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FRANCK LACORRE (Conseil en gestion de patrimoine à Hermès Patrimoine) – À l’encre de sa plume

ÉLÉGANT DANS 

son costume bleu marine assorti à ses yeux clairs et muni d’un attaché-case, Franck Lacorre se pointe à notre lieu de rendez-vous pile à l’heure. Un brin débonnaire, nous sommes loin de nous douter que notre intervenant savoure tout autant les chiffres que les lettres. D’emblée, le gestionnaire de patrimoine sort ‘Côté cour, côté jardin’, son premier roman qui vient d’être publié «Vivre de sa plume, c’est un peu compliqué», livre le jeune cadre de 32 ans en remuant sa petite cuillère dans sa tasse de cappuccino.

Pour écrire, il faut aimer les mots. C’est le moins que l’on puisse dire. «La lecture tout comme l’écriture, c’est un voyage immobile», concède le Français qui a toujours aimé la littérature. «C’est quelque chose qu’on n’aime ou pas dès le départ.» L’auteur s’épanouit en écrivant pour rendre sa routine un peu plus stimulante. «Je ne pense pas que ce soit un métier en soi. Justement, ce qui est intéressant, c’est quand vous n’êtes pas, à mon avis, un professionnel de l’écriture, c’est-à-dire, cela permet d’avoir un angle différent. Quelque part quand vous avez un autre mé- tier, cet autre métier peut aider à nourrir un roman», déballe celui qui a travaillé pendant quatre ans à la MCB et trois ans à BNP-Paribas, à Paris.

Entre conseiller et réaliser des placements financiers, et ses devoirs d’époux et de père, il trouve le temps de s’adonner à sa passion. «Ce n’est qu’une question d’organisation. J’écris souvent très tôt le matin entre cinq heures et sept heures du matin. Généralement, je ne vais pas à mes rendez- vous à sept heures», dit-il. Et d’ajouter : «Il y a des gens qui vont regarder Netflix ; moi je vais écrire». Pour le professeur à la MCCI Business School, l’écriture est un talent inné.

Tout a commencé par le fait que ses clients de pri- vate banking étaient intéres- sés par l’histoire de Maurice. «Quand on parlait de placement pendant une heure d’entretien, on parlait un tiers du temps sur l’histoire de Maurice. C’est un pays concentré d’histoire en très peu de kilomètres», décrit le gestionnaire de patrimoine indépendant. L’ex-banquier aouvertilyaunanetdemi son entreprise, Hermès Patrimoine, à Ébène. «C’est du conseil auprès des Francophones. Le but est de rester en contact avec mes clients français. Je n’ai pas de plus-value avec les Mauriciens», poursuit le fan de James Baldwin et de Joseph Kessel, qui évoque que la crise de la Covid-19 remet en question le sens du tra- vail. «C’est une crise assez forte pour les clients. Malheureusement, elle perdure un peu.»

Sirotant son cappuccino, Franck Lacorre nous raconte son parcours entre le bruit de voix confus du resto-pub et la musique en fond sonore. Pour lui, Maurice est au-delà de l’image de carte postale. «Avant, je vivais aux États-Unis. Il y a cette idée que nous pou- vons faire des choses sur cette île. En France, tout est très sclérosé, c’est-à-dire, si vous voulez faire tel domaine, il faut en être un expert. C’est difficile de changer. Ici, si vous vous don- nez les moyens, tout peut se faire.»

L’optimiste vit depuis six ans à Maurice et est marié depuis cinq ans à Charline, une Mauricienne. «Nous nous sommes rencontrés en France, à la fac à Paris II Panthéon- Assas. J’y ai fait deux ans et puis je suis parti à l’université Paris Dauphine. Elle a poursuivi ses études auprès d’une autre école», dit le détenteur d’un Master en finance. «L’avantage d’avoir une épouse mauri- cienne, c’est que cela permet de mieux connaître l’île. Puis, c’est important d’avoir une belle-famille ici pour avoir les ressentis locaux.»

L’écrivain continue avec ses anecdotes. «Pour le ma- riage civil, ça été assez spécial. Nous avons dû le faire à l’Em- manuel Anquetil Building. Au niveau glamour, ce n’était pas terrible», dit-il d’un visage qui laisse échapper un sourire. Leur union religieuse a été célébrée à Mahébourg. «J’ai hérité d’une famille créole ma- hébourgeoise», étale celui qui s’est vite adapté à la culture mauricienne. Le choc culturel n’a pas été énorme. Ce senti- ment, le financier n’a pas eu à le surmonter. «La culture est différente de la mienne certes, mais cela ne m’a pas posé pro- blème. Je trouvais cela attirant. Il y a tellement de cultures.

C’est génial. C’est agréable pour moi de voir des fêtes comme Divali.»

Franck Lacorre cultive le bonheur et souhaite vivre de beaux jours sur cette île cachée sur la map- pemonde. Il est depuis deux ans père d’une petite Élise. Il lui a d’ailleurs dédié l’ouvrage. «Quelques lettres à Élise…», a-t-il écrit en frontispice. Aujourd’hui, il ressent le désir fort de s’engager à fond dans son rôle de papa. «J’ai quitté la banque 15 jours avant sa naissance pour pouvoir pleine- ment m’occuper d’elle», confie le grand brun les yeux éblouis par la lumière du soleil.

Côté cour, côté jardin, le roman de l’hiver

Le livre sorti le 15 juillet dernier raconte le vécu d’un Mauricien. «J’ai aussi écrit les choses qui m’ont marqué. Par exemple, à Maurice, quand on dit qu’une fille est brune, je pense directement à la couleur des cheveux. Or, qu’ici on fait référence à la couleur de la peau», dit Franck Lacorre. Le roman édité à l’Atelier des Nomades permet de découvrir certains codes. «Il y a un passage où il y a la belle- famille qui va à l’aéroport dans un minibus de 25 personnes pour récupérer le héros.» Au-delà du personnage, il raconte une trajectoire, souvent très commune pour quelqu’un qui vient d’une île. «L’idée m’est venue quand je travaillais à la banque. En tant que salarié, cela m’a permis de découvrir le pays. Quand on est touriste, on ne voit pas l’île Maurice telle qu’elle est», relate celui qui a eu l’idée du titre : ‘Côté cour, côté jardin’ en faisant référence au théâtre et à la théâtralité du pays. «Chacun a un rôle à jouer au sein de sa communauté.» Le livre sortira en France en janvier 2021.

• Plats favoris

Il adore le bouillon mee- foun et les plats sino- mauriciens et indiens. Il aime aussi les aliments frits et les gâteaux arouille. «Par contre, je n’aime pas trop les pâtisseries mauri- ciennes.»

• Auteurs favoris

Blaise Cendrars, Charles Bukowski, Nathacha Ap- panah, Ananda Devi et Jean-Marie Gustave Le Clézio, pour ne citer que quelques-uns. «J’ai lu plu- sieurs ouvrages d’auteurs mauriciens. C’est bien d’avoir un autre regard. J’ai aussi beaucoup appris du pays grâce à eux. C’est le rôle des écrivains, d’ouvrir sur d’autres portes.»

• Sports favoris

Le trail et le handball. Le sport lui permet de s’éva- der et de souffler. Il a pra- tiqué le handball pendant plusieurs années. À Mau- rice, il s’adonne au trail. «En parcourant les trails, je me suis rendu compte qu’au niveau du paysage, Maurice a des richesses qui ne sont pas forcément exploitées.»

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