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Édito

Garde-fous

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Garde-fous | business-magazine.mu

Nous le disions il n’y a pas si longtemps et nous le pensons toujours : Maurice a de la chance d’avoir aujourd’hui à sa tête une personne qui est en mesure de s’affranchir de toutes considérations politiciennes en vue de procéder à une rénovation complète de notre système démocratique. C’est la lourde responsabilité qui a été placée sur les épaules du Premier ministre, sir Anerood Jugnauth, à l’issue des consultations populaires de décembre 2014.

Les attentes sont d’autant plus grandes car ces dernières années ont été marquées par une forte baisse de la confiance de la population, notamment de la nouvelle génération à l’égard de l’élite politique.

Les élections générales sont donc arrivées à point nommé ayant grandement contribué à restaurer un climat de confiance dans le pays. D’abord, au sein de la population à travers certaines mesures populaires, à l’instar de la hausse de la pension de vieillesse et du paiement d’une compensation salariale supérieure aux attentes.

Même la communauté des affaires s’est laissé porter par ce sentiment de bien-être qui a gagné le pays dans le sillage des élections générales. Avec pour résultat, l’indicateur de confiance de la Chambre de Commerce et d’Industrie affichant un rebond au quatrième trimestre de l’année dernière, passant de 77,5 points à 82,5 points.

Un effet d’entraînement qui a trouvé son chemin jusqu’en 2015. Le dernier sondage de la Chambre de Commerce révèle une nouvelle progression de l’indice au premier trimestre. Mais entre-temps, la donne a changé. Il y a eu la révocation de la licence bancaire de la Bramer Banking Corporation et l’éclatement de l’affaire BAI. Si à première vue ces événements ne donnent pas l’impression d’avoir impacté le moral des entrepreneurs durant les premiers mois de l’année, une analyse plus poussée des données révèle qu’en fait les perspectives des chefs d’entreprises pour les prochains mois sont en baisse comparativement à décembre 2014.

Est-ce là le signe d’un début d’effritement ? Nous le saurons bien assez tôt car très souvent, il suffit de peu pour entamer le moral des investisseurs. Il n’y a qu’à voir le comportement des étrangers à la Bourse pour s’en rendre compte. Rien qu’en avril, les investisseurs étrangers ont désinvesti environ Rs 1,1 milliard.

Or, Maurice ne peut s’offrir le luxe d’un basculement du sentiment général. Certes, le risque n’est pas imminent, mais il est toujours présent. Il est donc nécessaire de procéder avec prudence afin de ne pas retomber dans les mêmes travers que l’ancien régime. Le Bar Council, à travers son président, Antoine Domingue, a tout à fait raison de mettre en garde contre les dérives. Car très souvent, l’on ne s’en rend pas compte, mais la ligne de démarcation est infime et il suffit d’un rien pour la franchir.

Ce qui a fait la force de Maurice durant les années qui ont vu une expansion économique sans précédent, ce sont justement les institutions. De par son mandat populaire, le gouvernement devrait, à notre sens, s’atteler à renforcer les institutions qui sont tombées dans un état de délabrement à force de subir les ingérences politiques. D’ailleurs, Xavier-Luc Duval, le Premier ministre adjoint, a rappelé, à l’ouverture d’une conférence réunissant les professionnels de la comptabilité, lundi, l’importance d’avoir des institutions solides au service du pays.

Nettoyer c’est bien, mais se doter de garde-fous pouvant prévenir de nouveaux dérapages, c’est nettement mieux ! C’est d’ailleurs ce qui est attendu des locataires de l’Hôtel du gouvernement afin qu’ils se recentrent sur l’essentiel, c’est-à-dire le développement du pays tout en laissant aux institutions le soin de prendre le relais pour le travail de nettoyage.