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Industrie pharmaceutique et de la biotechnologie : jeter les bases pour un écosystème solide et durable

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L’industrie pharmaceutique et de la biotechnologie connaît une croissance mondiale significative, et il est crucial pour maurice de saisir les opportunités offertes. l’île possède des avantages géographiques, un environnement favorable aux affaires et une maind’ oeuvre qualifiée, ce qui la positionne idéalement pour devenir un acteur majeur de ce secteur en plein essor, et cela avec le soutien du gouvernement.

L’INDUSTRIE pharmaceutique et de la biotechnologique est en pleine expansion sur le marché global, et il est important que Maurice se positionne sur ce marché. Le Dr Fabien Boullé, neuropharmacologue, fondateur et CEO d’Axonova, indique que cela fait déjà plusieurs années que le gouvernement a mis en place des plans d’encouragement pour les promoteurs souhaitant se lancer dans ce type d’activité, ainsi que le cadre règlementaire qui existait auparavant sur certains segments de cette industrie tels que la R&D clinique et préclinique et la production de nutraceutiques. Selon ses remarques, certes l’industrie pharmaceutique est encore à un stade précoce de son développement à Maurice, mais les bases sont déjà jetées pour créer un écosystème solide et durable.

En effet, lors du Budget 2021-2022, l’accent été mis sur ce secteur pour lui assurer une croissance pérenne. Un financement initial d’un milliard de roupies a été notamment voté pour attirer les laboratoires pharmaceutiques et de vaccins de renommée internationale en vue d’établir des activités de fabrication à Maurice. De plus, la création du Mauritius Institute of Biotechnology (MIB) est prévue dans le but de canaliser les financements vers des projets qui répondent aux conditions établies par le gouvernement. L’Economic Development Board (EDB) avait lancé en juin de la même année une Expression of Interest (EoI) pour le développement d’une industrie pharmaceutique et biotechnologique à Maurice, cela toujours dans les domaines prioritaires des vaccins et des produits pharmaceutiques.

Fabien Boullé précise que l’industrie pharmaceutique connaît en outre une croissance moyenne de 3 à 6 % par an et devrait atteindre environ 1 900 milliards de dollars d’ici à 2027. À Maurice, selon les chiffres de l’EDB, le secteur des biotechnologies à application pharmaceutique et médicinale représente aujourd’hui un chiffre d’affaires de plus de Rs 2,3 milliard, avec notamment plus de 80 études cliniques conduites à ce jour sur plus de 15 000 volontaires. Pour lui, cela montre bien la capacité de Maurice à ramener des revenus de laboratoires pharmaceutiques étrangers. «Cette industrie est en pleine croissance à Maurice, et il existe une volonté à la fois de la part du gouvernement mais aussi du secteur privé d’investir davantage dans ce secteur, ce qui laisse présumer une croissance significative sur les prochaines années », dit-il.

Et de poursuivre que l’industrie pharmaceutique est le secteur économique qui regroupe en gros les activités de recherche, de fabrication et de commercialisation des médicaments pour la médecine humaine ou vétérinaire. Une activité exercée notamment par les laboratoires pharmaceutiques et les sociétés de biotechnologie. D’ailleurs, il enchaîne qu’à Maurice, nous comptons aujourd’hui plus de 25 compagnies actives dans le secteur de la recherche et de la production pharmaceutique et biotechnologique. Ces entreprises sont engagées à divers niveaux de la chaîne de valeur avec, entre autres, des laboratoires de recherche préclinique et clinique, des laboratoires de bio-analyses, des fabricants de dispositifs médicaux ou de nutraceutiques. Au bout de la chaine de valeur, il y a également un grand nombre d’acteurs impliqués dans la distribution pharmaceutique et la revente de médicaments et autres produits de santé.

Croissance attendue…Mais de valeur seulement

«Le gouvernement a récemment mis en place le Mauritius Institute of Biotechnology qui a pour objectif d’investir plus de Rs 1 milliard dans les secteurs des biotechnologies et de la pharmaceutique. Il existe également le Mauritius Research & Innovation Council qui accorde des subventions depuis déjà plusieurs années dans les projets de recherche, y compris dans la pharmaceutique. Outre l’accès au financement, le gouvernement aide à la mise en place du cadre réglementaire facilitant les opérations, mais également pour encourager les promoteurs à se lancer dans ce secteur émergent grâce à des avantages fiscaux tels que des crédits d’impôts sur les revenus, des exemptions de taxes sur l’achat d’équipements spécialisés ou la construction de laboratoires. De plus, certaines organisations gouvernementales telles que l’EDB font aussi un travail de longue haleine pour attirer des compagnies étrangères à s’implanter ou investir à Maurice», renchérit-il.

Cependant, de l’avis de Nitin K. Busguth, Vice-Chairman du Pharmacy Council et Managing Director de Pharma Concepts, l’évolution dans le secteur pharmaceutique semble être très sombre. «Le gouvernement, avec sa volonté de peser sur les prix du secteur à travers le ministère du Commerce et la Competition Commission, est venu de l’avant avec une ‘regressive markup’, qui est en fait une ‘reductive markup’ déguisée. Et, par la même occasion, a complètement raté le coche et n’a pu faire jouer la concurrence. » Pour lui, à ce jour, il y a une cascade d’augmentations des prix dans le secteur. Et donc, il estime qu’il y aura certes une croissance au niveau du secteur mais ce sera en termes de valeur et non pas en volume, pour la bonne et simple raison que la roupie se déprécie visà- vis du dollar et d’autres principales monnaies de change, ainsi qu’avec la hausse des ingrédients actifs et du coût du fret.

Nitin K. Busguth enchaîne que la possibilité réelle de la fermeture de nombreuses pharmacies est bien réelle avec les nombreux frais d’opération – baisse du markup, augmentation des produits, boni de fin d’année, compensation salariale en début d’année 2024. De plus, avec les effets de la guerre en Ukraine et le conflit israélo-palestinien, le risque est encore plus présent du fait qu’il y a un manque de stabilité sur le plan mondial, surtout que nos produits viennent de la région et passent par le Canal de Suez.

Pour lui, il y a eu de nombreuses annonces depuis 2021 dans les différents budgets mais à ce jour rien de concret avec le parc pharmaceutique, les usines, les laboratoires ainsi la fabrication des vaccins dont les règles GMP (Good manufacturing practice) n’ont pas été instaurées. Les aspects de qualité, de contrôle de qualité avec les normes, des produits pour la consommation doivent être effectués en amont et aval des lois mauriciennes.

L’accès au financement est capital pour la recherche

Une autre problématique soulevée est que depuis la pandémie, on remarque une pénurie de médicaments français sur le marché mauricien. «Des médicaments très prisés tels que Sargenor ampoules, Sargenor ampoules Vit C, Sargenor comprimés effervescents, Pevaryl crème, poudre, solution et ovules vaginales, Pevisone crème, Maxillase comprimés et sirop, entre autres, dont la confiance de la provenance du produit est une référence mondiale, sont en rupture de stock au niveau du marché. Cela est notamment lié au niveau mondial avec la chaîne d’approvisionnement française qui est dépendante d’autres pays – la Chine et l’Inde qui sont les producteurs d’API (Ingrédients Pharmaceutiques Actifs), des flacons, des tubes stériles, entre autres.»

Quoi qu’il en soit, pour les appels d’offres, Nitin K Busguth avise que du moins il n’y a pas de problèmes à ce niveau. «Les médicaments sortent principalement de l’Asie (Inde, Bangladesh, Pakistan) et comme c’est sur appel d’offres, les soumettants doivent prévoir les différentes disponibilités pour être en règle avec les critères.» Ainsi, la situation est quelque peu soutenable à ce niveau.

Fabien Boullé, quant à lui, constate que l’industrie du médicament a beaucoup évolué au cours des dix dernières années, avec plusieurs tendances majeures qui influencent ce secteur, notamment au niveau des biotechnologies, qui sont devenues un vrai pilier de l’industrie pharmaceutique. Il cite comme exemple la thérapie cellulaire et génique, qui permet de soigner des maladies rares, ou encore la médecine personnalisée grâce à la pharmacogénétique. «Il faut souligner également que l’intelligence artificielle commence à prendre elle aussi de l’importance dans ce secteur, avec en autres de nouvelles solutions pour accélérer la découverte de médicaments et optimiser les processus de fabrication.»

Cependant, il estime que ce qui imprègne le progrès, ce sont les tendances émergentes dans l’industrie pharmaceutique qui ont des implications importantes pour la gestion des entreprises du secteur. Pour rester compétitives, il rappelle que les entreprises doivent innover en permanence, s’adapter aux nouvelles tendances et intégrer les innovations technologiques dans leurs stratégies de développement et de production. « L’accès au financement pour la recherche et l’innovation est capitale dans ce secteur.»

Le cadre réglementaire reste également un défi majeur pour les compagnies opérant à Maurice. «Bien qu’il existe déjà certaines lois facilitant les opérations, cellesci doivent être revues et adaptées en permanence afin de fluidifier et d’accélérer les opérations et les procédures administrative pour les permis et les autorisations, mais surtout pour améliorer l’ease of doing business dans ce secteur. Le secteur pharmaceutique requiert également des compétences pointues et qualifiées. Et donc, pour assurer la croissance du secteur, il va être primordial de travailler en étroite collaboration avec le secteur académique afin de développer des cursus universitaires permettant de former les futurs scientifiques sur les métiers de l’industrie pharmaceutique, mais également d’attirer les talents mauriciens partis faire carrière dans l’industrie pharmaceutique hors du pays».

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