Type to search

Business files

Sécurité alimentaire : assurer l’approvisionnement du pays en féculents malgré les perturbations mondiales

Share

Jouant un rôle fondamental dans le régime alimentaire mauricien, les féculents, notamment le riz, le blé, les pâtes et les pommes de terre, fournissent des glucides complexes et des nutriments essentiels. Cependant, le marché de l’amidon est très sensible aux événements climatiques sécheresses/inondations – ainsi qu’aux fluctuations des taux de change, des taux de fret et des événements géopolitiques.

EN 2022, les importations mauriciennes de céréales, farine, amidon, préparations et produits laitiers ont atteint 77,02 millions de dollars américains selon la base de données Comtrade des Nations unies sur le commerce international. Cette dépendance à l’importation a pris une tournure problématique en juillet 2023, lorsque les Mauriciens ont été confrontés à une pénurie de riz ‘ration’, qui constitue la base alimentaire essentielle dans les foyers modestes de l’île. Ils étaient nombreux à exprimer leur inquiétude face à l’indisponibilité de ce produit de première nécessité dans les boutiques et supermarchés du pays.

Le Budget 2022-23 a mis l’accent sur la sécurité alimentaire en introduisant des mesures de contrôle des prix sur des éléments fondamentaux de l’alimentation mauricienne, notamment les pâtes et les céréales de blé. Ces mesures visent à garantir le caractère abordable de ces produits de base pour l’ensemble de la population, en particulier pour les ménages à faible revenu. Compte tenu de la place centrale qu’occupent les féculents tels que le riz, le blé, les pâtes et les pommes de terre dans le régime alimentaire quotidien des Mauriciens, le gouvernement reconnaît l’importance de maintenir la stabilité des prix pour assurer la sécurité alimentaire et atténuer les pressions économiques qui pourraient résulter des fluctuations sur les marchés mondiaux.

Riz : évolution de la chaîne d’approvisionnement et du prix

En 2022, selon les données Comtrade des Nations unies, les échanges commerciaux de riz à Maurice ont été dominés par cinq acteurs clés, chacun contribuant de manière significative à la composition variée du marché local. L’Inde s’est affirmée en tant que plus grand importateur, fournissant 27 489 tonnes de riz, évaluées à 38 374 dollars américains. Le Pakistan suit, avec des exportations totalisant 5 805 tonnes, pour une valeur de 7 448 dollars. La Thaïlande, le Vietnam et les États-Unis ont également joué des rôles essentiels dans la diversification de l’approvisionnement en riz de Maurice, avec des quantités respectives de 875 tonnes, 141 tonnes et 49 tonnes.

Au niveau du prix du riz, le Commodity Market Outlook October Report 2023 met en évidence la hausse des prix mondiaux, résultant de l’interdiction par l’Inde des exportations de riz non basmati en juillet 2023. Les risques liés au renforcement d’El Niño, phénomène climatique associé à une bande d’eau océanique chaude se développant dans le centre de l’océan Pacifique tropical, affectent également la production des principaux fournisseurs asiatiques et contribuent également à cette hausse. Malgré des conditions économiques complexes, le marché maintient une légère tendance à la baisse avec l’abondance de l’offre, comme l’indique le rapport. Le Commodity Market Outlook October Report 2023 prévoit également une hausse de 6 % en 2024, le rapport mettant en évidence les réponses stratégiques des acteurs du commerce mondial du riz, ainsi que les concentrations géographiques et commerciales de la production et des exportations de riz. El Niño devant s’estomper vers la mi-2024, les conditions neutres de l’oscillation australe El Niño (ENSO) en mai-juillet 2024 pourraient faire baisser les prix du riz en 2025.

Défis et adaptations face aux fluctuations mondiales du blé

En ce qui concerne la production mondiale de blé, les prévisions pour 2023 ont été relevées à 784,7 millions de tonnes. Malgré cette hausse des prévisions, la production de blé reste inférieure de 2,3 % à celle de 2022, comme l’indique le rapport d’octobre de l’Agricultural Market Information System (AMIS) Market Monitor. Au niveau du prix du blé, le Commodity Market Outlook s’établit à 345 dollars la tonne métrique avec une baisse du prix à 335 dollars par tonne métrique attendue pour 2024. Les Moulins de la Concorde (LMLC), en tant qu’acteur clé de l’industrie, importe annuellement environ 160 000 tonnes de blé pour répondre à la demande locale.

«Les Moulins de la Concorde a été créé pour renforcer la sécurité alimentaire du pays, en réduisant notre dépendance par rapport aux importations de farine, jusqu’alors traditionnellement importée de France et d’Australie. Au sein des Moulins de la Concorde, le blé est transformé en farine dans le respect minutieux de la biosécurité et des process à toutes des étapes de transformation grâce à un équipement sophistiqué. Il est ensuite ensaché ou empaqueté avant distribution. La qualité de la farine en est améliorée puisqu’elle est toujours fraîche. La consommation de farine est élevée à Maurice car elle est nécessaire à la réalisation de produits qui ponctuent notre quotidien, en particulier le pain et les faratas. La transformation à Maurice, en sus de créer de la valeur ajoutée et de soutenir un important secteur de la boulangerie, pâtisserie, produits alimentaires manufacturés, contribue à la sécurité alimentaire, comme bien illustré lors des confinements sanitaires», nous explique Julien Audibert, son directeur général.

L’approvisionnement en blé à Maurice fait face à des défis multiples, accentués par des événements climatiques, des fluctuations des taux de change et des perturbations géopolitiques, comme le conflit en Ukraine, nous dit-il. «Depuis 2020, nombre de facteurs ont conduit les coûts du blé à des niveaux record : la pandémie de la Covid-19, le déséquilibre des taux de fret, la guerre en Ukraine et maintenant les incertitudes nées de la situation au Moyen-Orient. L’évolution du taux de change constitue une difficulté additionnelle. LMLC vise à maîtriser au mieux ses coûts d’approvisionnement et de production afin de remporter l’appel d’offres international lancé chaque année par la State Trading Corporation. Depuis sa création, LMLC a acquis une grande expérience dans l’optimisation de l’approvisionnement en blé. L’entreprise, qui suit de près l’évolution des cours mondiaux du blé et du fret maritime, travaille de longue date avec des fournisseurs mondialement réputés. Soucieuse de la sécurité alimentaire du pays, LMLC a signé en 2008 un accord d’approvisionnement garanti à hauteur de 130 000 tonnes de blé avec le groupe Soufflet – un fournisseur français de blé renommé – et l’Office National Interprofessionnel des Grandes Cultures (ONI-GC) en France, en présence des autorités des deux pays. En parallèle, LMLC n’hésite pas à diversifier ses sources d’approvisionnement dès lors que les caractéristiques des blés correspondent à ses besoins et offrent un bon rapport qualité / prix / sécurité», nous explique Julien Audibert, le directeur général de LMLC.

Les marchés internationaux ont enregistré des fluctuations significatives des prix du blé, impactant directement les coûts de production et l’approvisionnement. LMLC, consciente de ces défis, a développé des stratégies d’adaptation. La société conserve le blé dans ses 16 silos d’une capacité totale de 40 000 tonnes, assurant ainsi plusieurs mois de consommation de farine. L’entreprise conserve aussi un stock de sécurité de produits finis. De plus, la diversification des sources d’approvisionnement, la surveillance constante des marchés mondiaux et l’utilisation d’instruments de couverture, tels que les options, font partie des pratiques adoptées par LMLC pour maîtriser les coûts et garantir un approvisionnement stable. «LMLC a malheureusement dû augmenter les prix de ses marques commerciales en début d’année, après les avoir maintenus pendant 10 ans. L’avenir est difficile à prévoir dans un contexte aussi volatil», ajoute-t-il.

Tags:

You Might also Like