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Dr Kaviraj Sharma Sukon – Un chercheur pro-industrie au MRIC

À écouter Kaviraj Sharma Sukon, on le devine volontiers pragmatique et perspicace. Nourri à la culture des résultats, le docteur en mathématiques ambitionne pour le Mauritius Research and Innovation Council (MRIC) une orientation plus prononcée vers les recherches appliquées. Cet objectif est d’autant plus logique pour le nouveau président de cette instance qu’il appuiera la mission du MRIC d’être un «engine of growth & development of existing and new sectors».

Confortablement installé dans le coin salon de son bureau surplombant l’entrée de Réduit, à l’Open University, le Dr Kaviraj Sharma Sukon est tout ouïe malgré un emploi du temps chargé. Au-delà de son statut de directeur général-fondateur de l’université publique et de sa formation de chercheur universitaire, il a été nommé, fin juin dernier, président du MRIC. Une nomination qu’il accueille «avec beaucoup de plaisir» tout en prenant la mesure de cette nouvelle responsabilité. «C’est un challenge, surtout que le MRIC est engagé dans la recherche à l’échelon national.»

Fondé le 1er septembre 2019 à travers la promulgation du Mauritius Research and Innovation Council Act 2019, le MRIC s’est donné pour mission de promouvoir et d’initier la recherche pour un développement durable visant à améliorer la qualité de vie de la population de Maurice. C’est dire la tâche herculéenne qu’endosse le conseil d’administration de l’agence, chapeauté depuis peu par le Dr Kaviraj Sharma Sukon. D’autant plus que ce dernier amorce sa mandature dans une normalité économique où les dés sont pipés. Pour autant, l’enthousiasme n’est pas atténué. «On va se démarquer de la recherche théorique pour aller davantage vers de la recherche appliquée dans l’optique de faire une différence dans le monde des affaires».

La nomination se présente pour notre interlocuteur surtout comme une opportunité de créer des ponts entre les universitaires et les industries. «À Maurice, on a un peu de réticence à créer des liens avec les chercheurs-universitaires pour pouvoir développer de nouveaux créneaux, solutions, prototypes… La réticence est d’ordre culturel ; ce n’est pas dans la culture locale de rechercher leur appui dans le processus d’élaboration ou d’analyse de ces offres. Je pense, par exemple, au marché sucrier qu’on n’a pas suffisamment diversifié et diversifié de manière plus antérieure. C’est cela qu’on est en train d’encourager au niveau du MRIC. Pourquoi attendre la dernière minute pour innover un service ou un produit ? L’essor d’un marché est souvent tributaire de son degré d’innovation.»

Au gré d’un parcours professionnel entre l’enseignement, la recherche et les services conseils, Kaviraj Sukon a eu maintes occasions de se frotter aux problématiques de l’innovation. Et à l’enjeu de leurs résolutions. Fraîchement arrivé au HRDC en 2005, dans l’optique de mettre sur pied son département de recherche et conseils, il a travaillé sur l’absence de compétences dans le secteur des Tic.

«Vers 2005-2006, la cybercité d’Ébène prenait son envol, et le secteur des Tic peinait à trouver du personnel. Avec les entrepreneurs du secteur, nous avons élaboré une formation qui a été dispensée à environ 3 000 personnes pour qu’elles puissent travailler dans les activités du segment BPO», relate notre interlocuteur. Une autre problématique d’innovation, adressée par la HRDC, qui lui revient en mémoire concerne le secteur de la bijouterie. Un déclin dans les activités des bijouteries auprès de la clientèle touristique avait amené le HRDC à sonder le marché en quête d’explications. «Les bijoutiers travaillaient avec de l’or jaune alors que les touristes préféraient l’or blanc. Nous avions fait venir un spécialiste de l’or et du platine d’Afrique du Sud pour former environ 75 bijoutiers. Ce qui nous avait coûté assez cher, d’ailleurs.»

Son passage au HRDC de 2005 à 2012, confie d’ailleurs Kaviraj Sukon, lui a donné une autre ouverture dans le secteur privé. Un frottement indéniable aussi à différents secteurs d’activités. Une ouverture d’ailleurs consolidée par son activité de conseils auprès d’organisations internationales ou instances locales, ce qui a d’ailleurs débouché sur des études dont les axes demeurent l’emploi et la formation. Façonnant ainsi son profil d’homme pont entre le secteur privé et le secteur public, entre l’académie et l’industrie.

Un bon vivant

Au-delà d’un MBA (Université de Surrey) et d’un doctorat en computational mathematics suivant des études successivement à l’Université de Maurice (UoM) et l’Université de Loughborough (Grande-Bretagne), le Dr Kaviraj Sharma Sukon a eu une riche carrière dans l’enseignement. Il a, en effet, débuté sa carrière en 1994 comme lecturer en mathématiques à l’UoM. «À cette époque, on n’avait pas accès à Internet. On payait Rs 10 à Rs 20 par page pour faire venir de l’étranger les papiers de recherches. Ce qui m’a marqué durant mon passage comme enseignant à l’UoM est qu’on a développé le premier distance educational material pour les cours de maths 1111-1112».

Kaviraj Sukon quitte l’UoM en 1998 pour le MES «parce qu’on devait commencer la correction des épreuves de mathématiques de Cambridge». Mais c’est en tant que Research & Development Officer qu’il est recruté. En 1999, lorsqu’il commence à se charger de la correction des papiers d’examen, l’exercice, dit-il, se relève être un ‘eye opener’ pour lui qui «pensait qu’on était très bon en mathématiques». Les correcteurs du MES et les examinateurs de Cambridge ont travaillé de concert sur ces papiers, et «c’étaient les premiers papiers d’examen de Cambridge qu’on corrigeait». Sept ans plus tard, Kaviraj Sukon quitte le MES pour mettre en place le département recherches et conseils du HRDC.

Entre son cheminement au HRDC et le début de l’aventure de l’Open University, filent encore sept années sous l’astre de la formation. «On me donne la tâche, en 2012, d’établir l’Open University. C’était probablement le travail de Dieu. J’étais déjà membre à l’époque de l’Association for Development of Education in Africa (ADEA)». Au cours de son cheminement dans le secteur de la formation, Kaviraj Sukon a également été membre du sénat de l’UoM, et du conseil d’administration de l’UTM.

De son bureau à l’étage du bâtiment de l’Open University à Réduit, son directeur général-fondateur résume pour nous les huit dernières années à sa tête. «Je suis très content avec l’équipe de notre parcours. J’étais là pour diriger, et c’était clair dans ma tête où je voulais aller, et nous n’y serions pas arrivés sans l’équipe que j’ai pour donner vie à l’idée de départ.»

Formé à la culture des résultats, ce n’est pas sans une pointe de fierté que Kaviraj Sukon étaye les retombées courantes de cette stratégie : l’Open University est financièrement indépendante et stable, tout en étant la deuxième université publique en termes du nombre d’étudiants. «On est la seule université publique à avoir engrangé du positive growth depuis cinq ans». 95 % de sa population estudiantine est engagée dans la vie active. Et des faits de cette envergure, il pourrait en énoncer plusieurs.

Indubitablement, le Dr Kaviraj Sharma Sukon entend apporter sa touche à l’avancement de l’innovation à l’échelle locale, à travers le MRIC. «On est en train de venir de l’avant avec un plan stratégique au niveau du MRIC (…) Le MRIC a fait beaucoup de choses, peut-être que c’est au niveau de la dissémination de ses travaux qu’il n’est pas encore au point. On va faire de sorte à communiquer davantage».

Loin des clichés de froideur associés aux esprits cartésiens, le Dr Kaviraj Sharma Sukon se relève à nous comme un bon vivant. Bien que le temps et les contextes lui fassent défaut, ses passe-temps privilégiés demeurent d’aller à la mer le samedi avec ses cousins et passer du temps en famille, en regardant, par exemple, la télé. Marié et père de deux fils (l’un est à l’université en Angleterre et l’autre en lower au collège Royal), c’est à eux qu’il demande de vérifier les critiques des films qu’on lui recommande, avant de s’y mettre. Un des derniers produits télévisuels appréciés est la série ‘Delhi Crime‘ sur Netflix.

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En aparté

Il a dit :

– «On n’a pas d’autre choix à Maurice que de travailler ensemble, gouvernement et secteur privé»

– «Je voudrais inviter le secteur privé à miser sur l’innovation pour la pérennité de leur offre et à faire appel à nous dans le contexte de leurs projets d’innovation»

– «L’objectif du MRIC est, dans sa finalité, de rendre l’investisseur plus serein»

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