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Législatives 2014: Maurice aux urnes

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Législatives 2014: Maurice aux urnes | business-magazine.mu

Attendues avec impatience par la population et la communauté des affaires, les élections générales se révèlent pleines de promesses. Après une année 2014 où la politique aura pris le pas sur les priorités socio-économiques, l’on s’attend à ceque le nouveau gouvernement issu des urnes se mette aussitôt au travail pour mener le pays à une autre étape de son développement. 

Le jour J estarrivé. Après une campagne aussi brève que tendue, les Mauriciens se rendent ce mercredi aux urnes pour élire un nouveau gouvernement. Et avec 739 candidats – un record ! –, ce scrutin s’annonce comme l’un des plus disputés depuis l’accession de l’île à l’Indépendance. Ces législatives mettront aux prises les deux principales alliances, à savoir l’Alliance de la Modernité et de l’Unité et l’Alliance Lepep. Autant dire que peu importe celle qui l’emportera, les citoyens seront sans nul doute pris d’un sentiment de déjà-vu.

Ces élections générales interviennent après neuf années de règne de Ramgoolam à la tête du pays. Empêtré dans des scandales et des polémiques durant l’année écoulée, Navin Ramgoolam a dû multiplier les acrobaties politiciennes pour maintenir une majorité à l’Assemblée nationale. L’on a ainsi vu, il y a trois ans, les députés du MSM Jim Seetaram et Mireille Martin rejoindre le PartiTravailliste après le départ du MSM du gouvernement. S’il a à un certain moment craint de se retrouver en position d’infériorité sur l’échiquier politique, Navin Ramgoolam a tout mis en œuvre pour éviter une éventuelle déroute  politique en contractantune alliance avec le MMM de Paul Bérenger. Un partenariat qui n’a pas laissé indifférents certains militants de la première heure qui y ont vu une trahison de l’idéologie du MMM. Face à cette levée de boucliers, Bérenger a fait ce qu’il sait faire le mieux: rabrouer les rebelles pour les faire rentrer dans les rangs.

Malaise chez les militants

Mais force est de constater que les rappels à l’ordre du leader emblématique n’ont cette fois pas eu  l’effet escompté. Pis, si des militants de base ont traîné leur malaise durant toute la campagne, d’autres pontes du parti ont, quant à eux, décidé de claquer la porte. Ainsi, Ivan Collendavelloo a choisi de fonder son propre partiet de se joindre au MSM et au PMSD. Autre tête d’affiche du parti, Kee Chong Li Kwong Wong, qui était jusqu’à tout récemment porte-parole des mauves sur les dossiers économiques, a joué à l’invité surprise au dernier grand rassemblement du MSM à Vacoas, dimanche dernier. Il n’a pas été tendre envers son ancien leader, estimant que « Bérenger pe couyonn militan ».Autant de désertions qui témoignent d’un réel malaise au sein du MMM.

Après un règne quelque peu mouvementé, Ramgoolam pensait s’offrir un peu de sérénité en s’alliant avec son éternel adversaire, au moment où les commentateurs politiques évoquaient une «usure du pouvoir ». Pas sûr que les dissensions qui agitent le MMM lui offrent la tranquilité d’esprit qu’il recherche.  Arrivé au pouvoir en 2005, à la tête de l’Allianc sociale, une coalition pour le moins hétéroclite composée du PMSD, du MMSM, des Verts et du MSN, Navin Ramgoolam était pourtant sûr de sa force. Le nouveau chef du gouvernement veut alors faire du pays un modèle économique au sein de la région. Et il se donne les moyens de ses ambitions en nommant Rama Sithanen au poste de ministre des Finances. L’homme est un technocrate doué et ambitieux. Mais son passage sera de courte durée. Deux ans après son arrivée, il menace de claquer la porte du gouvernement lorsque Rundheersing Bheenick est annoncé au poste de Gouverneur de la Banque de Maurice. Les deux hommes ne s’apprécient pas et ne manquent jamais de le faire savoir. Sithanen demande au chef du gouvernement de choisir entre Bheenick et lui. Ce sera Bheenick.Une première humiliation pourSithanen.

Aux législatives de 2010, second coup dur pour Sithanen. Face à la pression du MSM et de son leader, Pravind Jugnauth, il ne se fera pas accorder d’investiture par Navin Ramgoolam sous l’alliance de l’Avenir, une coalition du PTr, du MSM et du PMSD qui remportera les législatives avec 41 siègescontre 18 au MMM et 1 au Front solidarité mauricienne de Cehl Meeah.

Cette configuration, voulue encore une fois par Ramgoolam, ne sera pas de tout repos. Et pour cause, un an plus tard, soit en 2011, six ministres du MSM claquent à leur tour la porte du gouvernement. Ces démissions interviennent à la suite de l’inculpationet de la libération sous caution de Maya Hanoomanjee, alors ministre de la Santé. Elle était accusée par la Commission anti-corruption d’abus de pouvoir et de trafic d’influence dans l’affaire Medpoint.

Face à cette crise majeure, Ramgoolam lutte pour sauvegarder sa majorité. Il convaincra les députés MSM Mireille Martin et Jim Seetaram de rester au gouvernement en échange d’un poste ministériel. De nouveau sans ministre des Finances, le chef du gouvernement confie alors ce ministère clé à l’un de ses alliés, Xavier Duval. Cette promotion constitue pour le PMSD une avancée majeure puisqu’il occupe ainsi deux ministères clés. L’autre étant celui du Tourisme, avec à sa tête Michael Sik Yuen.

Jamais deux sans trois, dit l’adage. Habitué à gérer les situations de crise, Ramgoolam se voit contraint d’en gérer une autre cette année : le départ du PMSD. Le leader des bleus, qui s’était prononcé contre une alliance avec le MMM, s’est finalement résigné à quitter le gouvernement lorsque les tractations entre les mauves et les travaillistes se précisent. Et comme l’on n’est jamais mieux  servique par soi-même, Navin Ramgoolam a cette fois préféré assumer lui-même la responsabilité des Finances pourmettre fin au jeu des chaises musicales.

Un troisième mandat en vue

Aujourd’hui, en alliance avec l’ennemi d’hier, Navin Ramgoolam entend bien être reconduit pour un troisième mandat consécutif. D’autant plus que pour s’assurer de garder la main sur le pouvoir, le chef de file des travaillistes mise sur le projet de la Deuxième République. Un projet qui, faute d’explication, n’a pas su convaincre une large frange de la population mauricienne, qui n’y voit qu’un mécanisme conçu par les deux leaders de l’AlliancePTr-MMM pour s’arroger le pouvoir.

En face, les dirigeants de l’Alliance Lepep ne se font pas prier pour dénoncer ce qu’ils estiment être « une alliance pour servir des intérêts personnels » et cela « au détriment des Mauriciens ». On l’aura compris, le projet de Deuxième République constitue l’un des enjeux majeurs de ces élections.

Côté programme électoral, les électeurs ont dû, comme souvent, attendre la dernière minute pour en prendre connaissance. Les dirigeantsdes deux blocs ayant préféré aboyer quelques mesures populistes en espérant grignoter des voix à leurs adversaires du jour. Au moment de glisser le bulletin de vote dans l’urne, il convient de jeter un œil attentif sur ce que proposent ceux qui ambitionnent de présider à la destinée du pays pour les cinq prochaines années. Du côté du PTr-MMM, l’on annonce la créationde 60 000 à 75 000 emplois sur cinq ans en ciblant essentiellement les jeunes et les femmes. Très décrié par les automobilistes, le permis à points, soutient l’Alliance de l’Unité et de la Modernité, sera revu. Enfin, la taxe sur les SMS sera abolie. Autant de mesures qui, espèrel’état-major rouge et mauve, inciteront les électeurs à leur accorder leurs voix.

L’Alliance Lepep, qui a dégainé son programme électoral en premier, assure, pour sapart, vouloir créer un « deuxième miracle économique », selon la formule de Vishnu Lutchmeenaraidoo. Outre la pension de vieillesse à Rs 5 000, ce bloc politique a promis de rétablir l’approvisionnement en eau 24 heures sur 24.

Après avoir entendu les nombreuses promesses formulées par les différents partis en lice, il revient aujourd’hui aux électeurs de faire leur choix.