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Services d’externalisation : La baisse des prix va-t-elle aider Maurice à émerger ?

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Services d'externalisation : La baisse des prix va-t-elle aider Maurice à émerger ? | business-magazine.mu

Mauritius Telecom a récemment baissé ses tarifs pour les lignes dédiées Global IP de 60 % avec la possibilité pour les entreprises d’opter pour une vitesse améliorée. Mais est-ce suffisant pour booster la compétitivité des entreprises du secteur des Tic-BPO et aider le pays à émerger sur le plan mondial ?

Si Maurice se distingue toujours comme un pays où règne la stabilité politique et économique et possède un atout considérable, une main-d’œuvre bilingue qui lui a permis d’attirer un grand nombre de multinationales et d’investisseurs étran-gers dans les Tic-BPO, il y a eu un certain essoufflement de ce secteur avec une croissance à moins de deux chiffres depuis deux ans. Afin d’insuffler un nouveau dynamisme dans ce milieu, Mauritius Telecom vient de revoir à la baisse ses tarifs pour le secteur BPO et les centres de contacts. Les entreprises peuvent aussi opter pour une meilleure vitesse de connexion pour le prix payé jusqu’ici ou un amalgame des deux. Les opérateurs ont ainsi le choix entre une connexion Internet à moins cher ou cinq fois plus rapide. Est-ce suffisant ? Comment cette décision est-elle accueillie parmi les opérateurs ?

Roshan Seetohul, Vice-Président d’Euro CRM, concède que cette baisse tant attendue est la bienvenue chez les opérateurs et reconnaît que Mauritius Telecom frappe un grand coup avec cette baisse qu’il juge importante et salutaire pour le secteur. D’autant plus que le secteur des Tic-BPO local fait face à une rude concurrence de la part des pays de l’Afrique du Sud-Est où la connexion Internet est encore plus rapide, moins coûteuse avec, de plus, une main-d’œuvre moins chère qu’à Maurice.

Des pays francophones comme la Tunisie et le Maroc se sont aussi fait un nom dans ce secteur, faisant de ce bilinguisme que nous avons pris pour acquis et présenté comme un avantage comparatif un atout que d’autres possèdent. Toutefois, maintient pour sa part le Managing Director d’Apollo Blake, Kiran Ruchan, cette baisse dans les tarifs demeure significative et permettra de revoir les offres, de fournir un service plus fiable et même d’avoir un meilleur niveau de service, en termes de redondance notamment.

À première vue donc, cette baisse correspondra dans les court et moyen termes à une hausse de la compétitivité des entreprises opérant sur le sol mauricien par rapport aux concurrents dans la région. Mais est-ce suffisant pour devenir «leader mondial», comme le prévoit Mauritius Telecom ? Roshan Seetohul souligne qu’il faudra d’abord se concentrer à s’établir comme un leader régional pour ensuite aspirer à briller dans les plus grandes eaux.

Se concentrer sur des services à valeur ajoutée

Que manque-t-il à notre île pour devenir un acteur international de premier plan ? Roshan Seetohul répond que même si nous pouvons offrir certains avantages qui expliquent l’installation de nombreuses sociétés européennes et asiatiques dans le pays, il manque à Maurice quelques grands noms du secteur des Tic-BPO mondial avant de pouvoir prétendre être une destination de référence. Il faudrait également offrir aux entreprises des tarifs d’électricité à des taux préférentiels, ajoute-t-il, surtout à celles opérant à Ébène. Selon lui, toutes les entreprises ne bénéficieraient pas des mêmes tarifs ; et ce serait une anomalie à corriger.

Ce n’est pas tout. «Il faudrait un système de transport public qui soit en opération aux heures de travail du secteur des Tic-BPO, qui tourne quasiment 24/24 et 7/7», insiste Roshan Seetohul, car les coûts qu’encourent les entreprises pour louer les vans sont conséquents, se situant juste après les salaires. Ainsi, si Maurice souhaite devenir un leader mondial dans ce domaine, outre la réduction du coût de l’Internet qui semble satisfaire les opérateurs, il faudrait une stratégie nationale avec une politique énergétique et du transport qui viendra s’ajouter à une baisse tarifaire pour permettre aux entreprises de se retrouver parmi les plus grands.

Pour l’instant, nous dit Kiran Ruchan, ce sont les Philippines et l’Inde qui dominent le secteur BPO mondial. Pour arriver à les surpasser, il est impératif d’avoir une main-d’œuvre qualifiée pour permettre aux entreprises installées à Maurice d’être plus compétitives sur le plan international. Or, ce n’est pas le cas, remarque Kiran Ruchan. Ce qui le pousse à penser que nous ne pouvons pas nous comparer à d’autres pays pour le moment.

C’est le même son de cloche du côté de Vidia Mooneegan, Managing Director de Ceridian Mauritius : «Nous ne pouvons devenir un leader mondial à cause de la taille de notre population active. Nous devrions plus nous concentrer sur des services à valeur ajoutée, ce que nous faisons déjà très bien. Cela devrait ainsi contribuer à créer des emplois mieux rémunérés».

Faire de Maurice un centre d’externalisation de choix

Et ce ne sont pas des compétiteurs qui manquent. On trouve parmi les pays francophones, le Maroc, la Tunisie et même Madagascar – qui pourrait bientôt devenir un sérieux rival si elle arrive à se stabiliser politiquement et économiquement. Du côté des pays anglophones, les concurrents sont les pays d’Europe de l’Est et le Portugal. S’agissant de nos principaux atouts, à savoir la stabilité économique et politique et le bilinguisme, ils peuvent être acquis par des pays africains, tout comme les pays de l’Asie du Sud-Est l’ont fait.

Il faut reconnaître que durant les dix dernières années, l’île a su relever des défis majeurs concernant l’infrastructure nécessaire au bon développement du secteur  des Tic-BPO. Quels étaient-ils ? Au tout début, il y a maintenant un peu plus de dix ans, les opérateurs du secteur ont démarré avec des services basiques pour ensuite entamer avec «des opérations à valeur ajoutée», souligne Roshan Seetohul.

En 2004, la Cybercité comprenait deux Cyber Towers et quelques autres bâtiments qui pouvaient se compter sur les doigts d’une main. Aujourd’hui, ébène grouille d’activités. Le fait qu’elle doit faire face à des problèmes d’indisponibilité d’espaces de parking prouve en quelque sorte qu’elle est sortie du statut de Cybercité quasi désertique à une véritable petite ville couverte de tours et qui fonctionnent pour la plupart 24/7.

Pour en revenir à la stratégie tarifaire, bien que Kiran Ruchan la juge comme une étape cruciale pour rendre l’industrie plus compétitive, il tient à rappeler que pendant bien trop longtemps, «le prix de la bande passante n’a pas été celui du marché international». Il était trop élevé, remarque-t-il, ce qui a eu un impact négatif sur la capacité des opérateurs mauriciens à rivaliser avec les autres destinations. Roshan Seetohul ajoute, quant à lui, qu’outre cette baisse, c’est la mise en place du Joint Committee entre les secteurs privé et public qu’il accueille favorablement. Cela, dit-il, pourrait créer une synergie pour travailler conjointement sur la vision de faire de Maurice un centre d’externalisation de choix.

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