cinq ans ! Et la rentabilité de ces fonds semble supérieure à celle des fonds classiques. Les investisseurs voient dans les «green bonds» le moyen de concilier obligation de rendement et conscience écologique. Ils sont de plus en plus demandeurs d’opportunités d’investissement responsables.

«Les investisseurs voient dans les ‘green bonds’ le moyen de concilier obligation de rendement et conscience écologique»

C’est une grande satisfaction de permettre à Maurice de rejoindre cette tendance mondiale destinée à prendre de l’ampleur. Le financement vert est on ne peut plus nécessaire pour nous qui sommes une île… Entre la montée des eaux qui ruine nos plages au stress que représente l’approvisionnement en eau potable, l’impact du changement climatique sur notre environnement est une préoccupation majeure et le défi, immense. Il est fondamental que les secteurs public et privé travaillent ensemble à mettre en œuvre une stratégie holistique de développement vert pour Maurice. Nous avons d’ailleurs observé avec beaucoup de plaisir cette synergie à l’œuvre dans le cadre du lancement de notre Green Funding Programme.

Vous êtes la première compagnie mauricienne à émettre des obligations vertes. Qu’est-ce qui a motivé cette démarche ?

Nous sommes très heureux d’être les premiers à lancer ce programme d’obligations vertes. Tout comme nous avons été les pionniers sur le marché du leasing, nous ouvrons aujourd’hui la voie au financement vert. Et c’est une grande fierté.

En tant qu’institution financière, nous estimons avoir, comme je vous l’ai dit, un rôle de premier plan à jouer dans la transition énergétique. En réalité, notre choix de nous lancer dans un Green Funding Programme est tout à fait cohérent avec notre raison d’être. Chez Cim Finance, notre mission est d’améliorer le cadre de vie du Mauricien : comment lui garantir cette vie meilleure si nous ne participons pas activement à construire un avenir plus vert ? Ce programme est une façon concrète de démontrer notre engagement en faveur d’un développement durable, mais aussi l’importance que nous accordons à une pratique commerciale responsable.

Depuis 35 ans, nous proposons des solutions de crédit à la consommation à nos clients ; nous estimons que cela relève de notre devoir d’influencer positivement leurs comportements d’achat. Lorsque nous aidons les 278 000 familles mauriciennes qui composent aujourd’hui cette clientèle à améliorer leur niveau de vie, la consommation augmente forcément et l’impact sur notre environnement et nos ressources également. Nous pouvons aider l’adoption de comportements plus durables, et ainsi contribuer à protéger l’environnement du pays.

Votre ambition est de lever Rs 3 milliards au cours des cinq prochaines années. À quoi serviront les fonds issus de cette première émission de Rs 500 millions lancée cette année ?

Nous sommes impressionnés, en tant que société de leasing automobile, par le potentiel des dernières technologies en matière de mobilité électrique. Nous voulons encourager l’usage de voitures avec un taux d’émissions n’excédant pas 79g de CO2 au kilomètre pour mieux préserver la qualité de notre air. Nous avons donc créé une offre de Green Lease, lancée en novembre. Et ces premières Rs 500 millions serviront à financer les Green Leases et d’autres projets verts.

Partout dans le monde, les constructeurs automobiles s’engagent à «shifter» vers les voitures moins polluantes. Nous voulons aider les Mauriciens à saisir cette opportunité de réduire leurs émissions carbone en leur facilitant l’acquisition d’un véhicule vert. Cette solution de crédit s’étendra à une variété d’équipements devant servir à alimenter le véhicule. Il peut prendre ainsi avantage d’un «package» incluant le financement de panneaux photovoltaïques ou de bornes de recharge solaires à installer à la maison.

Vous avez identifié cinq catégories de projets où il existe une demande pour du financement vert. Quelles sont-elles ?

La première catégorie de projets est celle que nous avons évoquée, le transport «propre», qui inclut l’achat de voitures électriques et hybrides, mais aussi des projets d’infrastructure pour le transport en commun. Il y a ensuite l’achat, l’installation et l’entretien d’équipements qui utilisent des sources d’énergies renouvelables, tels que les panneaux solaires. La troisième catégorie concerne les initiatives qui promeuvent l’efficacité énergétique, c’està-dire les projets qui réduisent la consommation d’énergie ou atténuent les émissions de gaz à effet de serre, notamment dans NOTRE INVITÉ la construction.

Il y a aussi la gestion durable de l’eau et des eaux usées, les projets qui améliorent la qualité, l’efficacité et la conservation de l’eau, et enfin le bâtiment écologique, c’est-à-dire la construction ou la rénovation de bâtiments certifiés durables.

Qui peut acheter des Green Bonds ?

Comme pour tout marché obligataire, la principale clientèle des obligations vertes est en général les investisseurs institutionnels, comme les fonds de pension, les compagnies d’assurances et les Asset Managers, qui s’intéressent à investir dans les obligations vertes. Mais notre produit s’adresse à tous, toute personne ou entreprise, petite ou grande, à la recherche d’endroits «responsables» ou «durables» où placer son argent, souhaitant financer des projets susceptibles d’avoir un impact environnemental et social positif. Ils peuvent s’adresser à un courtier ou se renseigner auprès de leurs conseillers financiers afin de bien saisir les règlements applicables à l’achat d’obligations vertes.

Le produit de ces obligations vertes sera-t-il versé dans un fonds dédié ? Comment serat-il administré ?

Par souci de transparence, des critères sont établis pour sélectionner les projets qui sont éligibles à un financement par des obligations vertes. Ces critères sont explicités dans notre Green Bond Framework, qui a été développé en conformité avec le cadre de l’International Capital Markets Association (ICMA), l’autorité de référence dans ce domaine, et les directives de la FSC sur l’émission d’obligations vertes. Ce document détaille aussi le cadre de fonctionnement pour ces obligations : l’utilisation et la gestion des fonds levés par l’émission ainsi que le “reporting”. Une telle surveillance est nécessaire dans la mesure où le dynamisme des green bonds peut attirer des investisseurs moins scrupuleux. Il s’agit de préserver à tout prix la confiance entre les investisseurs et leurs fonds d’investissement.

Des équipes spécialisées, en interne, seront chargées de sélectionner les actifs potentiellement admissibles en fonction des critères d’admissibilité des obligations vertes. Nos équipes ont été formées par le cabinet Dynamia. Le rôle de ce consultant en matière d’évaluation de la responsabilité sociale des entreprises (RSE) a consisté, entre autres, à définir les projets susceptibles d’être financés, à mettre en place des KPI (Key Performance Indicators) et à élaborer une méthodologie pour mesurer la performance environnementale afin de faciliter un reporting clair et transparent. Notre rapport sur les obligations vertes sera publié sur notre site Web dans l’année qui suit l’émission. Il détaillera le montant total des actifs du portefeuille d’obligations vertes, les fonds alloués aux projets sélectionnés, entre autres.

Le montage pour un produit financier aussi complexe que l’obligation verte exige une vraie expertise. Dans le cas de votre Green Funding Programme, comment avez-vous procédé ?

Nous avons eu beaucoup de chance. Nous avons pu bénéficier de l’accompagnement éclairé des officiers de la Financial Services Commission et des Guidelines For Issue Of Corporate And Green Bonds qu’ils ont mis en place. Et nous avons eu, pour développer notre cadre, des partenaires de grand calibre, profondément engagés en faveur de la cause verte, ainsi que les meilleurs experts en développement de produits financiers. La société IZAR Ltd nous a aidé à mettre en place un cadre adapté aux spécificités de notre activité. La Hong Kong Bank, qui est connue pour avoir de fortes ambitions en matière de stratégie verte, a mis son expérience internationale au service de Cim Finance. Et enfin, Dynamia, a apporté son expertise en matière de solutions durables en assurant l’alignement de cette première obligation verte mauricienne sur les meilleures pratiques internationales.

Notre cadre est solide, et c’est tant mieux car étant les pionniers, nous avons la responsabilité de faire de notre programme un exemple et un succès. Nous sommes convaincus que les obligations vertes sont aujourd’hui une partie de la solution au défi climatique. Et qu’elles deviendront dans un avenir proche, la norme pour les entreprises. Nous sommes déterminés à promouvoir les principes des obligations vertes, à garantir la transparence de nos rapports et à travailler avec les autorités et les entreprises qui souhaitent faire la différence pour renforcer ces principes et à créer un marché qui soutiendra le développement durable pour les décennies à venir. C’est ainsi que nous pourrons relever le défi climatique.

 

 

 

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