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Sylvan Oxenham : «L’industrie locale ne doit pas perdre de vue la troisième révolution industrielle»

u003cpu003eu003cstrongu003eLu0026rsquo;industrie locale doit innover et su0026rsquo;adapter aux défis de la mondialisation. Tout en développant un marché à lu0026rsquo;exportation, elle doit su0026rsquo;atteler à conquérir le marché intérieur, insiste le président deu0026nbsp; lu0026rsquo;Association of Mauritian Manufacturers. Il lance un appel aux autorités pour quu0026rsquo;elles viennent de lu0026rsquo;avant avec des mesures pro-industrie fortes.u003c/strongu003eu003c/pu003eu003cp style=margin-left:14.0pt;\u003eu003cstrongu003eu003cspan style=color:#ff8c00;\u003eBUSINESSMAGu003c/spanu003e. Après 20 ans du0026rsquo;existence, nu0026rsquo;est-il pas temps pour lu0026rsquo;Association of Mauritian Manufacturers de se remettre en question ?u003c/strongu003eu003c/pu003eu003cpu003eEn effet, le monde bouge, les institutions du secteur privé mauricien bougent, 2015 a vu la fusion du Joint Economic Council (JEC) et de la Mauritius Employersu0026rsquo; Federation (MEF) pour donner naissance à Business Mauritius. Alors que la Mauritius Sugar Producers Association (MSPA) a été dissoute.u003c/pu003eu003cpu003eLes 20 ans de lu0026rsquo;Association of Mauritian Manufacturers (AMM) constituent surtout lu0026rsquo;occasion de regarder vers le futur avec en vue une troisième révolution industrielle qui va bouleverser le paysage économique.u003c/pu003eu003cpu003eCela dit, nous devons voir comment nous pouvons adapter notre offre. Mais nous ne sommes pas seuls à nous occuper de lu0026rsquo;industrie. Il y a aussi la Mauritius Chamber of Commerce and Industry (MCCI), qui a 165 ans. Cu0026rsquo;est notre partenaire historique, car la création de lu0026rsquo;AMM a été initiée par la MCCI. Il faut également compter avec la Mauritius Export Association, lu0026rsquo;association des exportateurs qui a bientôt 40 ans, avec laquelle nous discutons.u003c/pu003eu003cpu003eNous devons prendre en considération les spécificités de chacun, allier nos forces, éviter les doublons et progresser ensemble.u003c/pu003eu003cp style=margin-left:14.0pt;\u003eu003cstrongu003eu003cspan style=color:#ff8c00;\u003eBUSINESSMAGu003c/spanu003e. Le moment nu0026rsquo;est-il pas propice à une réflexion sur la nécessité de valoriser le label u0026laquo;Made in Morisu0026raquo; ?u003c/strongu003eu003c/pu003eu003cpu003eSi nous voulons exporter et innover, nous devons être forts sur notre marché intérieur. Notre objectif est donc la reconquête des parts de marché sur notre marché local.u003c/pu003eu003cpu003eNous sommes déjà bien partis avec le u003cemu003eMade in Morisu003c/emu003e pour convaincre les consommateurs du0026#39;acheter les produits du0026rsquo;ici à qualité égale et prix égal.u003c/pu003eu003cpu003eLe u003cemu003eMade in Morisu003c/emu003e est aujourdu0026rsquo;hui passé dans le langage courant pour devenir une appellation générique qui a pris une valeur tangible parce quu0026rsquo;elle contribue à définir une identité commune pour notre pays.u003c/pu003eu003cpu003eCette reconnaissance du u003cemu003eMade in Morisu003c/emu003e, de ce que nous sommes, implique lu0026rsquo;envie instinctif, naturel et culturel des Mauriciens de consommer des produits locaux. Cette marque est un socle pour construire lu0026rsquo;adhésion, la confiance, la fierté et donc pour permettre une émulation de notre créativité au sens large.u003c/pu003eu003cpu003eLe nouveau chantier que nous lançons en 2016 est celui du0026rsquo;une Buy Mauritian Act. Le Public procurement, qui est en pleine évolution avec la mise en ligne des appels du0026rsquo;offres publics, doit devenir un levier de développement et de la valeur ajoutée locale.u003c/pu003eu003cpu003eIl ne suffit pas de donner une préférence de prix aux produits locaux. Il faut veiller de façon volontariste et légale, grâce aux clauses des cahiers des charges, quu0026rsquo;il y ait un contenu national minimum dans les approvisionnements du gouvernement, pouvant aller de 50 % à près de 100 % dans certains cas quand existe une production locale équivalente. Imaginons que le projet du0026rsquo;un repas chaud dans les écoles aille de lu0026rsquo;avant avec les critères suivants : saisonnalité, fraîcheur, qualité spécifique des produits et traçabilité. Ce seront autant du0026rsquo;avantages compétitifs pour la filière fruits et légumes, et lu0026rsquo;agroalimentaire. Imaginons des banquets et des réceptions officielles où lu0026rsquo;on prendrait le soin de ne servir que des produits locaux. Imaginons des infrastructures et bâtiments publics qui bénéficient aux producteurs locaux en incluant dans le cahier des charges des matériaux adaptés au climat tropical. Imaginons que les bus importés soient tous montés ici. Le pays et lu0026rsquo;emploi seraient gagnants.u003c/pu003eu003cp style=margin-left:14.0pt;\u003eu003cstrongu003eu003cspan style=color:#ff8c00;\u003eBUSINESSMAGu003c/spanu003e. Quelles sont les grandes priorités de lu0026rsquo;AMM pour lu0026rsquo;industrie locale en cette année 2016 ?u003c/strongu003eu003c/pu003eu003cpu003eDu0026rsquo;abord, il su0026rsquo;agira de consolider le u003cemu003eMade in Morisu003c/emu003e, notre marque ombrelle que nous portons dans nos tripes. Lors de son discours à notre soirée de gala, le Premier ministre a défendu le u003cemu003eMade in Morisu003c/emu003e et a encouragé les Mauriciens à consommer des produits locaux.u003c/pu003eu003cpu003eNotre marque rassemble à ce jour plus de 80 entreprises dont 15 PME, 165 marques et plus de 2 500 produits. Elle continuera à recruter des PME dans de nouveaux secteurs. Du0026rsquo;abord, des marques locales, développées par des PME, qui souffrent de la concurrence des marques internationales au budget marketing sans commune mesure avec leurs moyens. Puis, les produits culturels et créatifs dont lu0026rsquo;édition de livres, de musiques et de films, une industrie naissante, vivace et dynamique, de même que les éditeurs de logiciels qui sont venus nous rejoindre, renforçant la valeur de la marque et son ancrage identitaire.u003c/pu003eu003cpu003eBientôt, ce seront, nous lu0026rsquo;espérons, les produits agricoles de la Smart agriculture qui adhéreront, et les entreprises dans le secteur des services. Nous avons pour cette marque de lu0026rsquo;ambition et des projets à revendre : donner du sens et du contenu à lu0026rsquo;acte du0026rsquo;achat local.u003c/pu003eu003cpu003eAutres axes du0026rsquo;effort : partager les bonnes pratiques pour améliorer la performance industrielle et accompagner lu0026rsquo;industrie dans sa transition écologique. Lu0026rsquo;AMM travaille depuis trois ans, sous lu0026rsquo;égide du JEC/Business Mauritius, avec les ministères compétents et les bailleurs de fonds internationaux pour des projets ayant un impact national comme le Programme National de lu0026rsquo;Efficacité Énergétique et celui à venir des déchets industriels. En cette année 2016, nous allons continuer à y consacrer une bonne partie de nos ressources.u003c/pu003eu003cpu003eDe plus, nous fédérons depuis peu les entreprises du secteur photovoltaïque et solaire. Cu0026rsquo;est un secteur émergent et plein de promesses car la contribution de Maurice à la COP21 contient des décisions politiques vers un mix énergétique plus ambitieux.u003c/pu003eu003cpu003eMais les initiatives sont bloquées par beaucoup du0026rsquo;obstacles réglementaires et tarifaires, entre autres. Nous devons travailler à faire évoluer cet environnement car plus de Rs 1 milliard du0026rsquo;investissements sont en attente. Aujourdu0026rsquo;hui, nous sommes capables de développer des énergies renouvelables de sources diverses, que lu0026rsquo;on apprend à stocker. Demain nous construirons des bâtiments à énergie positive. Dans les zones industrielles, les PME pourront ainsi faire de la cogénération électrique.u003c/pu003eu003cpu003eEnfin, lu0026rsquo;axe de la coopération régionale fait partie de notre plan du0026rsquo;action. Nous croyons au développement de partenariats industriels dans la zone de lu0026rsquo;océan Indien, notamment avec nos collègues industriels de La Réunion. Des initiatives seront prises pour nous engager résolument dans cette voie stratégique.u003c/pu003eu003cp style=margin-left:14.0pt;\u003eu003cstrongu003eu003cspan style=color:#ff8c00;\u003eBUSINESSMAGu003c/spanu003e. Dans quelle mesure les stratégies de lu0026rsquo;AMM en faveur du développement de lu0026rsquo;industrie locale cadrent-elles avec la Vision 2030 ?u003c/strongu003eu003c/pu003eu003cpu003eLe nouveau modèle de développement économique décrit dans la Vision 2030 énoncée par le Premier ministre pose comme priorité la relance du secteur manufacturier. Lu0026rsquo;objectif est de porter sa contribution au PIB de 16 % à 25 %. Cu0026rsquo;est une excellente nouvelle car la désindustrialisation est en marche.u003c/pu003eu003cpu003eLu0026rsquo;une des causes de cette désindustrialisation a été la libéralisation extrême des tarifs douaniers en 2006 qui su0026rsquo;est traduite par une dégradation considérable du déficit commercial. En dix ans, le déficit commercial est passé de 10 % du PIB à 25 %, soit Rs 125 milliards, un montant supérieur au budget national du pays.u003c/pu003eu003cpu003eLes chiffres du commerce extérieur sont parlants : il y a trop du0026rsquo;importations de produits de consommation de base et pas assez du0026rsquo;équipements productifs, générateurs de valeur ajoutée locale et du0026rsquo;innovation.u003c/pu003eu003cpu003eLa reconquête industrielle est un enjeu que défend activement lu0026rsquo;AMM. Nous travaillons avec nos collègues de la Commission Industrie de la MCCI sur des propositions pour rétablir le taux de croissance industrielle de 5 – 6 % par an. Il y est beaucoup question du0026rsquo;innovation.u003c/pu003eu003cpu003eNous attendons du Budget 2016 quu0026rsquo;il soit la nouvelle boîte à outils de la reconquête industrielle. Il faut des mesures pro-industries fortes.u003c/pu003eu003cpu003eLa question de la différenciation fiscale en faveur de lu0026rsquo;industrie est donc incontournable. Il faut rendre lu0026rsquo;investissement industriel attrayant pour les investissements étrangers dans des secteurs de haute technologie, car nous sommes en concurrence avec Singapour et lu0026rsquo;Irlande, mais aussi avec les pays africains qui créent des forfaits incitatifs, à lu0026rsquo;instar du Maroc.u003c/pu003eu003cpu003eMais il faut aussi su0026rsquo;attaquer à la frilosité des investisseurs locaux vis-à-vis de lu0026rsquo;industrie qui souffre du0026rsquo;une désaffection par rapport à des secteurs plus spéculatifs. Quand on investit dans lu0026rsquo;industrie, cu0026rsquo;est une prise de risque de long terme, avec des questions de compétitivité sous-jacentes.u003c/pu003eu003cpu003eLes outils à mettre en place doivent récompenser cette prise de risque, promouvoir lu0026rsquo;innovation et la productivité, et compenser les coûts des intrants et des utilités.u003c/pu003eu003cp style=margin-left:14.0pt;\u003eu003cstrongu003eu003cspan style=color:#ff8c00;\u003eBUSINESSMAGu003c/spanu003e. Dans le contexte de la régionalisation, quel soutien apportez-vous aux entreprises mauriciennes qui comptent su0026rsquo;installer en Afrique ?u003c/strongu003eu003c/pu003eu003cpu003ePour lu0026rsquo;industrie locale, il y a consensus pour dire que notre croissance externe passe par lu0026rsquo;Afrique, mais que cu0026rsquo;est très difficile. Le pari est très risqué.u003c/pu003eu003cpu003eCe qui explique que les précurseurs ont été les grands groupes mauriciens. À titre du0026rsquo;exemple, à Madagascar, nous comptons Food u0026amp; Allied et UBP au Mozambique, Innodis, entre autres.u003c/pu003eu003cpu003eMais depuis peu, des entreprises mauriciennes, petites et moyennes, ouvrent des filiales et su0026rsquo;engagent dans des joint-ventures aux Seychelles, au Mozambique, en Afrique du Sud, au Kenya, en Tanzanie, en Ouganda et au Rwanda.u003c/pu003eu003cpu003eLe plus ancien de nos membres, Forges Tardieu, spécialisée dans la mécanique industrielle, lu0026#39;ingénierie et lu0026rsquo;intégration des process industriels, fait figure de pionnier et opère non seulement en Afrique, mais aussi sur les quatre continents. Cu0026rsquo;est dire quu0026rsquo;il y a une niche à prendre pour lu0026rsquo;expertise mauricienne industrielle.u003c/pu003eu003cpu003eNous suivons avec intérêt les initiatives du gouvernement avec le Mauritius Africa Fund en vue de créer des zones économiques spéciales. Nous avons besoin de partir en jouant groupé, avec le soutien du gouvernement, en créant des synergies entre nous.u003c/pu003eu003cpu003eLe Ghana est le premier cas du0026rsquo;école. Nous réfléchissons à une initiative de type clustering pour mutualiser les coûts et mitiger les risques dans lu0026rsquo;approche de ces marchés.u003c/pu003eu003cp style=margin-left:14.0pt;\u003eu003cstrongu003eu003cspan style=color:#ff8c00;\u003eBUSINESSMAGu003c/spanu003e. Le textile local est dans une passe difficile, avec notamment la délocalisation probable de CMT à Madagascar ou encore la mise en liquidation de Corona Textile. Quelle est votre analyse de la situation ?u003c/strongu003eu003c/pu003eu003cpu003eJe ne suis pas un spécialiste du textile, mais des analyses, il ressort que le business model sur lequel le développement du textile a été fondé (bas salaire, préférences pour lu0026rsquo;accès aux marchés, et taux de change favorable) vacille sous lu0026rsquo;effet de lu0026rsquo;émergence de géants industriels et de la mondialisation.u003c/pu003eu003cpu003eDe plus, notre propre positionnement de pays à haut revenu questionne fortement ce modèle. Les délocalisations sont incontournables, mais il faut aussi se repositionner sur des tâches à plus forte valeur ajoutée. Cela ne veut pas dire que ces groupes mauriciens qui sont des u003cemu003eworld classu003cbr /u003e playersu003c/emu003e vont disparaître. Ils vont su0026rsquo;adapter.u003c/pu003eu003cp style=margin-left:14.0pt;\u003eu003cstrongu003eu003cspan style=color:#ff8c00;\u003eBUSINESSMAGu003c/spanu003e. Vous avez évoqué le développement de lu0026rsquo;industrie 3.0. Comment lu0026rsquo;AMM participe-t-elle à la création de cette nouvelle ère ? u003c/strongu003eu003c/pu003eu003cpu003eBeaucoup de changements nous attendent avec une alliance des hautes technologies, de la robotique et des ressources humaines. Les anciens modèles économiques sont menacés par la numérisation de lu0026rsquo;économie.u003c/pu003eu003cpu003eNotre monde va devenir plus que jamais un village global. En même temps, nous devrons veiller à ne pas aller vers lu0026rsquo;uniformisation de la consommation et au contraire à renforcer lu0026rsquo;identité de nos produits.u003c/pu003eu003cpu003eNous devons nous spécialiser pour développer des produits et solutions qui sont propres à notre environnement tropical, aux besoins de nos populations. Cu0026rsquo;est un changement de culture dont nous avons besoin. Il faudra favoriser des collaborations structurelles entre nos universités et les centres de recherche, du0026rsquo;une part, et les entreprises, du0026rsquo;autre part, sous forme du0026rsquo;incubateurs, du0026rsquo;accélérateurs, de plateformes technologiques, bourses pour la recherche, entre autres. Il faut regrouper nos forces pour créer des synergies sous forme de clusterings.u003c/pu003eu003cpu003eGrâce à nos spécificités du0026rsquo;île tropicale, nous disposons de cartes maîtresses en matière du0026rsquo;agroalimentaire, de biodiversité marine et végétale et de développement de ressources énergétiques renouvelables. Nous économiserons nos matières premières grâce à lu0026rsquo;écoconception des produits. Nous développerons de nouvelles activités industrielles de recyclage des déchets. Nos modes de transport seront moins énergivores.u003c/pu003eu003cpu003eLu0026rsquo;intelligence artificielle sera partout, les nouvelles techniques de vente vont privilégier la personnalisation des produits. Et les circuits de distribution entre producteurs et consommateurs seront beaucoup plus directs. Tout cela impactera lu0026rsquo;organisation du travail en termes de qualifications, de hiérarchie, et fera appel à plus en plus de créativité de la part de lu0026rsquo;homme.u003c/pu003eu003cpu003eLu0026rsquo;AMM doit permettre à ses membres de mieux anticiper ces changements et de mieux les appréhender en favorisant des cellules de réflexion prospectives, et en se rapprochant des acteurs locaux du numérique comme la Mauritius IT Industry Association et lu0026rsquo;Outsourcing and Telecommunications Association of Mauritius, qui ont beaucoup à nous apprendre et à nous apporter en termes du0026rsquo;outils qui favoriseront notre productivité et notre adaptation.u003c/pu003e

Nous sommes déjà bien partis avec le Made in Moris pour convaincre les consommateurs d’acheter les produits d’ici à qualité égale et prix égal.

 

L’une des conséquences de la désindustrialisation a été la libéralisation extrême des tarifs douaniers…

 

Développer des produits et solutions propres à notre environnement tropical, aux besoins de nos populations

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