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Une femme avec…une femme

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Travailleuses sociales et militantes pour les droits humains, Sandrine Julien et Faimano Benoît partagent un amour fort basé sur la liberté, des valeurs communes et le respect mutuel. C’est parti pour le two-women show !

Racontez-nous votre rencontre ?

Faimano : J’ai rencontré Sandrine dans une soirée, je m’apprêtais à partir et elle a débarqué. Je me suis dit : «Wow ! c’est qui celle-là ?» Bien évidemment, elle m’a snobé et m’a à peine dit bonsoir. Après, elle racontait des blagues et même si je forçais mon rire, elle m’a ignoré. Tu t’en souviens ? Sandrine (en riant) : Bein oui je t’ai ignorée !

Faimano : Le lendemain, mon ami l’a appelée pour lui demander de m’ajouter sur Facebook. Elle a attendu la fin de la journée pour le faire et j’ai accepté direct ! Je ne suis pas tombée amoureuse tout de suite mais disons que je suis tombée sous son charme, elle dégageait une telle prestance. Et au bout de deux-trois semaines, elle m’a dit : «Je crois que potentiellement, hypothétiquement, je t’aime plus que le poulet croustillant de Ah Youn ! ». Et elle a ajouté : «Tu te rends pas compte, je n’ai jamais dit cela à personne dans ma vie !»

Qu’avez-vous prévu pour la St-Valentin?

Sandrine : Même si on essaie de faire quelque chose à chaque St-Valentin, je pense que lorsqu’on est amoureux, c’est la St-Valentin tous les jours ! En général, ce qu’on aime bien, c’est un sunset pieds dans le sable. Mais je dois avouer que c’est difficile de lui faire des surprises car on est tout le temps ensemble.

Faimano : Moi ça ne m’empêche pas de te faire des surprises hein !

Sandrine : Oui, elle m’envoie au supermarché acheter des choses dont on n’a même pas besoin pour qu’elle puisse préparer tranquillement sa surprise ! Mais en gros, on s’aime tous les jours, depuis 5 ans et 4 mois. On n’est pas très cadeaux… Faimona (en plaisantant) : C’est normal, c’est moi ton plus beau cadeau !

Qu’est-ce qui vous plaît tant chez l’autre ?

Faimano : À mes yeux, Sandrine est une personne remplie d’empathie et elle très humaine. Elle se projette dans la peau de l’autre. Elle est à l’écoute et elle essaie toujours de m’apaiser au lieu de venir alimenter les petites disputes qu’on peut avoir. C’est ce qui fait aussi d’elle une excellente travailleuse sociale et une excellente facilitator avec ses fifis qui ne sont pas toujours faciles à gérer (Ndlr : les filles de l’association Kolektif Drwa Imin où Sandrine est consultante). Là tu bombes le torse là hein ?

 Sandrine (tout sourire) : Fai m’apporte de bons conseils. Elle est ma petite force. Elle me donne du courage quand je baisse les bras. Elle m’apaise quand j’ai mal. Elle me réconforte quand je suis triste et me défend quand il y a des gens qui ne sont pas sympas avec moi. Elle est mon petit pilier, mon petit roc. Mais comme on n’aime pas dire qu’on est dépendant du bonheur d’une personne, on se dit plutôt qu’on est là l’une pour l’autre et qu’on s’entraide. On se complète. On a beaucoup de chance de s’être trouvées et je souhaite que ça dure encore longtemps.

Faimano : On n’aime pas se dire qu’on a besoin l’une de l’autre. On est ensemble parce qu’on a envie de l’être ! Je souhaite que tout le monde soit aussi heureux que nous ! On s’est dit que notre amour, c’est un contrat renouvelable chaque jour.

Qu’est-ce qui vous énerve chez elle ?

Faimano : Premièrement, quand on est au restaurant avec sa famille ou ses amis et que la cigarette est plus importante. Elle m’abandonne lâchement juste pour aller fumer. Deuxièmement, quand je lui répète trois fois la même chose…

Sandrine : Quand elle se décourage vite et baisse les bras. Je n’aime pas quand elle travaille sans penser à elle, sans penser à se reposer et à prendre du temps pour elle. Ah et il y a aussi lorsqu’elle m’oblige à manger de la salade. Mwa mo kontan mo poul, pas fey !

Quelles sont vos passions communes ? Pensez-vous qu’un couple doit partager les mêmes passions pour durer ?

Faimano : Tout ce qui est photo-vidéo et traitement de l’image. Notre deuxième passion commune, c’est de défendre les droits humains.

Sandrine : Exact. On est toutes les deux engagées dans le social. Cette passion nous a même coûté une agression en 2019 lorsque nous sommes allées secourir une jeune femme victime de menaces par sa famille. On s’est fait taper par sa famille qui avait des amis policiers. Ils ont débarqué et eux aussi ont commencé à nous taper. On était deux femmes contre sept hommes. Fai s’est retrouvée avec une côte fêlée !

Par ailleurs, on aime aussi les chats. Je n’aurais pas pu être avec une personne qui n’aime pas les chats. On a 4 chats et demi. Le demi-chat n’est pas à nous, il appartient au voisin mais il est souvent chez nous.

Faimano : De par notre mixité (Ndlr: Faimano est Française et Sandrine, Mauricienne), je trouve aussi intéressant de pouvoir découvrir et apprendre des choses différentes de l’autre. C’est ce qui alimente aussi un couple au quotidien. Et je trouve que si chacun peut entraîner l’autre dans sa passion, c’est aussi une bonne chose. Pour moi, pour qu’un couple puisse durer dans le temps, le plus important est d’avoir des valeurs communes.

Quelles sont pour vous les clés d’un couple heureux ?

Sandrine : Le respect mutuel. Avoir le droit de ne pas être d’accord. Ce n’est pas parce que la personne pense différemment de moi qu’elle est contre moi. Savoir prendre de la hauteur et du recul. Et je pense que dans notre contexte à nous, un couple LGBT, c’est oser s’aimer. Il y a beaucoup de personnes LGBT qui sont en couple et qui s’aiment mais qui se retiennent à cause de leur contexte familial ou d’elles-mêmes car elles ne s’acceptent pas. Elles s’empêchent de s’aimer et d’aimer les autres. Par ailleurs, l’acceptation de la famille et de l’entourage, le fait d’avoir cette liberté d’aimer et de vivre son orientation sexuelle même si elle est différente de la majorité des gens est très importante pour être un couple heureux.

Faimano : Ce qui est important aussi, c’est se mettre d’accord sur la définition du mot aimer. Car aimer quelqu’un, c’est prendre tout le package avec tout ce qu’il y a de bon et de moins bon. C’est souhaiter le bien-être de la personne.

Sandrine : Ce n’est pas contrôler l’autre. Faimano : Oui, et c’est pour cela qu’aimer quelqu’un veut aussi dire que si demain ça ne va plus entre nous, on se sépare car je souhaite ton bonheur. Mais pour l’instant, on est ensemble et ton bonheur, il passe par moi (grands rires).

Racontez-nous votre coming out et quelles sont les difficultés que vous avez eu à surmonter depuis ?

Faimano : Me concernant, la seule réponse de ma famille a été : «Ma fille, on veut juste que tu sois heureuse, c’est le principal.»

Sandrine : Pour moi, ça s’est passé naturellement. Ça s’est très bien passé au niveau de ma famille. Mais je pense que le coming out se fait un peu tous les jours lorsqu’on rencontre un ami d’école ou une nouvelle personne qui ne sait pas que je suis lesbienne. Je rêve d’une île Maurice où on n’aurait pas à faire de coming out.

Faimano : Concernant les difficultés, du côté législatif, pour l’instant, on n’est pas reconnu comme couple. En général, dans les couples mixtes franco-mauriciens, l’époux ou l’épouse peut prendre la nationalité. Mais c’est un avantage qu’on n’aura jamais.

Sandrine : Par exemple, si Fai et moi on se marie à la Réunion ou en France et qu’on revient vivre à Maurice, elle ne peut pas rester ici en tant que ma conjointe. Elle aura besoin d’un autre type de visa.

Faimano : Par ailleurs, on songe grandement à avoir un enfant et c’est compliqué pour nous. Si je porte l’enfant et que demain on se sépare en mauvais terme, on s’expose à perdre notre enfant qu’on a vu grandir.

Un message ou un conseil à faire passer aux couples LGBT ?

Faimano : N’ayez pas honte de vous. Acceptez-vous comme vous êtes.

Sandrine : Ne pas avoir peur de s’aimer malgré la stigmatisation, la discrimination. De se sentir libre de s’aimer mais de faire attention car qu’on le veuille ou non, quand on est un couple LGBT, on est exposé à plus de risques, à des actes de violences, de bullying.

Faimano : Il faut trouver un juste milieu entre ne pas s’empêcher de s’aimer et toujours faire en sorte de rester en sécurité.

Sandrine : Il faut aussi que les personnes LGBT sachent qu’il y a des lois qui existent à Maurice et de ne pas hésiter à aller porter plainte à la police si elles subissent des menaces sur la voie publique.

Le mot de la fin…

Faimano : Nous remercions Lifestyle de nous donner de la visibilité et d’oser donner la parole aux personnes de la communauté LGBT.

Sandrine : Plus les personnes LGBT seront visibles, moins on laissera de place aux détracteurs qui veulent ‘dim our light’. Plus on sera visibles, moins ils se manifesteront.

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