Type to search

Actualités Autres

Discours-programme – Maurice se donne-t-il les moyens de ses ambitions ?

Share
Discours-programme - Maurice se donne-t-il les moyens de ses ambitions ? | business-magazine.mu

Boudé par l’opposition parlementaire, le discours-programme a été présenté vendredi dernier par le président de la République, Pradeep Roopun. Cela, sous l’œil attentif du corps diplomatique. La lecture du document, long de 52 pages et détaillé en 212 points, a duré plus d’une heure et demie. Le message central est clair : il s’agit de jeter les bases pour une économie plus inclusive, réussir la transition vers une économie à revenu élevé et répondre aux défis en matière de développement durable. Pour concrétiser cette vision durant ce quinquennat, le gouvernement appelle à la participation de toutes les parties prenantes : les dirigeants politiques et économiques, ainsi que la société civile.

Pour l’observateur Rajiv Servansingh, le discoursprogramme est cohérent avec le modèle de développement prôné par le Premier ministre, Pravind Jugnauth. «Ce discours-programme s’inscrit dans la continuité de ce qui a été annoncé lors du Budget 2019-2020, lu à peine trois mois avant les législatives. Dans l’ensemble, vingt mesures concrètes ont été annoncées pour le développement économique», rappelle-t-il.

Selon lui, le gouvernement a toutes les cartes en main pour atteindre les objectifs qu’il s’est fixé, notamment au vu des avancées pendant le dernier quinquennat. «Auparavant, les projets annoncés se heurtaient à des obstacles lors de leur mise en oeuvre. Or, ces dernières années, on a pu constater que le scénario a changé. Les projets sont menés à terme», constate-t-il.

Optimiste, il estime que les ingrédients sont réunis pour qu’on franchisse la barre des 4 % de croissance cette année. Il table notamment sur l’accélération de la Seaport economy avec les développements portuaires et une nouvelle impulsion aux activités de réexportation par le biais du projet de la Cargo City. Et d’ajouter que Maurice fait un pari sur la modernité en menant de front l’objectif d’accélération de la croissance et la planification d’une meilleure redistribution de la richesse.

«Le concept de créer la richesse avant de penser à la redistribuer est dépassé. Nous sommes dans une démarche d’inclusion sociale et dans la trajectoire d’un pays à haut revenu. Le jour de la lecture du discours-programme, le ministre des Finances a également déclaré qu’on visait un Pib national dépassant les Rs 500 milliards. Cela reviendrait autour de $ 13 500 à $ 14 000 par tête d’habitant», affirme-t-il. 

},

PRÉSERVER LA BASE INDUSTRIELLE

Même son de cloche du côté de Bruno Dubarry, le CEO de l’Association of Mauritian Manufacturers, qui salue la mise en place d’un Economic Research & Planning Bureau au ministère des Finances. Si Maurice veut atteindre ses objectifs quinquennaux, l’une des conditions essentielles est l’instauration d’un véritable partenariat public-privé. «Maurice a une longue tradition de dialogue public-privé qui gagnerait à évoluer vers un partenariat. Prenons le cas du Budget national. Un partenariat signifierait que le secteur privé prenne des engagements et, en contrepartie, demande à l’État des mesures pour soutenir la réalisation de ces engagements. Il faut parvenir à cet alignement, surtout dans la pratique», observe-t-il. Outre les moyens financiers, il s’agit d’avoir «le bon état d’esprit pour renforcer nos capacités d’action collective». Or, insiste-t-il, Maurice ne doit pas perdre de vue l’importance du secteur industriel. À ce propos, il déclare : «Notre pays est en voie de désindustrialisation.

Or, il y a un indicateur primordial qui ressort des recherches récentes et dont on ne parle pas assez : c’est l’effet multiplicateur de l’industrie avec un taux de 1,9, soit le taux le plus fort, tous secteurs confondus. Investir dans l’industrie est la meilleure façon de créer un ‘spilling effect’ sur les autres secteurs et d’augmenter la richesse nationale. D’où la nécessité de conserver cette base industrielle comme un patrimoine commun».

De son côté, Khalil Elahee, professeur à l’Université de Maurice, reste sur sa faim concernant les mesures annoncées eu égard au développement durable. Selon lui, nous devons adopter une posture plus agressive. Il s’explique : «Comme le démontre le Sommet de Davos, et auparavant la rencontre annuelle de l’International Renewable Energy Agency, il y a une prise de conscience que la neutralité carbone est non seulement possible, mais aussi offre d’excellentes opportunités pour les affaires. C’est dommage que l’appel que Joël de Rosnay et moi-même avons lancé pour avoir un objectif de 100 % d’énergies renouvelables d’ici à 2050 n’a pas été entendu».