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Nitin Collapen (Managing Director de Sunibel Corporate Services) «Le global business devra être pragmatique si le pire se produit»

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Nitin Collapen (Managing Director de Sunibel Corporate Services) «Le global business devra être pragmatique si le pire se produit» | business-magazine.mu

L’étau se resserre sur le global business. En l’absence d’une objection formelle du Conseil européen ou du Parlement européen, l’on se rapproche un peu plus de l’inclusion de Maurice sur la liste noire de l’Union européenne. Pensez-vous que les tractations politiques et diplomatiques en cours entre Port-Louis et Bruxelles peuvent encore nous sauver la mise ?

Récapitulons : le 7 mai 2020, l’Union européenne (UE) a inclus Maurice sur une liste de 22 pays dont les régimes de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme présentent des lacunes stratégiques préjudiciables au système financier de l’Europe.

Beaucoup d’intervenants locaux et étrangers, experts dans le monde financier, trouvent que l’inclusion de Maurice dans la liste intermédiaire n’est pas justifiée. À ce stade, le pays est sur la liste intermédiaire. S’il s’avère que tous les efforts consentis en termes de mise en application des recommandations du Groupe Action Financière (GAFI) pour que nous ne figurions plus sur la liste finale (qui sortira en octobre 2020), et que les ef- forts diplomatiques consentis demeurent vains, les conséquences seront très dures pour notre secteur financier.

La meilleure chose à faire est de ne pas spéculer sur l’inclusion ou la non-inclusion de Maurice sur la liste finale. Cela sera contreproductif dans notre volonté et nos actions visant à parvenir aux normes requises. Il nous faut d’abord concentrer notre énergie à combler tous les manquements, et dans un second temps, essayer les options diplomatiques dont nous disposons.

Si nous arrivons à combler les manquements du GAFI, en plus des efforts diplomatiques, mais nous nous retrouvons toujours sur la liste définitive de l’UE, le message sera clair. Les raisons pour lesquelles Maurice est sur la liste définitive des pays tiers à haut risque sont autres que ce qui est reproché en termes de manquements par le GAFI.

Nous devrons faire preuve de pragmatisme si jamais le pire se produit. Si, malgré avoir réussi les examens, nous n’obtenons pas l’aval de l’UE pour figurer hors de la liste finale, les conséquences seront désastreuses pour les paiements et les transactions entre Maurice et l’Europe. Ça serait une épreuve temporaire, jusqu’à ce que Maurice soit retiré de la liste, mais entre-temps, il nous faudra combler le vide en nous focalisant sur d’autres marchés.

Si la priorité des priorités est de tout faire pour qu’on ne figure pas sur la liste noire, cela ne doit pas bloquer le secteur dans sa volonté de poursuivre sa diversification en termes de marchés et de produits et services. Comment voyez-vous l’avenir du global business dans le nouveau monde qui se dessine ?

Effectivement, quelle que soit la décision finale de l’UE, cette situation nous démontre à quel point nous sommes vulnérables en termes de concentration de marché. Nous avons l’obligation de diversifier nos marchés, et surtout nous concentrer sur les continents africains et asiatiques qui nous ont toujours soutenus pendant les périodes difficiles pour générer plus d’affaires pour notre secteur global business et notre secteur financier.

En deuxième lieu, avec la politique excessive des pays développés visant à pomper de l’argent – sans retenue apparente et où les effets néfastes se feront sentir à long terme – dans le système économique (Quantitative easing), rien ne confirme que le taux de croissance pour ces pays rentreront dans la norme en 2021, de même que pour les années suivantes, comme le prévoit le Fonds monétaire international (FMI).

Avec des flux d’investissement se déplaçant des marchés traditionnels vers les marchés plus attractifs en termes de rendement et de risques, notamment l’Asie, l’Inde et l’Afrique, Maurice se positionne comme une plateforme d’investissement idéale. Nous verrons, par exemple, beaucoup d’intérêt pour les projets de sécurité alimentaire en Afrique, et la relocalisation de certaines activités de la Chine vers l’Inde. Il faut être réceptif par rapport aux changements mondiaux (politiques et économiques) et profiter des opportunités qui se présenteront.

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Le Budget prévoit d’optimiser la compétitivité du secteur financier à travers l’introduction de cinq nouveaux produits. Comment accueillez- vous cette volonté de diversification ?

Au niveau international, la crise de la Covid-19 a accéléré les opportunités pour la cryptomonnaie. L’évolution de la monnaie est passée par plusieurs étapes comme le troc, les objets rares, les métaux précieux, les billets et la cryptomonnaie, mais a toujours été un instrument de l’État. La technologie blockchain a permis de créer des cryptomonnaies privées. Les changements au niveau mondial et les initiatives par rapport aux cryptomonnaies font que les banques centrales, comme garantes de la stabilité économique du pays, doivent suivre le pas en émettant leurs propres cryptomonnaies Central Bank Digital Currency (CBDC).

C’est une bonne chose que Maurice emboîte le pas car il y a des avantages qui y sont associés : l’efficience des paiements, qui encourage un système compétitif et une réduction des frais de transfert ; encourage la cashless society (moins de vol d’argent), la lutte contre le blanchiment d’argent et la corruption car tout échange se fera à travers un système.

L’Insurance Wrapper est un produit intéressant qui permet la protection des actifs personnels et la planification fiscale. La Variable Capital Companies (VCC) est une structure qui existe déjà dans d’autres juridictions, et qui est principalement utilisée pour les fonds. La VCC peut être utilisée pour les stratégies de fonds ouverts ou fermés, offrant une certaine flexibilité pour les émissions et rédemptions des actions.

En ce qui concerne l’émission inaugurale de sukuks par la Banque de Maurice, il faudra attendre pour avoir plus d’informations si ce seront effectivement des émissions d’obligations souveraines.

L’émission d’obligations bleues est un instrument de dette émis par les gouvernements et les banques de développement pour lever des capitaux auprès d’impact investors pour financer des projets marins et océaniques, qui auront un impact environnemental, économique et climatique positif. L’émission d’obligations vertes est un type d’instrument à revenu fixe spécifiquement destiné à lever des fonds pour des projets climatiques et environnementaux. Ces types d’instruments attirent des investisseurs spécifiques et il nous faudra avoir plus d’informations sur ces projets et le retour sur les obligations.

Nous rencontrons des soucis pour ouvrir des comptes bancaires pour les clients qui sont dans l’activité digitale dans les banques existantes qui ne maîtrisent pas ou ne sont pas en ligne avec leurs politiques de risques. Le cadre légal pour la Digital banking sera définitivement un pas en avant dans la bonne direction. Il faudra aussi encourager des banques étrangères à vocation digitale à venir s’implanter à Maurice pour favoriser le développement de la technologie financière.

Un nouveau cadre législatif pour les banques qui opèrent dans les domaines de la banque privée et de la gestion de fortunes se fait attendre depuis des années. Il faudra également encourager ce type de banques à venir s’installer à Maurice pour rehausser le niveau local si on veut se positionner comme la référence dans cette partie du monde.

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