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Bilan et Perspective

Agro-industrie : Une année de défis et d’innovations pour la révolution verte

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Irrigation insuffisante, sécheresse, cyclones, tensions entre la Russie et l’Ukraine : tels sont quelques-uns des défis qui ont secoué le secteur agro-industriel mauricien en 2023. Pour y répondre, plusieurs projets et événements phares ont été initiés, notamment dans le cadre de la Smart Agriculture, l’adoption du National Biomass Framework et la tenue des toutes premières Assises de l’agriculture. En 2022, le secteur représentait 3,9 % du PIB, avec des exportations d’une valeur de 28 millions de roupies et 239 000 emplois. Malgré les difficultés, cette industrie évolue dans le sens d’un avenir plus durable.

Bien qu’une année se soit écoulée depuis le début du conflit russo-ukrainien, ses répercussions continuent d’affecter le secteur agroalimentaire de Maurice. C’est le constat de Sachin Sooknah, président de la Mauritius Cooperative Agricultural Federation Ltd (MCAF) : «Avant la Covid, le prix d’un sac de fertilisants de 25 kg était de Rs 500 ; il est passé à Rs 1 600. Cette hausse découlait de l’augmentation du coût du fret, du diesel et des matières premières, sachant que la Russie est un important producteur d’engrais. Ainsi, l’augmentation du coût des engrais se traduisait par une augmentation du coût de la main-d’œuvre. Actuellement, le prix des engrais a baissé à Rs 996, dont une subvention de 50 % du gouvernement pour soulager les producteurs.»

Parmi les principaux défis à relever pour la saison 2023, la sécheresse et le manque de main-d’œuvre figurent en tête de liste. «Le manque de main-d’œuvre est toujours un sujet aussi préoccupant, qui impacte tous les producteurs à tous les niveaux. Donc une solution au niveau national doit être trouvée pour éviter cet abandon annuel des terres sous canne. Par ailleurs, avec la population agricole vieillissante, il devient impératif de trouver une formule pour attirer les jeunes vers cette profession», soutient Jacqueline Sauzier, Secrétaire Générale de la Mauritius Chamber of Agriculture (MCA). «La solution à ce problème est la mécanisation de la récolte de la canne. Nous augmenterons nos ressources en matériel avec l’achat d’une autre moissonneuse de Rs 4 millions», annonce Sachin Sooknah.

Cette année, la production de sucre devrait être légèrement supérieure à 230 000 tonnes, selon les prévisions du Crop Estimate Coordinating Committee. À ce jour, près de 90 % de la récolte a été effectuée, générant environ 215 000 tonnes de sucre avec une estimation de Rs 27 000 par tonne de sucre rémunérée aux producteurs pour la coupe de 2023. Toutefois, les pluies récentes retardent la récolte mécanique, ce qui fait craindre une prolongation possible jusqu’aux premiers jours de 2024.

En ce qui concerne la production dans d’autres secteurs, Statistics Mauritius a rapporté à la fin du mois de juin 2023 que la production de feuilles de thé vert a augmenté de 12,1 %, passant de 3 506 tonnes au 1er semestre 2022 à 3 930 tonnes au 1er semestre 2023, tandis que la production de thé transformé a augmenté de 23,2 %, de 598 tonnes à 737 tonnes.
En ce qui concerne la culture vivrière, la superficie récoltée a augmenté de 11,9 % pour atteindre 3 602 hectares, et la production s’est améliorée de 38,5 % pour atteindre 54 728 tonnes. En ce qui concerne le bétail, la production de viande bovine a progressé de 2,6 % pour se situer à 1 166 tonnes, mais la production de viande locale a diminué. La production de volaille a augmenté de 7,1 %, passant de 26 700 tonnes au premier semestre 2022 à 28 600 tonnes en 2023. La production de poisson a connu une hausse significative de 37,5 %, de 13 491 tonnes à 18 544 tonnes au cours des six premiers mois de 2023, avec une augmentation notable de la production d’autres captures et de poisson côtier frais.

En mars dernier, les Premières Assises de l’agriculture ont été organisées au complexe sportif de Côte-d’Or par l’Economic Development Board, en collaboration avec le ministère de l’Agro-industrie et de la Sécurité alimentaire, réunissant près de 125 participants des secteurs privé et public. Sous le thème “Les voies d’un système alimentaire durable pour un avenir plus sain”, ce symposium a permis aux acteurs du secteur de discuter des actions à court et moyen termes pour renforcer la sécurité alimentaire et réduire les importations.

Les efforts visant à promouvoir des pratiques agricoles et un système alimentaire durables ont également été intensifiés cette année. La collaboration de longue date entre la MCA et le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD) s’est concrétisée par un protocole d’accord qui permet de soumettre des projets communs à des agences de financement internationales.

«L’objectif est de collaborer pour réduire l’utilisation d’intrants afin d’améliorer la durabilité économique et environnementale de nos exploitations, en adoptant des principes basés sur l’agroécologie et en améliorant la fertilité et la santé du sol. Nous visons à mettre en place une législation appropriée pour valoriser les produits issus de cette agriculture respectueuse de l’environnement. La promotion de l’agro-biodiversité comme source de diversification de nos pratiques est également au cœur de nos engagements. Nous partageons nos connaissances sur la diversité de nos pratiques agricoles, favorisant la rentabilité économique de nos exploitations et les aidant à produire de manière plus efficace. Par ailleurs, nous collaborons avec d’autres partenaires tels que FAREI pour des aspects de coopération avec les petits producteurs, et RTC (Centre Régional de Formation) pour la formation de nos producteurs, même en l’absence d’un accord formel de partenariat», explique Jacqueline Sauzier.

Une autre résolution marquante de cette année a été l’adoption du cadre national pour la biomasse, aligné sur l’objectif du gouvernement de produire 60 % de l’énergie du pays à partir de sources vertes d’ici à 2030, une décision saluée par la MCA après cinq ans d’attente. Le cadre vise à accroître la production de bioélectricité en encourageant une utilisation plus efficace de la bagasse de canne à sucre, une meilleure collecte des résidus, l’introduction de variétés de canne à sucre plus fibreuses, la culture d’autres cultures énergétiques et l’importation de biomasse.

Face aux défis complexes, le secteur agro-industriel de Maurice, bien que secoué, s’adapte avec résilience à travers des projets innovants, des partenariats tandis que les investissements gouvernementaux signalent une transformation vers la durabilité.

 

Soutenir le développement agricole

Dans le Budget 2023-2024, le gouvernement a prévu Rs 2 milliards pour soutenir les développements agricoles existants et nouveaux. Une mesure clé est la provision de Rs 75 millions pour le Cane Replantation Scheme, qui a déjà permis de replanter 1 000 arpents de terre au cours des deux dernières années. Pour encourager la plantation domestique, la subvention maximale pour les micro-jardins est passée de Rs 15 000 à Rs 25 000. De plus, la DBM Ltd a lancé un nouveau régime de prêts agricoles à un taux d’intérêt de 3,5 %, avec un plafond de Rs 10 millions. Par ailleurs, le Cane Revolving Fund Scheme voit son budget passer de Rs 200 à 500 millions. En outre, les producteurs produisant jusqu’à 60 tonnes de sucre bénéficient d’une subvention de 50 % sur l’achat d’engrais.

Le Mauritius Agricultural Marketing (Amendment) Bill a aussi été adopté cette année, centralisant la distribution en gros des fruits, légumes et fleurs produits localement sur le National Wholesale Market. L’objectif est d’établir une régulation et une normalisation des prix de vente de ces produits.