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Dr Vicky Naga (Chef de service de l’unité de soins palliatifs de la nouvelle Clinique Ferrière) : «Le patient est au centre de la prise en soins ; il n’est plus objet de soin, mais sujet de soins»

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C’est dans un nouveau bâtiment de 3 500 mètres carrés qu’a été aménagée l’unité de soins palliatifs de la Nouvelle Clinique Ferrière. Avec une douzaine de chambres, le Dr Vicky Naga, Chef de service de cette unité souligne que l’objectif est de soulager les douleurs physiques et les autres symptômes, mais aussi de prendre en compte la souffrance psychique, sociale et spirituelle.

Les soins palliatifs s’efforcent de préserver la meilleure qualité de vie possible pour les malades et proposent un soutien aux proches. Que cela signifie-t-il concrètement ?

La définition même des soins palliatifs selon l’Organisation mondiale de la santé est la prise en charge globale des symptômes physiques ainsi que social, psychologique, spirituelle du patient afin de soulager la douleur physique et les autres symptômes d’inconfort pour lui garantir une qualité de vie. La prise en charge des proches – accueil et soutien lors de chaque phase de la maladie – est aussi intégrée.

Pourquoi la démarche palliative est-elle essentielle ?

La démarche palliative comprend l’amélioration de la qualité de vie du patient, l’arrêt de tout obstination déraisonnable, le placement du patient au centre de la prise en charge (celui-ci devient sujet de soins et non objet de soins), la prise en charge de la douleur. Ces sont des points primordiaux pour chacun.

Le terme «soins palliatifs» est souvent perçu de façon négative par les patients. Il évoque les derniers instants de la vie. Est-ce toujours vrai ?

Non, la prise en charge palliative n’est pas que l’instant de la fin de vie. La démarche palliative peut être intégrée dès l’annonce d’une maladie grave incurable. Le bien-être, la qualité de vie sont essentiels et encore plus lorsque la maladie fait parler d’elle.

Quels sont les patients éligibles ? S’agitil que de patients qui vont mourir très prochainement ?

On peut, bien sûr, accueillir des patients en fin de vie, mais on accueille surtout des patients qui présentent des symptômes complexes/difficiles ou résistants aux traitements usuels au domicile ; par exemple la douleur, la difficulté respiratoire, l’occlusion intestinale sur tumeur digestive non opérable, l’hémorragie sur tumeurs ORL/pulmonaire en situation palliative.

Si les soins palliatifs sont amorcés précocement, est-ce que cela permet de gagner en qualité et parfois en quantité de vie ?

Le fait d’intégrer la prise en charge palliative permet une prise en charge à domicile, par exemple. Cela favorise aussi l’anticipation des sujets délicats et développe le soutien des proches. Donc oui, définitivement, une prise en charge précoce est bien plus que positive au niveau de toutes ces retombées.

Comment se définit la place du soignant entre les patients et les familles dans l’optique des soins palliatifs ?

Dans les Unités de Soins Palliatifs (USP), le soignant est celui qui passe le plus de temps avec le malade ; c’est lui qui le connaît le mieux. Il est aussi présent pour répondre aux questionnements du malade et de son entourage une fois le diagnostic annoncé par le médecin. Le soignant peut faire participer les proches s’ils le souhaitent dans la prise en charge du patient ; cela au niveau de l’alimentation plaisir ou encore le bain. Son positionnement professionnel est aussi un atout pour la prise en charge palliative afin que les réunions d’équipe pluridisciplinaire soient riches.

Pouvez-vous nous détailler les circonstances de la création du service de soins palliatifs au sein de la Nouvelle Clinique Ferrière ?

Cela a requis quel investissement financier ? La congrégation des sœurs du Bon et perpétuel secours ont repris le charisme de Sœur Marie Augustine pour faire rimer médecine et humanisme. Ainsi, elles ont consacré plus de Rs 100 millions à cette ambitieuse réalisation. Il faut savoir que la société moderne et le mode de vie des Mauriciens ont aussi leurs côtés négatifs. En effet, les cancers sont en augmentation chaque année à Maurice. Il était donc essentiel d’offrir une réponse humaine, matérielle et donc palliative à ce besoin.

Concrètement, que vient offrir cette unité de soins palliatifs de la Nouvelle Clinique Ferrière ?

L’USP offre bien plus qu’un service hospitalier. En effet, cette unité est construite pour que règne le bien-être. Nous soulageons nos patients pour qu’ils soient bien dans leur corps, mais qu’ils se sentent aussi comme chez eux ici. Pour ce faire, nous travaillons en binôme et en équipe pluridisciplinaire (médecin, infirmier, aidesoignant, psychologue). Chaque membre est formé et expérimenté.

Le patient est au centre de cette prise en soins ; celui-ci n’est plus objet de soin, mais sujet de soins. La prise en charge globale inclut, elle, la famille avec, entre autres, un salon des familles ou encore un kids corner. Le forfait journalier fait aussi partie des innovations. Tout est inclus : chambre en suite, prestation hôtelière (nourriture), couchette par famille, prise en charge médicale et paramédicale (visite des trois médecins de l’unité, médicaments, psychologue, soins par binôme infirmier/aide-soignant, bain thérapeutique, accès salon famille, coin enfant), suivi post-décès pour la famille durant le premier mois (deux consultations sont incluses dans le forfait).

Le bénéfice des soins palliatifs a été démontré, mais trop peu de patients y ont accès. De quelle manière la clinique aidera-t-elle à y remédier ?

La diffusion de la philosophie des soins palliatifs à travers notre centre de formation et d’information – centre de formation Augustin Grange – aux professionnels de l’île et au grand public est une priorité. Nous nous sommes engagés en toute transparence avec le forfait journalier ; à travers un accord avec les principales assurances à Maurice. Mais surtout, à travers la création d’un fonds de solidarité afin de financer les journées d’hospitalisation pour les nécessiteux ; cela démontre le souci permanent de la Clinique de donner accès au plus grand nombre.

Quels sont les dispositifs spécifiques développés pour former et accompagner psychologiquement les équipes travaillant dans cette unité ?

Nous avons plusieurs cordes à notre arc. La formation est dispensée par notre consultant, le Dr Claude Grange, un formateur agréé en développement professionnel continu en France. Il y aura une première et une deuxième promotions en soins palliatifs sur le même format que le Diplôme Universitaire en soins palliatifs en France. Cela comprend trois semaines de formation théorique et pratique avec des récits cliniques des soignants et un mémoire sur une thématique. L’accompagnement de l’équipe – médecins, soignants, psychologue – se fera par un psychologue externe de l’USP deux fois par mois. Il y a également des discussions en équipe au cours des réunions de concertation pluridisciplinaire, ainsi que des échanges en authenticité sur les prises en charge des patients.

Est-ce que les soins palliatifs peuvent être pratiqués à domicile ? Pensez-vous mettre cela en place à l’avenir ?

Oui, une fois stabilisé dans le service au niveau des symptômes qui ont nécessité l’hospitalisation, les patients peuvent regagner leur domicile avec le traitement instauré. Le lien se fait avec les soignants ; tout cela nécessite un travail de réseau. Il y a aussi la possibilité de déplacement de notre équipe mobile de soins palliatifs pour faire des évaluations sur des thématiques problématiques – douleurs, symptômes d’inconfort – ou des réévaluations des patients connus de l’unité.

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