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Maurice, plate-forme en devenirpour le shopping de luxe

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Maurice

L’île Maurice est connue comme une destination immobilière de luxe. Aujourd’hui, le défi est d’imposer l’île comme une destination de shopping de luxe. Mais Maurice fait face à un sérieux concurrent dans ce domaine : Dubaï.

Après s’être imposée comme une destination touristique, l’île Maurice est graduellement perçue comme une destination de luxe. En effet, l’île Maurice serait de plus en plus associée au luxe. Selon Barnes Mauritius, entreprise spécialisée dans les activités immobilières, ce secteur du luxe pèserait autour plus de Rs 50 milliards à Maurice. Pour eux, il existe déjà un marché du luxe à Maurice.

Outi de Falbaire, directrice de la société, est d’avis que les clients fortunés connaissent l’île Maurice comme une destination de luxe. D’ailleurs, selon lui, c’est ce qui a poussé les grandes marques à s’implanter sur notre île. «Un grand nombre de gens fortunés voient le bénéfice de s’installer fiscalement à l’île Maurice mais ils veulent conserver le même niveau de vie qu’ils ont dans leurs pays», argue-t-il.

Pour sa part, Sandrine Fan-chette, représentante de Roche Bobois, est d’avis qu’il existe un marché émergent pour le haut de gamme à Maurice.

Du côté de Poncini, on partage le même sentiment. Christian Poncini, son CEO, fait même remarquer que les expatriés résidents représentent un avantage certain pour ce secteur car ils «consomment sur place». Et d’ajouter que les Mauriciens sont de plus en plus nombreux à avoir un penchant pour les produits de luxe. Pour preuve, les deux dernières décennies ont vu la classe moyenne émerger et la croissance du pays a aussi permis à de nombreuses personnes de construire ou de multiplier leur fortune et de mieux gagner leur vie. «Cela donne une assise à ce marché qui n’existait pratiquement pas auparavant», observe-t-il.

Une destination pour l’immobilier de luxe

Il faut le dire : le marché du luxe a commencé à prendre forme à Maurice grâce aux initiatives du gouvernement de développer des projets IRS, RES et, aujourd’hui, PDS. En effet, ce segment immobilier à Maurice attire particulièrement des individus fortunés, en quête de grands espaces, et qui veulent surtout garder leur vie privée. Ce serait la principale raison de cet engouement pour les villas à Maurice. C’est ce que confirment les derniers chiffres du Board of Investment (BoI). Le pôle immobilier de luxe attire le plus d’investissements directs étrangers (IDE) à Maurice. On évoque un pourcentage de 60-65 % des investissements étrangers.

En effet, Maurice est plus connue comme une destination immobilière de luxe qu’une destination de shopping de luxe. Un point souligné par Sandrine Fanchette qui laisse comprendre que les marques de luxe sont sous-représentées dans l’île.

Mais la route se révèle longue pour Maurice car dans le domaine du shopping de luxe, le pays doit faire face à un sérieux concurrent : Dubaï. Chez Barnes Mauritius, on avance que Dubaï est beaucoup plus développé sur le commerce et le shopping. «C’est difficile de comparer» tandis que Maurice est plus perçue comme une destination lifestyle et n’est pas encore une destination de shopping comme l’est Dubaï. La représentante de Roche Bobois fait ressortir qu’à Dubaï, le choix est plus vaste avec des milliers de magasins, des marques du monde entier sont présentes sans parler des attractions. Du chemin a été fait mais il reste encore à faire. Elle est d’avis qu’à Maurice, il faut des boutiques de luxe pour les vêtements, les chaussures, les sacs, les chapeaux ou encore des pâtisseries réputés. «Qui plus est, très peu de galeries d’art haut de gamme proposent, par exemple, de vraies pièces comme Adamah à Anahita»,
ajoute-t-elle.

Pour Christian Poncini, les nouveaux riches devraient faire leur shopping à Maurice car les prix sont plus compétitifs. Il déplore le fait que les destinations comme Dubaï et Hong Kong soient encore perçues comme des destinations de shopping même si les prix pratiqués ne sont plus du tout aussi attractifs qu’il y a 15 ans.

Même son de cloche du côté de Roche Bobois.Les prix sont de moins en moins compétitifs, soutient-on. Pour preuve, Sandrine Fanchette cite l’exemple du marché du meuble. Elle dit recevoir de plus en plus de demandes émanant de Dubaï et des pays limitrophes car les tarifs et services sont plus avantageux que ce qui est proposé sur place.

Ce qui fait dire à Outi de Falbaire de Barnes Mauritius, que «Maurice a le potentiel de devenir cette destination de shopping de luxe.» Elle rappelle cependant que la longueur d’avance de Dubaï n’est pas négligeable et pour réussir à nous ajuster à ce niveau, il faut que le gouvernement donne le pas et un nouveau souffle sur l’exigence afin d’imposer et de maintenir une qualité internationale. «Le nouveau riche est maintenant très ouvert sur le monde et voyage beaucoup. Il sait donc où aller pour trouver ce qu’il cherche. Et donc, si nous voulons aussi développer Maurice comme une destination de shopping de produits de luxe et si nous devons accueillir ces individus fortunés, il est impératif que nous ayons un service avec une qualité inégalable», dit-elle.

D’ailleurs, c’est un des souhaits du Premier ministre, Pravind Jugnauth, de faire de Maurice une destination de shopping de luxe, en transformant le pays en une Duty-free island. Une vision que valide Christian Poncini, CEO de Poncini.C’est à son avis une bonne idée car un grand nombre de produits sont déjà hors taxes. «Il faut juste un plan d’ensemble et surtout une volonté collective», souligne-t-il. Outi de Falbaire rejoint ce point. Elle suggère que tous les principaux acteurs du marché du luxe se concertent, tout en incluant le gouvernement, pour définir un plan précis pour promouvoir le marché du luxe à Maurice pendant les 50 prochaines années. «Il faut que le gouvernement fasse le premier pas et donne un nouveau souffle quant à la volonté de mettre en place et de maintenir une qualité internationale», préconise-t-elle.

Un avis partagé par Sandrine Fanchette, représentante de Roche Bobois. «Il faudra déjà avoir un ‘pool’ de prestataires assez importants et fiables de produits haut de gamme qui vont collaborer», dit-elle. Et de citer l’exemple de l’Afrique du Sud, où il existe des dizaines de marques de luxe qui collaborent quotidiennement notamment au niveau de la communication et de l’événementiel pour des événements éphémères, des pop-up markets, des conférences ou pour du co-branding. Par exemple,
Roche Bobois a récemment finalisé en Afrique du Sud l’accord pour l’organisation de trois événements pour les prochains jours/mois. L’un avec les artistes sud-africains les plus connus ; un autre avec la marque française de boissons alcoolisées la plus renommée à l’étranger et le troisième pour une journée VIP dédiée aux femmes et organisée pour des sociétés de haute couture.

Pour Ivan Montocchio, directeur des franchises Hugo Boss et Lacoste, ce travail doit commencer par le Sir Seewoosagur Ramgoolam International Airport (SSRIA) de Maurice. En effet,l’aéroport demeure la vitrine de l’île Maurice et le choix de produits de luxe y est minime, comparé aux offres de l’aéroport de Dubaï. Pourtant, Maurice abrite une belle brochette de marques haut de gamme.Citons Lacoste, Hugo Boss, Madison, Guess, Swarovski, Cartier, entre autres.

Mais les intervenants s’accordent sur le même violon : il est impératif de promouvoir le marché du luxe dans l’île. Christian Poncini laisse entendre qu’il faut dynamiser le tourisme en hébergeant plus d’étrangers et cela, en faisant une meilleure communication internationale. Pour Outi de Falbaire, le gouvernement a mis en place des règles et des structures afin de protéger l’acheteur avec les garanties. Elle évoque à cet effet le segment de l’immobilier de luxe. «Il est important qu’on fasse la même chose dans la gestion immobilière pour que le client arrivant à l’île Maurice puisse être assuré d’être servi par un agent professionnel d’après les normes et les lois établies par le gouvernement mauricien», recommande-t-elle. Chez Barnes Mauritius, on insiste sur la nécessité de mettre l’accent sur la qualité mais aussi sur l’environnement du bien, entre autres considérations. «Nous devons
être compétitifs non pas vis-à-vis d’autres projets sur le sol mauricien mais être en compétition avec les projets sur le marché international
», soutient-on.

Christian Poncini évoque un tout autre problème qui endigue le marché du luxe. Il avance que ce marché manque cruellement de personnel qualifié pour la vente. Il cite l’exemple de l’étranger qui propose des formations poussées pour ce type de vendeur spécialisé. «On ne devient pas vendeur du luxe à Paris, Londres ou encore Milan en poussant la porte. Rien n’est fait ici dans ce secteur. On laisse les opérateurs se débrouiller»,  souligne-t-il. Selon lui, le MITD devrait se pencher sur cette situation. Il cite à nouveau le Vieux Continent où ce type de vendeur se qualifie au bout de trois ans de formation. «À Maurice, on forme des serveurs en hôtellerie, des designers, des techniciens divers mais personne à la vente de produits de luxe ; d’où le faible niveau rencontré voire parfois désastreux lorsque vous faites votre shopping», ajoute le CEO de Poncini, qui estime que les magasins ne peuvent pas passer leur temps à former des personnes qui acceptent d’exercer ce métier non pas par passion mais par obligation. Et d’ajouter qu’il faut aimer, vouloir apprendre et connaître les produits, mais surtout être formé sur ce qu’est le luxe et l’attente de ce type de clientèle. «Il faut savoir quel discours tenir devant un client toujours très exigeant», conclut-il.