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France-Maurice : renforcement des liens commerciaux

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France-Maurice : renforcement des liens commerciaux | business-magazine.mu

La France demeure pour l’économie mauricienne un solide appui. Le tourisme, l’immobilier de luxe et les entreprises tournées vers l’exportation puisent principalement leurs recettes du marché français. Une relation qui pourrait être impactée si Maurice ne préserve pas sa bonne image en termes de sécurité et de tranquillité.

Ancienne colonie française, Maurice a su conserver des liens forts avec la France. Au-delà de cette relation historique, la France est aujourd’hui un des indispensables partenaires commerciaux sur lequel l’économie mauricienne peut s’appuyer. Pour preuve, la France s’impose aujourd’hui comme le troisième partenaire économique de Maurice. Elle est l’un de nos plus gros importateurs avec Rs 8,1 milliards et est le troisième fournisseur de Maurice, avec Rs 11,9 milliards.

Ainsi, même si Maurice noue des relations de plus en plus étroites avec les grandes puissances mondiales telles que la Chine et l’Inde, la France demeure un important partenaire. C’est ce que précise Laurent Garnier, ambassadeur de France :«Il est frappant de constater que le volume des échanges entre nos deux pays se maintient à un niveau élevé depuis plusieurs années, ce qui est un signe de maturité, mais qu’il progresse encore, ce qui montre le dynamisme de nos relations économiques. Le phénomène nouveau est que la Chine devance l’Inde dans les importations de Maurice, sans impact sur la place de la France.»

Dans ce partenariat entre les deux pays, il est impératif de souligner la place essentielle de l’Agence française de Développement (AFD). Depuis sa réinstallation en 2007, l’AFD a financé l’économie mauricienne à hauteur de Rs 16 milliards, principalement sous forme de prêts aux secteurs public et privé dans les infrastructures, l’environnement l’eau ou l’énergie. Et ce montant place la France parmi les tout premiers bailleurs de fonds bilatéraux.

Par ailleurs, le partenariat économique ne se résume pas aux flux commerciaux. La France est le premier pourvoyeur d’investissements directs étrangers et de touristes avec environ 400 000 visiteurs en 2015. Pour Laurent Garnier, ces chiffres prouvent qu’il n’y a aucun nuage sur les relations économiques qu’entretiennent les deux pays «même s’il est clair que Maurice a diversifié ses partenaires et que la concurrence est forte.»

Les investissements français représentent entre 25 % et 30 % de l’ensemble des IDE à Maurice. Si le volume total des IDE à Maurice a chuté de Rs 14,1 milliards en 2014 à Rs 9,6 milliards en 2015, le flux des IDE français n’a que relativement peu chuté puisqu’il est passé de Rs 3,81 milliards en 2014 à Rs 3,56 milliards en 2015. «C’est donc une contribution substantielle à l’économie mauricienne», souligne Laurent Garnier.

Tic-BPO : secteur plus prisé par les investisseurs français

Selon l’ambassade de France, ces investissements ont été faits par les plus grandes entreprises, parfois de longue date, dont Orange, Total, Lafarge Holcim, Transinvest, Accor ou Albioma dans l’énergie, mais aussi de nombreuses PME.

En effet, ce partenariat France-Maurice permet également aux entreprises françaises de s’installer facilement dans le pays. Pour preuve, en 2015, le service économique de l’ambassade de France a eu connaissance de l’implantation à Maurice d’une dizaine d’entreprises dont la plupart sont des PME. Denis Lacour, président de la Chambre de Commerce et d’Industrie France Maurice, indique que l’organisation a vu l’arrivée d’une quinzaine de nouveaux membres dans l’île. «L’histoire des deux pays et le côté francophone de Maurice facilitent l’installation d’entreprises françaises. Il y a cette possibilité d’aborder les marchés de l’Afrique anglophone à partir de Maurice», ajoute-t-il.

Au niveau de l’ambassadeur de  France, on  indique qu’environ 150 entreprises françaises sont implantées à Maurice, dont une quarantaine provenant de La Réunion. Cette présence génère des investissements comme des emplois.

Ainsi, ce sont principalement les Tic-BPO et le secteur de la construction qui attirent les investisseurs français. Dans le cas des Tic-BPO, le bilinguisme et le faible décalage horaire avec l’Europe sont des facteurs qui attirent les investisseurs français. C’est ce que confirme Laurent Garnier : «De nombreux secteurs sont représentés, certains domaines intéressent plus particulièrement les entreprises françaises, comme les Tic – les télécommunications, les services informatiques, les éditions de logiciels, entre autres – et la relation clients à distance – le BPO. Les autres secteurs concernés sont la grande distribution, le tourisme, l’immobilier, l’énergie ou des petites activités manufacturières comme l’horlogerie, la bijouterie, la maroquinerie et les dispositifs médicaux.»

À l’ambassade de France, on précise que les investissements sont également réalisés par des particuliers français, à travers des acquisitions dans l’immobilier résidentiel, mobilisant la plupart des IDE, et d’entrepreneurs individuels qui créent des TPE dans des domaines aussi variés que les Tic, le tourisme, la publicité ou encore l’import-export.

Selon les dernières estimations de Statistics Mauritius, la croissance économique, cette année, ne dépassera pas la barre des 4 %. En effet, depuis deux ans, l’économie nationale est en berne. Peu de projets immobiliers de grande envergure voient le jour. Cette situation peu propice au développement économique découragera-t-elle les investisseurs français ? Laurent Garnier trouve que la situation est très variable selon les secteurs : «Les entreprises orientées vers des marchés ou des clients extérieurs sont peu sensibles à la croissance locale et continuent d’investir et de créer des emplois. Je pense ici au secteur des Tic ou les activités manufacturières à l’export.» En revanche, les filiales de groupes français ayant une activité domestique subissent comme les autres le ralentissement de l’activité économique, notamment dans le BTP (bâtiments et travaux publics).

Mais comme toute plateforme incontournable pour l’investissement, Maurice n’est pas à l’abri de scandales financiers qui pourraient nuire à son image. Par exemple, il y a eu l’affaire BAI, qui aurait pu avoir des répercussions graves sur l’image du pays. Selon Denis Lacour,  l’impact de ce scandale politico-financier sur les investissements provenant de France a été marginal. L’ambassadeur de France abonde dans le même sens. Il précise que les investissements français à Maurice en 2015 ont été plus ou moins similaires à ceux de 2014. «Cette affaire a certainement conduit à quelques rapports de décisions d’investissements en attendant que la situation ne se clarifie», indique-t-il.

Quid du traité fiscal Inde-Maurice ? Pour l’ambassadeur de France, les investisseurs qui utilisent les traités de non-double imposition et les accords de protection des investissements signés par Maurice viennent de toutes les régions du monde. «Ces outils sont un véritable atout pour la stratégie de hub d’investissement. L’enjeu à court terme est de moins dépendre des flux vers l’Inde. À moyen terme, la mise en œuvre du projet BEPS et de l’OCDE de lutte contre l’érosion fiscale et les bases taxables est un autre défi majeur pour le secteur financier mauricien. La bonne gouvernance du secteur sera un facteur clé d’attractivité, quelle que soit l’évolution du modèle», soutient-il.

Renforcer la sécurité

Même si Maurice continue d’attirer les investisseurs et touristes français, les actes d’intimidation et de vandalisme à l’encontre de l’ambassade de France, le 30 mai dernier, pourraient avoir de graves répercussions économiques. C’est l’avis de Denis Lacour qui explique que si l’impact médiatique a été relativement faible, il ne faudrait pas que ce type d’événement se reproduise, au risque de changer l’image paisible de Maurice auprès des touristes. Laurent Garnier note que si cet acte reste isolé, il n’y aura pas de répercussions à court - moyen terme. «Mais il est clair que parmi les facteurs d’attractivité d’un pays, que ce soit pour les investisseurs ou les touristes, les questions de sécurité sont essentielles, au même titre que la stabilité politique.»

Pour preuve, la croissance du nombre de touristes à Maurice en 2015 a sans doute bénéficié de la dégradation de la situation sécuritaire dans d’autres pays. Pour l’ambassadeur de France, Maurice bénéficie d’une bonne image en termes de sécurité et de tranquillité. Il attend, par ailleurs, que l’enquête en cours permette d’identifier les auteurs de ces actes. «Ce qui nous permettra de mieux appréhender les motifs et la menace éventuelle. Partout dans le monde, l’objectif des autorités est de renforcer les dispositifs de surveillance et de renseignement permettant de prévenir de tels actes. Malheureusement, aucun pays ne peut se considérer à l’abri de telles menaces», déplore-t-il. Une fausse note qui ne devrait pas enrayer la bonne dynamique des relations commerciales entre Maurice et la France.

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