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Édito

Suspicion, méfiance et cover-up

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Suspicion

Ces termes très à la mode du temps où Navin Ramgoolam régnait en maître sur le bâtiment du Trésor rythment désormais l’actualité du gouvernement Lepep. Au point de créer un climat délétère. D’ailleurs, on y retrouve le même fil conducteur entre la situation d’alors et celle d’aujourd’hui : le comportement des gouvernants et sa conséquence logique : la perte de confiance dans les institutions du pays.

Le changement de régime n’aura donc pas été le déclic automatique de rupture auquel a dû penser la population en s’exprimant à travers les urnes en décembre 2014. Au contraire, elle se retrouve une nouvelle fois à décortiquer les scandales – qui se ramassent presque à la pelle – dans la rue comme dans les salons feutrés. Même l’opposition désunie arrive à marquer des points en la circonstance. Ce qui permet de prendre pleinement la mesure des événements qui nous occupent.

Dans une telle atmosphère et en l’absence d’une loi donnant libre accès à l’information, toute initiative inexpliquée ou qui se rapporte à l’opacité devient suspecte. Rien de plus normal. D’autant plus que l’alliance Lepep a promis de faire de la politique autrement.

Aussi longtemps que cet engagement ne sera pas respecté, il faudra systématiquement le rappeler à nos dirigeants. Car ils nous ont assuré qu’ils seraient une alternance crédible en faisant la part belle à «la discipline, la transparence, la redevabilité et la gouvernance exemplaire». Des règles qui, selon leurs propres termes, s’appliqueront au chef du gouvernement, aux ministres, aux députés, aux conseillers «mais aussi à tous les niveaux, dans chaque ministère, organisme paraétatique et département de la fonction publique». Mieux : ceux auxquels nous avons confié notre avenir pour cinq années – il n’en reste plus que deux à tenir – ont également affirmé leur détermination à mettre fin «aux nominations inadaptées aux postes importants». La solution était d’ailleurs toute trouvée : la mise en place d’un comité spécial.

L’histoire, vous la connaissez certainement. Sinon, il est facile de parcourir les actualités de ces derniers mois pour corroborer ces annonces faites dans l’opposition avec les pratiques en cours. Du Biscuitgate en passant par l’affaire Sobrinho, dont les éclaboussures ont atteint le plus haut sommet de l’État, jusqu’aux récentes affaires de drogue, le citoyen lambda n’a que l’embarras du choix. En attendant qu’il s’y retrouve, le pays s’enfonce chaque jour un peu plus dans la brume.

Ce serait une erreur fatale pour le gouvernement de sous-estimer le sentiment populaire. Se croyant invincible, Navin Ramgoolam a fait preuve de mépris envers l’opinion publique dans le passé, et il a été mis hors d’état de nuire en 2014. En tirant des leçons du passage de Ramgoolam à la tête du pays, il sera plus facile pour Pravind Jugnauth de commencer à se construire une nouvelle image.

La tâche ne sera certainement pas de tout repos car il est nécessaire au préalable, voire en même temps, de régler la communication défaillante du gouvernement. Un chantier de taille, le problème étant de nature chronique. Le Métro Express en est un bel exemple, notamment avec les difficultés des pouvoirs publics à communiquer efficacement afin de dissiper les doutes autour de ce projet.