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Le développement durable peut-il réconcilier l’économie et l’écologie ?

u003cpu003eLe 5 février, le site web lemonde.fr affichait un titre très parlant qui reprend une déclaration du0026rsquo;un professeur du0026rsquo;économie du climat à lu0026rsquo;Université Paris-Dauphine : u0026laquo;Lu0026rsquo;économie est lu0026rsquo;un des outils les plus efficaces pour combattre le changement climatiqueu0026raquo;. Cu0026rsquo;est un sujet qui divise plus quu0026rsquo;il ne rassemble. Car lu0026rsquo;économie est souvent opposée à lu0026rsquo;écologie comme si elles étaient incompatibles. En fait, il est possible de les réconcilier. Cependant, lu0026rsquo;approche pour arriver à cet objectif diffère selon quu0026rsquo;on utilise lu0026rsquo;instrument politique du développement durable ou le mécanisme économique du marché.u003c/pu003eu003cpu003eIl y a une approche profane et une approche notionnelle du développement durable. Lu0026rsquo;approche profane consiste à définir le développement durable comme un développement qui dure. Ici, durable signifie continu. Qui ne voudrait pas que le développement soit durable ?u003cbr /u003e On veut tous une croissance économique continue. On parle de croissance soutenue.u003c/pu003eu003cpu003eLu0026rsquo;économie mauricienne croît de manière soutenue : de 1984 à 2014, elle a connu une croissance réelle cumulative de 352 %. Donc, notre niveau de développement est 3,5 fois plus élevé aujourdu0026rsquo;hui quu0026rsquo;il y a 30 ans.u003c/pu003eu003cpu003eNe confondons pas soutenu et soutenable. Dans lu0026rsquo;approche notionnelle du développement durable, il est question de développement soutenable. Dans un célèbre rapport u0026laquo;Notre avenir communu0026raquo; (1987), Gro Harlem Brundtland, ancien Premier ministre de la Norvège et ancienne directrice générale de lu0026rsquo;Organisation mondiale de la Santé, définit le développement soutenable comme étant u0026laquo;lu0026rsquo;exigence de répondre aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures de répondre à leurs propres besoinsu0026raquo;.u003c/pu003eu003cpu003eCu0026rsquo;est un concept racoleur, puisque tout le monde travaille pour laisser un héritage à ses enfants. Le pro-blème est que les écologistes lu0026rsquo;utilisent pour remettre en cause lu0026rsquo;économie de marché et proposer un modèle de développement alternatif. Ils avancent principalement trois arguments.u003c/pu003eu003cpu003eLe premier, cu0026rsquo;est que lu0026rsquo;économie de marché ne peut pas assurer une croissance infinie avec des ressources limitées. Il y a là un double rejet de la croissance et de lu0026rsquo;économie de marché, ce qui est un hommage involontaire à la capacité de lu0026rsquo;économie de marché de générer de la croissance.u003c/pu003eu003cpu003eLe deuxième argument, cu0026rsquo;est de dire que le développement nu0026rsquo;est durable que su0026rsquo;il y a croissance zéro, voire décroissance (les modérés diront u0026laquo;croissance contrôléeu0026raquo;). Cette position des écologistes est en contradiction avec la notion profane de développement continu, du0026rsquo;où le fait que les partis écologistes peuvent difficilement convaincre les électeurs de voter pour eux.u003c/pu003eu003cpu003eIl ne faut pas oublier quu0026rsquo;il existe encore beaucoup de pauvres à Maurice et ailleurs. Pour citer un ancien ministre de lu0026rsquo;Environnement et du Développement durable, u0026laquo;une personne sur sept dans le monde va dormir le ventre vide chaque soir. En outre, quelque 20 000 enfants de moins de cinq ans meurent de faim chaque jour, alors quu0026rsquo;ironiquement, 1,3 milliard de tonnes de nourriture sont gaspillées chaque annéeu0026raquo;. On peut aisément comprendre pourquoi les deux pays les plus surpeuplés, lu0026rsquo;Inde et la Chine, qui sont aussi des économies polluantes, ne su0026rsquo;intéressent pas vraiment à la notion de développement durable.u003c/pu003eu003cpu003ePour sortir de leur contradiction, les écologistes prônent lu0026rsquo;économie stationnaire avec pour modalité la redistribution. Du0026rsquo;où leur troisième argument : le développement durable passe par lu0026rsquo;économie du partage. Cu0026rsquo;est lu0026rsquo;État qui assurera une répartition équitable des richesses.u003c/pu003eu003cpu003eLes arguments des écologistes paraissent spécieux, et il convient de démontrer leur sophisme.u003c/pu003eu003cpu003ePremièrement, le mythe de lu0026rsquo;épuisement des ressources. Il est évident quu0026rsquo;un développement à lu0026rsquo;infini ne peut pas être soutenu par des ressources finies. Mais cu0026rsquo;est précisément lorsquu0026rsquo;une ressource se raréfie quu0026rsquo;il faut laisser jouer le mécanisme du marché pour indiquer aux acteurs économiques la rareté relative du0026rsquo;une ressource. Cu0026rsquo;est ainsi que lu0026rsquo;homme sera incité à chercher de nouvelles ressources en faisant preuve de créativité et du0026rsquo;ingéniosité.u003c/pu003eu003cpu003eIl est vrai que des ressources naturelles su0026rsquo;épuisent, mais il est injuste de porter la responsabilité sur la technique. Celle-ci a compensé lu0026rsquo;épuisement des gisements en permettant lu0026rsquo;accès à des réserves inconnues grâce à lu0026rsquo;innovation et au génie humain. La technique permet de valoriser des ressources comme le gaz de schiste. Les déchets sont aussi traités à grande échelle pour produire de lu0026rsquo;énergie, ou recyclés pour produire de lu0026rsquo;acier, des papiers, des cartons, des plastiques et du verre. Ainsi fonctionne lu0026rsquo;économie de marché. À mesure que le développement de la technologie su0026rsquo;accélère, les ressour-ces deviennent moins rares et moins coûteuses, si bien que le concept de ressources naturelles est effacé par lu0026rsquo;imagination de lu0026rsquo;homme.u003c/pu003eu003cpu003eLa surexploitation ou lu0026rsquo;épuisement des ressources nu0026rsquo;est pas une caractéristique de lu0026rsquo;économie de marché, mais le résultat du0026rsquo;un libre accès aux ressources en lu0026rsquo;absence du0026rsquo;un marché fondé sur les droits de propriété. Ainsi, le fait que les océans nu0026rsquo;appartiennent à personne encourage la pêche excessive, compromettant le renouvellement des ressources halieutiques. De même, la politique de ne pas faire payer lu0026rsquo;eau potable au juste prix du marché entraîne du0026rsquo;importants gaspillages parmi les usagers et rend difficile la rentabilisation du0026rsquo;un système de captage du0026rsquo;eau de pluie.u003c/pu003eu003cpu003ePar ailleurs, lu0026rsquo;économie mauricienne est de plus en plus dominée par les services, ce qui fait que le processus de création de richesse repose davantage sur la matière grise que sur la matière physique. Au fil des décennies, le pays fabriquera des produits à plus faible empreinte écologique.u003c/pu003eu003cpu003eDeuxièmement, lu0026rsquo;utopie stationnaire : les écologistes proposent de ramener lu0026rsquo;économie à un u0026laquo;état stationnaireu0026raquo; avec lu0026rsquo;aide du0026rsquo;un État redistributeur. Or lu0026rsquo;état stationnaire nu0026rsquo;est réalisable que dans un monde où… rien ne bouge. Du côté de la demande, on suppose la constance des goûts et des préférences des individus. De plus, la structure des revenus doit être intangible, afin que les effets de répartition nu0026rsquo;affectent pas le niveau de la demande.u003c/pu003eu003cpu003eDu côté de lu0026rsquo;offre, il faut admettre la constance des facteurs de production, cu0026rsquo;est-à-dire la stabilisation de la démographie, lu0026rsquo;arrêt de lu0026rsquo;accumulation du capital, le blocage des inventions et du progrès des connaissances. Toutes les économies nationales doivent satisfaire ces conditions sans distinction aucune, à moins du0026rsquo;envisager lu0026rsquo;autarcie complète de lu0026rsquo;économie stationnaire pour que ne lui soient pas transmis les mouvements des économies non stationnaires.u003c/pu003eu003cpu003eTroisièmement, lu0026rsquo;économie du partage : pour les écolo-gistes, la transition du0026rsquo;une éco-nomie en croissance à une économie sans croissance ne réussirait que par la redistribution. Lu0026rsquo;argument stationnariste a pour principal défaut de refuser lu0026rsquo;espoir à ceux qui souhaitent améliorer leur condition de vie. Là se situe le point faible de la doctrine écologiste dont lu0026rsquo;éthique u0026ndash; régressive u0026ndash; est de valoriser une espèce en voie de disparition au détriment du0026rsquo;une personne affamée.u003c/pu003eu003cpu003eTout en prônant lu0026rsquo;économie stationnaire, les écologistes déplorent le sous-développement, ce qui rend leur position ambiguë. Pour échapper à cette contradiction, ils appellent à la logique du partage inhérente au stationnarisme. La redistribution devient la seule politique de changement.u003c/pu003eu003cpu003ePour les économistes, une politique fiscale doit respecter la vérité des prix et de lu0026rsquo;efficacité de lu0026rsquo;appareil de production. Toute politique de taxation cons-titue un frein à la croissance économique. Les entreprises sanctionnées peuvent répercuter la taxe sur les prix de vente. Au cas où la demande serait élastique, elle baissera, ce qui pénalisera lu0026rsquo;emploi. Si la demande est inélastique, elle restera forte, entraînant ainsi lu0026rsquo;inflation. De toute façon, su0026rsquo;il fallait taxer tous les actes jugés non écologiques, tous les phénomènes de croissance seraient bloqués.u003c/pu003eu003cpu003eLes propositions des écologistes relèvent du0026rsquo;un système de valeur propre à eux, indépendamment des préférences réelles des individus. Pour être réalisées, elles devraient être appliquées dans une société close avec une économie autarcique. On cultive ici une certaine nostalgie du paradis perdu et une obsession de la maîtrise du futur. Pour citer Luc Ferry, u0026laquo;dans tous les cas de figure, lu0026rsquo;écologiste profond est guidé par la haine de la modernitéu0026raquo;. Or, nous vivons dans la société moderne qui, suivant Karl Popper, est une société ouverte qui repose sur la liberté, la responsabilité, les droits de propriété et le règne du droit.u003c/pu003eu003cpu003ePersonne ne nie la raréfaction des ressources environnementales et les conflits de leur utilisation. Mais on ne pourra pas les résoudre par le modèle stationnariste où le gain de lu0026rsquo;un ne su0026rsquo;obtient que par la perte de lu0026rsquo;autre. Telle est la logique du partage qui est de nature conflictuelle. En revanche, le processus du marché apporte des solutions pacifiques et efficaces parce quu0026rsquo;il nu0026rsquo;est pas un jeu à somme nulle. Seul le marché peut réconcilier lu0026rsquo;économie et lu0026rsquo;écologie.u003c/pu003e

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